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L'Avènement du Grand Monarque

L'Avènement du Grand Monarque

Révéler la Mission divine et royale de la France à travers les textes anciens.

Publié le par Rhonan de Bar
Publié dans : #ETUDES HISTORIQUES SUR LIEUX SAINTS

NOTRE-DAME DE ROMAY

ET LES SOUVENIRS QUI S'Y RATTACHENT

PAR L'ABBÉ BARN

CHANOINE HONORAIRE D’AUTUN ET DE ROUEN

CURÉ-ARCHIPRÊTRE DE LA BASILIQUE

DU SACRE-COEUR DE PARAY- LE- MONIAL

NOTRE-DAME DE ROMAY

CHAPITRE III

LES STATUES DE LA SAINTE VIERGE A PARAY

Paroisse de Paray. Paroisse de Marie.

Le culte de Marie, en grand honneur chez nos ancêtres, les chrétiens des premiers temps, a laissé parmi nous des traces profondes. C'est à chaque pas qu'on les retrouve en fouillant le passé de la paroisse de Paray. Nous avons déjà nommé la rue Notre-Dame-du-Cimetière. — Voici au centre de la cité la rue Dame-Dieu, c'est-à-dire Notre-Dame, Mère de Dieu[1], aboutissant au célèbre monastère de la Visitation.

Mais il ne reste pas seulement des noms, des souvenirs et, des églises. Il y a encore d'autres monuments de pierre que celui de la Madone de Romay. Ces statues ont leur histoire. En décrire les plus remarquables s'impose à un historien, désireux de faire la pleine lumière sur la loi du vieux Paray.

I

La première de ces vieilles Madones de Paray à signaler se rattache à l'histoire de Romay. C'est la représentation de la Vierge-Mère. Elle n'a pas assurément la valeur artistique et mystique de la vraie Madone; mais la considérer comme sa soeur n'a rien d'invraisemblable. Cette statue, en pierre de Romay, ayant la grandeur de la première, fut tirée de l'oubli, il y a plus d'un siècle, dans des circonstances singulières. Un charpentier, nommé Joly, travaillait avec plusieurs autres ouvriers au village de Romay, près du moulin. Après le repas du milieu du jour, ils se reposaient sur le bord de la Bourbince. Tout à coup. Joly aperçut à travers l'onde tranquille une masse informe ayant l'apparence d'un corps humain, et aussitôt il appelle sur cet objet l'attention de, ses compagnons de travail. « Je veux savoir ce qu'il en est », dit-il, et il se précipite dans l'eau, peu profonde à cet endroit. Son pied heurte une pierre taillée. Il la soulève et s'écrie : « C'est une Sainte Vierge, je l'emporterai à ma femme, ce soir. Ah ! quelle va être contente ! » De fait, Jeanne-Marie Colin, femme Joly, était une fort bonne chrétienne. Elle fut très enchantée de cette découverte et donna, avec le plus grand bonheur, asile dans sa maison à la statue. Comme la Madone de Romay était habillée en tout temps, elle façonna avec goût des vêtements à sa bonne Vierge. Le socle de la statue se trouvant rongé, par un long séjour dans l'eau, sans doute, Joly en prépara un en bois dans lequel il l'incrusta solidement pour permettre au bloc de garder la position verticale.

Avant de poursuivre ce récit, exprimons notre opinion sur cette statue.

Elle a dû remplacer la Madone des moines, enfouie en terre à l'époque, de l'invasion des Calvinistes, appelés les Huguenots, par mépris, dans plusieurs régions. Elle est demeurée dans la chapelle après la découverte providentielle de l'ancienne et y resta vraisemblablement jusqu'à la Révolution. Les nouveaux iconoclastes de 1793 n'en firent aucun cas. Ils se contentèrent d'emmener la plus vénérée à Paray, tandis qu'un voisin quelconque de la chapelle, pour la soustraire à la profanation, la cachait dans la rivière.

Jeanne-Marie Joly avait la plus grande vénération pour sa Sainte Vierge et elle s'efforçait de la communiquer à ses voisines[2].

La femme Joly perdit successivement son mari et sa tille unique, Jeanne Joly, épouse de Jean Larue. La fille de ce dernier se maria à Digoin et elle emmena sa grand'mère avec elle et la soigna très bien jusqu'à sa mort, lin quittant Paray pour habiter Digoin, Jeanne-Marie emportait avec elle son trésor, c'est-à-dire sa vénérée statue. Placée sur une commode, la Vierge, apparaissait vêtue d'une robe blanche et d'un voile de tulle blanc, garni d'une, riche dentelle. Les petites filles du quartier de la Grève de la Loire, se faisaient une joie enfantine d'offrir les plus belles fleurs à la Sainte Vierge de la tante Joly, et venaient souvent, sur le soir s'agenouiller auprès de la Sainte Vierge, pour réciter une prière. A la mort de cette pieuse chrétienne, arrivée le 13 mars 1853, à l'âge de 83 ans, la statue resta quelque temps à sa place. Un jour elle, tomba à terre et se brisa. Les fragments épars prirent le chemin du grenier et y demeurèrent plusieurs années sans honneur et sans prière[3]. Une soeur de Jean Larue. Mlle Louise Larue, après avoir séjourné longtemps à Paris, revint en Charolais et fut reçue chez sa nièce, à Digoin. Cette personne, ne voyant plus la Vierge, de famille, s'enquit de ce qu'elle était devenue. On lui apprit l'accident. Aussitôt elle s'empressa de la remettre en bon état et de la placer dans, sa chambre. Mlle Larue est revenue à Paray pour y finir ses jours. Elle, a rapporté sa chère statue avec elle et met tout son bonheur à redire à qui veut l'entendre, l'histoire intéressante de la Madone. Nous lui avons demandé de nous permettre de la faire photographier sur place. Elle a bien voulu autoriser la reproduction. Cette Vierge-Mère porte le diadème à pointes. L'Enfant-Jésus est sur le bras droit et la Vierge tient, de la main gauche, l'extrémité du pied droit. Le pied gauche est pendant et l'attitude est celle d'un enfant effrayé, qui se cramponne au vêtement maternel. Le galbe de ce groupe manque absolument de grâce. Cela tient à ce que les pieds sont perdus dans le piédestal rapporté et aussi à l'inhabileté de l'ouvrier. On nous fait espérer qu'un jour elle reprendra son rang au sanctuaire de Romay. Nous lui donnerions, volontiers, telle qu'elle est, une place d'honneur dans la chapelle.

II

STATUE DE LA FAMILLE DAMAS-DIGOINE

Le pieux usage de revêtir d'un insigne religieux les façades de maisons, les frontons des portes d'entrée, les angles de rues ainsi que les places publiques a été établi à Paray par les Bénédictins [4]. On s’est servi de sept bornes, transformées en croix dans la suite, pour marquer les limites d'affranchissement de la ville de Paray.

Il y avait autrefois une grande croix à l'extrémité du pont du moulin des Moines, du côté de l'Hôtel de la Poste. Les anciens actes citent plusieurs autres croix ; la croix de Notre-Dame, près le cimetière, la croix placée sur le chemin de la Villeneuve, la croix de Bouléry et la croix de pierre qui donna son nom au quartier situé en dehors des fossés[5].

Souvent l'insigne religieux est une statue de la Sainte Vierge. Le protestantisme, dans son horreur pour les images, non seulement n'a pas découragé les catholiques, mais il a provoqué ces démonstrations chrétiennes. Lorsque l'habitation d'un catholique, était juxtaposée à celle d'un calviniste, il n'était pas rare de voir le catholique arborer un signe, chrétien quelconque[6]. Le monument le plus caractéristique on ce sens est la Vierge que l'on voit à l'angle de la maison des Damas-Digoine, donnant sur la rue Billet[7] et sur la rue Brice-Baudron maison veuve Muet-Morin. La Madone s encadre dans une niche gothique à pinacle. L’écusson est effacé ; mais il n'y a pas de doute sur son origine, puisqu'on retrouve les armes des Damas sur la plaque de la cheminée de la cuisine. Cet élégant monument rappelle le style de la chapelle sépulcrale de la famille de Damas, transformée en chapelle de la Sainte Vierge. La construction de l'une et de l'autre est du XVe siècle. La Vierge de Mme Muet est de cette époque. Le dessin, la coiffure, la couronne et surtout la nudité de l'Enfant-Jésus n'appartiennent pas au Moyen Age. Ce sont des caractéristiques qui marquent la fin du XVe et le commencement du XVIe siècle.

Dès le XIIe siècle, affirme M. Georges Roliault de Fleury, la Vierge, comme à Bernet, est souvent représentée avec une pomme en main. Nouvelle Eve, elle l'offre à Jésus, en souvenir du Paradis terrestre, rappelé dans le mystère de la Rédemption.

Au moment de la Révolution française, la maison de Damas-Digoine était occupée par M. Naulin, père, de M. Naulin, chanoine honoraire d'Autun, ancien curé-provicaire et archiprêtre de Saint-Pierre de Mâcon, de vénérée mémoire. Pour éviter que la statue, ne fût profanée à la place qu’elle occupait, M. Naulin la fît descendre dans son magasin. Un jour, un habitant de Saint-Yan se présente pour faire un achat. Il aperçoit la Madone et entrant en fureur à la vue de celle Sainte Vierge, il tire de sa poche son couteau et en donne un coup si violent sur la figure qu'il enlève une partie du nez de la statue. On voit encore la marque du coup de couteau.

En s'en retournant chez lui, il rencontra un chien qui le mordit au nez et le blessa gravement là où il avait frappé lui-même la Vierge. Le récit ajoute qu'il mourut peu de jours après des suites de cette morsure, en punition de cet acte d'impiété envers la Vierge Marie [8].

La Vierge a repris sa place et quelques coups de pinceau dissimulent un peu le coup reçu au nez. L'écusson se voit encore, mais on a fait disparaître les armes qu'il portait. Ce petit monument que Mme veuve Muet-Morin, propriétaire, garde religieusement, a le don d'attirer l'attention des pèlerins. Quelquefois ils s'agenouillent, sans respect humain, à ses pieds pour lui adresser une prière, comme cela se pratique encore à Rome, et dans les pays foncièrement catholiques. Chaque fois qu'une procession passe dans cette rue, on entoure la niche de guirlandes et on dépose des fleurs aux pieds de la Vierge. Ces actes publies de dévotion envers la Sainte Vierge sont bien acceptés et, édifient notre population si dévote à Marie dans sa très grande majorité.

Dans la famille Sauteret et Gourgaud, habitant rue du Perrier, on conserve religieusement une vieille, statue de la Sainte Vierge, en faïence de Nevers. Elle, vient de l'église Saint-Nicolas. Les amateurs l'apprécient et estiment qu'elle remonte à deux siècles. La famille ne manque pas non plus de l'exposer à une, fenêtre de la maison, chaque fois qu'à l'occasion d'une grande solennité ou d'une procession extraordinaire, la ville se met en fête en décorant les maisons.

Notre antique basilique n'a pas conservé la Vierge de l'église bénédictine. La statue qui se voit dans la niche centrale du beau retable de pierre est en plâtre durci. Elle manque de caractère religieux. Cependant, les plis des vêtements sont très soignés. Ce qui la distingue de toutes les autres statues de la ville de Paray, c'est une représentation de notre mère Eve, apparaissant au bas du vêtement de Marie et mordant sur la pomme pour rappeler le péché originel. Près du vieux Saint-Nicolas, un bel édifice du style de la Renaissance, la maison Jayet, qui sert de mairie, attire l'attention des visiteurs. Autrefois, parmi les riches sculptures, on voyait une statue de la Sainte Vierge entre deux anges, que le marteau révolutionnaire a fait disparaître. Il y a là une preuve de plus à ajouter à celles que M. Georges Bonnet a apportées dans un des chapitres de sa brochure publiée en 1893, sous ce titre : « Notes pour servir à l'Histoire du Charolais », pour démontrer que la maison Jayet n'est pas l'oeuvre d'un protestant. Dans l'intérieur de la ville, çà et là  plusieurs maisons particulières sont encore ornées d'une statuette de la Mère du Ciel[9]. En un temps où l'impiété porte le front si haut, il serait à désirer que celle pratique devînt, plus générale dans la cité de Marie et du Sacré-Coeur. Quelle édification ce serait pour les pèlerins de l'avenir, de rencontrer ici une statue de Marie, là, une statue du Sacré-Coeur, au coin des rues et, aux façades des maisons de nos fervents catholiques de toutes les classes, depuis la modeste habitation de l'ouvrier, resté chrétien, jusqu'à ces belles habitations modernes que l'on voit sortir de terre, comme par enchantement depuis que d'immenses foules de pèlerins accourent ici.

On ne craint pas, à Paray, d'emprunter à la religion des noms et des emblèmes sacrés, comme enseignes de négoce. Pourquoi ne nous distinguerions-nous pas des adeptes des sociétés secrètes, par des statues de pierre, de bois ou de marbre, en l'honneur de Notre-Seigneur, ou bien de sa Sainte Mère ? Arrière donc le respect humain !

 

[1] Les laïcisateurs de la Révolution, acharnés à effacer tous les souvenirs de notre sainte religion, lui donnèrent le nom de rue des Droits-de-l'homme. Le peuple de Paray ne prit pas au sérieux ce changement de nom. Il continua et continue à dire la rue Dame-Dieu. On a pensé que ce nom avait été donné à cette rue en souvenir de la Madone de Romay, cachée chez Catherine Roulier, qui habitait cette rue. Nous croyons que ce nom est plus ancien. [2] Elle habitait la maison basse, située à l'extrémité de la rue de la Visitation et faisant partie de la maison de M. Villedey de Croze. [3] Nous tenons ces détails de deux personnes de Paray, dont les souvenirs d'enfance ont gardé, dans un âge avancé, toute leur fraîcheur, Mme veuve Du Vernay, d'une part, et Mme veuve Bonnevay, décédée depuis quelques années. [4] La maison de M. Léon Lempereur, sur la place Guignault, ancienne maison des moines de Paray, présente plusieurs inscriptions de sentences de l'Évangile. [5] La croix de pierre fut ainsi appelée parce qu'elle remplaça une croix de bois très ancienne. Au moment du changement du nom des rues, pendant la Révolution, ce quartier s'appela le Faubourg du Sommeil. [6] En voici un exemple récent. L'an dernier, en démolissant la maison Douhéret, voisine de l'ancienne maison des protestants Gravier, on découvrit des pierres portant une inscription que nous avons lue facilement. Sur le sommet d'un fronton de porte d'entrée est gravé le monogramme du Christ, surmonté de la croix. Au-dessous, on lit ces mots : In te, Domine, speravi, non confundar in oeternum, 1666 : et un peu plus bas : A. Poncet. C. Hérisson. Ces noms appartenaient à deux familles catholiques de Paray. [7] Ce nom rappelle le souvenir du docteur Billet, qui soigna la bienheureuse Marguerite-Marie dans sa dernière maladie.[8] Plusieurs personnes dignes de foi relatent le fait. Nous nommerons Mlle Henriette Fauconnet, qui le tient de Mme Thomas, nièce de M. Naulin, propriétaire de la statue, et Mme veuve Muet-Morin, propriétaire actuelle de la maison ayant appartenu à la famille de Damas-Digoine.[9] Rue du Perrier, maison Fauconnet, dans une niche ouverte sur la façade, on voit une statue en bois de saint Nicolas, patron de l'église paroissiale.


 

NOTRE-DAME DE ROMAY.
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Publié le par Rhonan de Bar
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NOTRE-DAME DE ROMAY ET LES SOUVENIRS

QUI S'Y RATTACHENT

PAR

L'ABBÉ BARN

CHANOINE HONORAIRE D’AUTUN ET DE ROUEN

CURÉ-ARCHIPRÊTRE DE LA BASILIQUE

DU SACRE-COEUR DE PARAY- LE- MONIAL

NOTRE-DAME DE ROMAY

 

CHAPITRE II

LA CHAPELLE ET LA MADONE DE ROMAY

Il est ordonné aux Frères qui travaillent en dehors de monastère d'accomplir « l'OEuvre de Dieu. » Règle de saint Benoît (Chapitre L).

Cette petite chapelle, prémices du monastère, aura l'immortelle durée d'un monument d'airain [1].

I

LA CHAPELLE

Avant de porter à travers le monde catholique le beau nom de Cité du Sacré-Coeur, Paray fut depuis son origine chrétienne la Cité de Marie. Celle-ci a préparé celle-là. La première église, dont la chapelle actuelle du cimetière formait l'abside et le choeur, fut placée sous le vocable de la Sainte -Vierge, sous le titre de Notre-Dame, et dans la suite Notre-Dame-lez-Paray. La petite ruelle partant du vieux Saint-

Nicolas pour aboutir au cimetière porte encore le nom de rue Notre-Dame. Celle première paroisse a pré-existé au monastère du Val d'Or (973). La date de la fondation de cette première église est entièrement ignorée des historiens, mais plusieurs noms, portés par les lieux avoisinant l'église, tels que Saint-Léger, ancienne paroisse, la fontaine de Saint-Martin, rappelleraient les siècles où ces deux saints jouissaient d'une grande popularité, et le nom des Grénetières, dans un pays de broussailles qu'était cette contrée à l'arrivée des moines, indiquerait que Notre-Dame, comme paroisse, remonte bien au-delà du Xe siècle.

Le second sanctuaire en l'honneur de la Sainte Vierge est celui de, Romay. Il est assis au fond du Val d'Or, sur le territoire de Paray, à deux kilomètres de la ville. Aux alentours de la chapelle, derrière le petit village de Romay, on aperçoit un monticule présentant des plis de terrains très accentués. C'est là qu'une tradition constante et très bien motivée place les carrières qui ont fourni la pierre et la chaux pour-ies constructions du monastère, de l'église de Paray et de la plupart des anciennes constructions de la ville. M. Canat de Chizy[2] cite, charte 2, le Cartulaire de Paray, où il est dit qu'aux premiers coups de pioche, Dieu, pour montrer qu'il approuvait les projets[3], permit qu'on rencontrât un dépôt considérable de pierre et de chaux, inconnu aux habitants de la contrée, lequel profita largement à l'avancement des bâtisses.

Avec M. Cucherat, nous regardons colle découverte de pierre et do chaux comme légendaire. Il n'y a pas de pierre ni de chaux sur le territoire de Paray, niais simplement du sable. Sur le monticule de Romay, on découvrit de la pierre calcaire, mêlée de silex, propre à faire de la chaux. La Bourbince fournissait abondamment le sable. Ces matériaux sur place permirent de hâter les constructions. C'est ainsi qu'il faut entendre ce dépôt considérable de pierre et de chaux et ne pas croire à l'existence de constructions d'une antiquité purement imaginaire dont on n'a jamais découvert la moindre trace nulle part.

Les habitants de Paray se transmettent de génération en génération la vieille légende des deux boeufs conduisant, sans guide, par l'ancien chemin dit les rues de Romay, toute la pierre employée à la construction de la grande église des Moines, légende en opposition formelle avec l'affirmation de M. Canat de Chizy, que les carrières de Romay ont été abandonnées de bonne heure, parce qu'elles ne fournissaient qu'un calcaire mêlé de silex. En réalité, notre monument bénédictin tout entier, dans sa partie la plus ancienne qui date de la fin du Xe siècle, et dans sa grande restauration que l'auteur de l'Introduction au Cartulaire du prieuré de Paray, M. Ulysse Chevalier, fait remonter à 1447-51[4], est entièrement bâti avec la pierre de Romay. Au contraire, le monastère qui démeure encore debout, commencé vers 1700 et terminé vers 1740, est bâti en pierre de Saint-Vincent-lès-Bragny.

L'ouverture des carrières de Romay par les Bénédictins de l'Ordre de Cluny, pour la construction d'une église et d'un monastère, entraînait nécessairement l'érection d'un oratoire non loin des chantiers d'exploitation de la pierre mureuse et de la pierre de taille par des ouvriers du pays, sous la direction des religieux. L'oratoire est prescrit par le chapitre L de la règle de saint Benoît et il est ordonné qu'il sera construit à une certaine distance du chantier de travail, pour que le bruit ne trouble pas le recueillement des Frères dans l'accomplissement de l'Œuvre de Dieu, c'est-à-dire la récitation du saint office.

Telles sont l'origine et la raison d'être de la chapelle de Romay. L'oratoire primitif s'élevait tout proche d'une fontaine que la tradition a, de tout temps, considérée comme miraculeuse.

La façade d'entrée regarde le couchant. Autrefois, elle était de style roman pur et percée d'une porte, abritée par un avant-toit sous lequel on voyait une statue de sainte Agathe, en pierre grossièrement taillée[5]. Une rosace ou oeil-de-boeuf s'ouvre au-dessus. Enfin elle se terminait par un pignon coupé à son sommet pour recevoir un gracieux campanile, supportant une cloche dont nous ferons plus loin l'historique.

On pénètre dans la chapelle par un perron de trois marches. Du seuil de ce petit édifice, la vue d'ensemble plairait assez à l'oeil, n'était le faux jour que donne la grande fenêtre ogivale du fond, disproportionnée à l'exiguïté du sanctuaire.

La chapelle fut vendue à la Révolution. L'acte de vente porte cette délimitation : « Le bâtiment a quarante-deux pieds de long sur vingt-cinq de large. Il est limité au matin par le verger de la citoyenne veuve Julien, née Guinet [6], au midi par les bâtiments du domaine du sieur Carmoy, au levant par le petit bâtiment, adossé au mur de la chapelle, mitoyen avec elle ; au soir par la fontaine de Romay, le chemin de la grande route du Canal entre deux ».

En inspectant le pourtour de ce petit monument, on observe du premier coup d'oeil qu'il n'a pas été bâti d'un seul jet et qu'il a subi plusieurs modifications. La baie démesurée du fond de l'abside, dont nous parlons ci-dessus, a été percée après coup, sans doute pour donner du jour. Elle est gothique, à double meneau, au lieu d'être romane comme le reste[7]. On retrouve, adossés au mur méridional, des contreforts énormément massifs. Ils rappellent bien ceux de l'église de Grandvaux. élevée par les moines de Paray au XIIe siècle. Une fenêtre murée près du contrefort de droite donne une idée du caractère de l'édifice avant tous les remaniements dont il porte les traces. Un arc de cercle repose sur les pieds droits ; cette fenêtre parait très ancienne. Il est fort regrettable que l'architecte. M. Lavenant, de Paris, dans la restauration qu'il a exécutée aux frais de Mlle de Semnaize, ne se soit pas inspiré de l'idéal du premier constructeur, au lieu de ce mélange si peu harmonieux de roman et de gothique, blâmé par le public connaisseur.

L'intérieur est moins disparate que l'extérieur. De gracieuses peintures modernes ornent les murs. Le regard cherche d'abord la Madone. Elle apparaît à l'arrière du maître-autel en beau marbre blanc, toujours cachée sous une robe et un manteau plus ou moins riches, selon le rite des fêtes de la Sainte Vierge. C'est là cette Vierge vénérée dont nous allons faire l'histoire.

A droite, près de la balustrade en fer forgé, on remarque une petite chapelle en l'honneur de sainte Anne, érigée par les confrères de Sainte-Anne en 1735, date qui se lit encore à gauche : « Tronc de Romay, 1735. » L'autel est aussi en marbre blanc. Un tableau représentant sainte Anne, donnant à la Sainte Vierge une leçon de lecture, est dû au pinceau de M. Malard, peintre de Paray[8], lequel serait aussi l'auteur du saint Jean-Baptiste de la chapelle des fonts baptismaux de la basilique de Paray. L'ancien maître-autel était en bois et le tableau donné en ex-voto par les Dames de Paray[9]  fut placé derrière l'autel, en face de la grande baie ogivale, pour atténuer le faux jour qu'elle répand sur la Madone et sur l'autel. Tous les ex-voto qui tapissaient les murs de la chapelle avant la Révolution de 93 ont disparu. Depuis sa réouverture, les personnes pieuses en ont offert un grand nombre ; mais ces objets ne se signalent en général ni par Part, ni par le bon goût.

A partir des pèlerinages au Sacré-Coeur, la chapelle de Romay reste quelque peu dans l'oubli. C'est à peine si les pèlerins du Sacré-Coeur soupçonnent l'antiquité et la renommée de ce modeste sanctuaire. On pourrait croire que la Sainte Vierge tient à s'effacer pour ne rien enlever aux grands triomphes du Sacré-Coeur. Au reste, Romay était peu abordable.

Le chemin nommé les rues de Romay, mal entretenu, ne présentait pas une promenade agréable aux étrangers. Depuis bien longtemps, la population réclamait un chemin plus commode et plus agréable. Après bien des négociations, en 1883, sous l'administration de M. Berger, maire de Paray, M. de Marguerie, propriétaire des domaines de Romay, consentit à un traité sur les bases suivantes : la ville céda une partie de l'ancien chemin allant de Paray à Romay, sur la rive droite de la Bourbince, et le propriétaire fit abandon du terrain nécessaire pour ouvrir une avenue en face de la chapelle et donna en surplus une indemnité, de 1,500 francs, qui fut employée à couvrir une partie de la dépense du chemin. Il fut stipulé dans l'acte que la propriété de la fontaine n'est pas comprise dans l'échange ci-dessus. Celle transaction donna pleine et entière satisfaction au peuple de Paray. Et depuis, le mouvement vers Romay va toujours grandissant les dimanches et les fêtes de la Sainte Vierge.

Quelle promenade gracieuse ! quelle douce vallée ! quelle souriante nature offre le Val d'Or, sillonné de trois voies ferrées ! Bien pieux aussi est l'antique sanctuaire ! On prie avec confiance la Madone des anciens âges, et on revient de cet humble pèlerinage l'âme tout embaumée d'un parfum de joie qui n'est pas de cette terre.

A partir de ce moment, le sanctuaire de Romay fut appelé à recevoir la visite d'un plus grand nombre de pèlerins du Sacré-Coeur. Dès lors, on comprit bien que des réparations s'imposaient. Extérieurement, la façade, restaurée en 1844, se dégradait. M. Alexandre de Verneuil la fit réparer à ses frais. L'intérieur laissait fort à désirer comme ordre et propreté. Un appel à la générosité de la paroisse en faveur du sanctuaire est bien accueilli dans la population ; les souscriptions arrivent et on commence des travaux de peinture qui donnent comme une vie nouvelle à tout l'ensemble de la chapelle.

Nous lisons dans le Pèlerin de Paray, à la date du 15 octobre 1885 :

« La chapelle de Romay, si célèbre et tant vénérée dans la région, vient d'être décorée de peintures, grâce au zèle de M. le Curé de Paray et à la munificence publique. L'ornementation sobre de détails, mais de bon goût, est due au pinceau de M. Ferdinand Dessalles, de Marcigny. Nous sommes heureux de lui exprimer nos remerciements. Plus que jamais, les pèlerins du Sacré-Coeur aimeront à faire la pieuse excursion de Romay. M. le Curé eut l'idée de célébrer cet embellissement du sanctuaire par une fête solennelle. Il obtint de S. G.Mgr Boyer, évêque de Clermont, enfant de Paray, un diadème et une robe qui arrivèrent la veille de l'Assomption. Mgr Perraud, évêque d'Autun, accorda un couronnement épiscopal à la Vierge, sans pouvoir se procurer la satisfaction de présider la cérémonie. La fête en fut fixée au 6 octobre 1885, et elle a été très solennelle. Mgr Dubuis, évêque de Galveston, présidait, entouré de M. le Curé de Charlieu, de plusieurs archiprêtres du Charolais et de tous les ecclésiastiques du voisinage de Paray. Le pèlerinage de la paroisse de Lourdes, venu pour honorer le Sacré-Coeur, fut très touché à la vue des honneurs qu'on rendait à la Sainte Vierge à Paray-le-Monial. Dans l'après-midi, une belle procession s'organisa au sortir de la basilique, pour se diriger vers Romay. A mesure qu'arrivent les files pressées des fidèles, elles se massent devant la façade de la chapelle et tout alentour, pour entendre le discours de M. l'abbé Gillot, chapelain-missionnaire de la basilique du Sacré-Coeur. L'orateur considère la fête de ce jour comme la fête de la sainte espérance : « Nous trouvons tous à Romay, premièrement une Mère qui nous aime, deuxièmement une Mère qui nous bénit. Il énumère ensuite les dons de Notre-Dame de Romay à ceux qui viennent l'nvoquer ici pour obtenir la grâce du baptême à nombre d'cnfants mort-nés, la guérison des malades, la cessation des fléaux et calamités publiques et la conversion des pécheurs au lit de mort ». Le Pèlerin de Paray, en terminant la relation de cette touchante fête, s'écrie : « Honneur aux paroissiens de Paray, qui savent si bien témoigner leur amour et leur reconnaissance à Marie ! Merci au généreux prélat, illustre enfant de Paray, qui a noblement enrichi notre bonne Dame par l'offrande d'un diadème et d'un manteau et dont l'absence a été bien regrettée ! Merci enfin au zélé pasteur qui a eu l'heureuse inspiration de celle fête ! »

Ajoutons que la population parodienne donna, par sa présence et par la décoration des rues, des maisons et des places publiques, le plus grand lustre à cette solennité. C'était comme le prélude de toutes les belles fêtes qui attestent de la façon la plus expressive la touchante dévotion de Paray envers Notre-Dame de Romay.

Aussi bien, tout le monde s'accorde à reconnaître que la chapelle est trop petite pour recevoir les foules qui s'y rendent en pèlerinage au temps où de tous les points de la France et de l'étranger les pèlerins du Sacré-Coeur affluent à Paray-le-Monial. Un des charmes du pèlerinage est, depuis quelques années, une procession à la chapelle de Notre-Dame, avec accompagnement de prières et de chants en l'honneur de Marie. Lorsque 150 pèlerins ont pénétré dans la chapelle, elle est archicomble. Le reste est condamné à rester dehors pendant la prédication et le salut du Saint-Sacrement.

Plusieurs difficultés semblent s'opposer en ce moment à l'exécution d'un agrandissement. Patience! Notre-Dame à son heure. Ce n'est pas en vain qu'elle attire à son sanctuaire mieux connu les pèlerins du Coeur de son bien-aimé Fils. Le jour viendra où la vive reconnaissance de la France lèvera tous les obstacles et du fond du Val d'Or émergera non plus une simple chapelle, mais une église surmontée, d'un superbe campanile, garni de cloches, saluant chaque pèlerinage en l'honneur de Notre-Dame de Romay.

II

LA MADONE DE ROMAY

Avant d'entrer en matière sur l'âge de notre statue ou icône sacrée, nous déclarons que nous n’ eussions pas donné autant d'importance à cette question, si, près de nous, n'avait pas surgi tout à coup une opinion d'une exagération inouïe sur son antiquité.

Pour la contredire, nous nous appuyons sur des autorités d'une valeur incontestable. Elles viennent corroborer une ancienne opinion, simplement énoncée dans notre brochure de 1897, et nous permettent de la produire au grandjour dans cette histoire du sanctuaire vénéré ; car nous savons combien en notre temps tout le monde s'intéresse aux questions d'âge des monuments, des figures et des représentations divines et humaines. Avant tout, donnons une description technique cl esthétique de la statue, dénommée par la foi populaire : Notre-Dame de Romay.

C'est un groupe en pierre extraite dos carrières du lieu même. Sa hauteur est de 70 centimètres, et son poids d'environ 50 kilos. La Vierge est debout et porte l'Enfant Jésus sur le bras droit, tandis que, de la main gauche, elle tient délicatement les pieds du divin Enfant. Celui-ci, en vêtement court et simple, tient entre les mains une pomme, fruit du Paradis terrestre. Le front de la Madone est orné d'un diadème, émoussé par l'âge, et dont il ne reste plus que le bandeau, rehaussé d'une imitation de pierreries. La Vierge est vêtue de la robe ou tunique et du manteau royal dont la bordure, très régulièrement sculptée, a un caractère roman, au dire des savants iconographes qui font pleine autorité pour nous. Dans notre notice de 1897, nous nous rangions pour l'âge de la Madone à l'opinion de M. Cucherat, optant pour le XIIe siècle [10], sans la discuter autrement.

M. Rohault de Fleury, actuellement secrétaire du Voeu national de Montmartre, visitait Para y le 27 septembre 1876. M. Cucherat le conduisit à Romay. Il examina avec soin le groupe dévêtu et l'attribua au XIIe siècle, en ajoutant qu'il considérait cette icône comme l'une des Madones les plus curieuses de cette époque reculée. Plus tard, pour appuyer l'opinion émise dans notre premier travail, l’idée nous vint de lui écrire, en lui envoyant une photographie de la Madone charolaise. Notre lettre tomba entre les mains de M. Georges Rohault de Fleury, son frère, continuateur des travaux de son père sur l'iconographie mariale. A la date du 8 juillet 1896, il nous écrivait : « Je dois dire que je n'ai pas de réponse bien explicite à vous faire sur la question d'âge de ce monument que vous désirez connaître ». Cela se comprend. Il n'avait alors qu'un simple croquis au crayon, tracé bien à la hâte par son frère dans sa visite à Romay.

Il ajoute : « Nous l'avons daté du XIIe siècle dans notre recueil; mais je dois dire aussi que c'est un maximum chronologique — à s'en rapporter à la rudesse du dessin, à son exécution sommaire, aux défauts de proportions, on se croirait d'abord devant une oeuvre romane, mais un examen attentif fait baisser l'estimation. Il faut se persuader d'abord que les Madones figurées debout sont très rares au XIe et XIIe siècle. Ce n'est qu'au XIIIe siècle je ne parle pas dans tout cela des byzantines que les artistes ont eu l'idée de la figurer debout. Il me semble que les caractéristiques, que le costume et l'ornementation peuvent nous offrir concordent avec une date entre le XIIe et le XIIIe siècle. »

En 1897, parut une notice ayant pour titre : « Le Triomphe de Notre-Dame de Romay. » Il y est dit que les rapports les mieux étudiés de la Société Archéologique d'Arles et du Musée Egyptien ont reconnu dans l'icône de Romay une oeuvre de facture très originale, portant des caractères qui tiennent à la fois de l'Occident et de l'Orient et dont la date doit être placée entre le n' et le ive siècle.

Il est assez dans nos habitudes de nous incliner devant l'autorité des savants. Je suppose que cette opinion parvienne à entrer dans le domaine de la vérité, nous serions enchanté, tout le premier, de posséder une des plus anciennes Madones de la chrétienté. La question méritait donc une étude très approfondie. Nous l'avons abordée, sans parti pris et sans nous départir du respect que nous professons pour les partisans de l'antiquité si merveilleuse de notre groupe de Romay. A cet effet, nous nous adressâmes pour la seconde fois à l'éminent iconographe qui, à la suite de son père, s'est fait une spécialité des icônes de la Sainte Vierge, M. Georges Rohault de Fleury.

En même temps, il recevait de notre part la photographie du groupe, prise par M. Tillon. photographe de Clermont, un estampage de l'inscription gravée sur le socle, relevée avec le plus grand soin par le statuaire Boutte et enfin la notice : « Le Triomphe de Notre-Dame de Romay. » Voici sa réponse : « On ne peut vous dire autre chose que ce que j'ai eu l'honneur de vous exposer. Cette statue constitue incontestablement pour moi une oeuvre du XIIe au XIIIe siècle. C'est déjà une noblesse bien ancienne et les documents sur lesquels on voudrait se baser me paraissent infiniment peu fondés. J'ai vu une quantité de Madones grecques, marquées du sigle Mu et theta qui ne convient pas ici[11]. » M. Rohault de Fleury, aussi savant que modeste, envoya nos pièces à Mgr Xavier de Montaut qui lui répondit de se reporter à ce qu'il avait écrit dans un article publié en 1895 par la Revue de l'Art, chrétien, sous ce titre : « La Vierge de Paray ». Il y est dit : « Réfutons d'abord les théories émises. Nous ne connaissons les Vierges du IIIe siècle que par les catacombes romaines. Or il n'y a pas à faire le moindre rapprochement entre elles et la Vierge de Paray. Comparez la statuette avec les Madones antiques du IXe et du XIIe siècle, la dissemblance vous sautera aux yeux; bien plus, je ne vois ni chandelier (flambeau), ni lettres grecques, pas plus qu'un style gréco-byzantin, et je ne parviens pas à saisir l'idée symbolique sous aucune forme, et encore moins à y voir l'application de certains passages de l'Evangéliste (saint Jean), appropriés à la réfutation d'hérétiques qui ne sont pas ici en cause[12]. La vérité simple, la voici : Cette Vierge est complètement française. Elle ne remonte pas au-delà du commencement du XVIe siècle. Elle peut être contemporaine du règne de Louis XII (1498-1515). La broderie du manteau n'a pas une saveur antique. L'Enfant Jésus est assis sur le bras droit. A une époque antérieure, on l'eût placé sur le bras gauche, car la droite eut été occupée par une fleur de lis. Sur le socle saillissent deux lettres parfaitement latines que M. Pallusta lit : A et B, initiales du sculpteur sans aucun doute. Je ne suis pas sur ce point d'accord avec mon docte ami. A mon avis, ce sont plutôt celles du donateur. La figure séparative nous l'apprend, c'était un prieur qui a apposé comme signe de sa dignité le bourdon (bâton de pèlerin) à double pomme. M. Pallusta, dont les décisions font autorité, estime la statue d'un quinzième siècle avancé. Nous sommes donc bien près de nous entendre, une quinzaine d'années de plus et l'accord est parfait. J'espère que je ne serai pas contredit. » M. Robault de Fleury réplique à cela : « Mgr Barbier est plus formel que moi et fait descendre la Madone au règne de Louis XII. Je ne puis la croire d'une époque si tardive, parce que les Madones du XIVe et du XVe siècle offrent généralement un mouvement de touche que je ne trouve pas ici. Il me semble qu'elle a des caractères suffisants pour être attribuée au XIIIe siècle. »

Avant de fixer définitivement notre jugement, nous avons fait appel en dernier lieu aux connaissances archéologiques de M. Lefebvre-Pontalis, bibliothécaire du Comité des travaux historiques et scientifiques, membre correspondant de la Société Eduenne et auteur d'une étude historique et archéologique d'une grande valeur sur l'église de Paray. M. Morin-Lauvernier, photographe à Paray, a été chargé par nous de prendre la photographie de la Madone. Une reproduction très fidèle lui a été adressée en même temps que notre plaquette « Notre-Dame de Romay », avec prière de nous donner son avis sur l'âge approximatif de cette Vierge. Nous reproduisons en entier la lettre qu'il a bien voulu nous écrire :

« Je ne connaissais pas la statue de Romay, mais grâce à la reproduction photographique, je n'hésite pas à l'attribuer au XIIIe siècle. Les Vierges de l'époque romane sont toujours représentées assises, avec l'Enfant Jésus sur leurs genoux, comme la Vierge en bois, conservée à Saint-Denis, qui provient de Saint-Martin-des-Champs. Cette façon de figurer la Vierge persiste encore pendant le XIIIe siècle, comme le prouve une remarquable statue de bois conservée à Taverny (Seine-et-Oise). Mais, à cette époque, on vit apparaître le type de la Vierge debout, tenant l'Enfant Jésus dans ses bras, comme au portail de droite dans la façade de la cathédrale d'Amiens. Ce qui distingue les Vierges de cette époque, c'est qu'elles n'ont pas le déhanchement gracieux des Vierges du XIVe siècle. Elles conservent encore la pose raide et hiératique des Vierges romanes. Si la statue de Romay était du XIIe siècle, ses vêtements seraient plissés au petit fer et gaufrés comme ceux des statues du portail royal de Chartres. Il me semble impossible, au point de vue iconographique, d'attribuer la Vierge à une époque antérieure au XIIIe siècle. J'ajouterai qu'elle est plus remarquable par son ancienneté que par sa valeur artistique. C'est l'oeuvre d'un ouvrier du pays qui n'avait pas travaillé sous la direction d'un maître éminent, mais la naïveté de l'expression des deux figures ne manque pas de charme ».

En présence de telles autorités, nous optons, sans hésiter, pour la date du XIIIe siècle, et Son Eminence le cardinal Perraud, notre évêque, nous a autorisé à faire graver cette date sur un marbre placé dans la chapelle de la Madone. Pour ce qui nous concerne, nous pouvons affirmer que le diadème de la statue ne porte aucune trace d'une fleur de lis et qu'une des deux lettres, gravées sur le socle, a paru indéchiffrable  à M. Cacherat et au statuaire Boutte, reproduisant le groupe placé sous la grotte qui abrite la fontaine miraculeuse. Tout en laissant à chacun le droit de choisir telle ou telle opinion, nous conclurons par cette affirmation : Noire Madone de Romay est tout à la fois française, bénédictine et cluniste et c'est là la raison qui nous a guidé en ornant le diadème du couronnement des armes de l'abbaye de Cluny, dont Paray était une des quatre filles : De gueules aux deux clés traversées par une épée à poignée d'or et à lame d'argent. Ce n'est qu'après coup qu'un de nos amis [13] nous présenta le sceau du doyenné de Paray, reproduit sur cire, où figure en chef l'Agneau vainqueur au-dessus du blason de Cluny avec celle inscription: Sceau du doyenné de Paray, de l'Ordre de Cluny [14].

Une tradition constante autorise à regarder la statue actuelle comme étant bien celle qui fut enfouie en terre au milieu du XVIe siècle, pendant les guerres religieuses entre les huguenots et les catholiques de Paray...

À suivre...

 

[1] Poèmes du Charollais, p. 233. - Marie Suttin.[2] Origine du Prieuré de Notre-Dame de Paray, page 6.[3] Intercederetur Deo esse placitum. [4] C’est sous le prieur de Paray, Girard de Gypierre, du temps de Pierre le Vénérable (et non au XIIIe siècle, que fut agrandie l'église qui subsiste encore, pp. xv et xvi. — Voir Canal de Chizy, p. 12. — Lefèvre-Pontalis, pp. 8 et 11. [5] Témoignage de Mlle Marie Prost, sacristine de Romay, née en 1831. [6]  Guinet de Villorbenne.[7]  Dans une niche profonde et obscure du sanctuaire, servant de crédence, on distingue, à l'aide d'une lumière, un bas-relief, grossièrement sculpté. Il représente deux burettes posées sur un plateau sous lequel est figuré un flambeau cannelé et disposé en sautoir sous le plateau. Cette sculpture doit appartenir à l'abside primitive. [8] La toile de sainte Anne est, paraît-il, la reproduction d'un tableau d'un peintre italien.[9] Au bas du tableau, ou lit : Voué par les Dames de Paray à Notre-Dame de Bon-Secours pour le salut de la France, 1815. [10] Romay et Sancenay. 1861. [11] Ces lettres grecques sont les initiales de deux mots qui signifient Mère de Dieu.[12] Le savant archéologue tait allusion ici aux assertions de l'auteur du Triomphe de Notre-Dame de Romay. [13] M. G. Bonnet, de Paray, très documenté sur l'histoire de cette ville.[14]  (2) Sigillum decanatus parodiensis or Jinis cluniacensis.

 

NOTRE-DAME DE ROMAY
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Publié le par Rhonan de Bar
Publié dans : #ETUDES HISTORIQUES SUR LIEUX SAINTS

NOTRE-DAME DE ROMAY

ET LES SOUVENIRS QUI S'Y RATTACHENT

PAR

L'ABBÉ BARN

CHANOINE HONORAIRE D’AUTUN ET DE ROUEN

CURÉ-ARCHIPRÊTRE DE LA BASILIQUE

DU SACRE-COEUR DE PARAY- LE- MONIAL

NOTRE-DAME DE ROMAY

CHAPITRE I

PREMIÈRES ORIGINES

Le passé d'un pays éclaire son présent, son présent éclaire son passé : le présent et le passé peuvent aider à deviner l'avenir et le préparer.

Paray ! Romay ! Deux noms vraiment prédestinés dans la marche des siècles. Leur renommée est la plus glorieuse qu'on puisse rêver pour une cité aussi peu importante que la nôtre.

Paray, c'est le Sacré-Coeur !

Romay, c'est la Vierge Marie!

Ces deux grandes dévotions remplissent actuellement l'univers catholique. Paray est le berceau de la première — Romay est le foyer dix fois séculaire de la seconde. Pour ce double motif, on peut pronostiquer que l'avenir réservé à Paray préparé par le passé et le présent, sera des plus glorieux au point de vue catholique.

Que l'incrédulité moderne en prenne donc son parti. Quoi qu'elle, fasse, elle n'opposera jamais une digue assez formidable à ce flot toujours grandissant qui, chaque année, jette sur la paroisse hospitalière de Paray les populations chrétiennes de la France et du inonde entier.

Mais plus une contrée, est célèbre par les merveilleux événements qui s'y déroulèrent, plus le visiteur est avide de connaître les premières origines de son histoire.

Voilà pourquoi plusieurs historiens, en parlant de Paray et de Romay, ont voulu aborder la question de leurs origines et ont tenu à donner leur sentiment sur la signification de ces noms Paray et Romay.

Il est avéré que la science des étymologies a fait depuis quelque temps de sérieux progrès". Elle compte déjà des savants de première, valeur. Ils ont posé des principes, établi certaines règles d'interprétation assez sures. Cependant la vraie étymologie de beaucoup de noms propres leur échappe et reste encore à l'état de secret.

Cette science nous est peu connue et le lecteur trouvera peut-être qu'il y a témérité de notre part à nous engager sur un terrain aussi périlleux que celui-ci. Notre, excuse, la voici. Depuis que nous nous occupons d'études historiques sur notre. Paray religieux, cent fois on nous a posé celle question : Que pensez-vous des étymologies assignées aux noms de Paray et de Romay par quelques écrivains modernes ?

Sans prétendre entrer en lice avec les autres historiens de Paray, nous ferons connaître dans les deux paragraphes suivants le résultat de nos longues et consciencieuses recherches sur ce point, en laissant au lecteur le soin de former son opinion en connaissance de cause.

1

ÉTYMOLOGIE DU MOT DE PARAY

Ce mot est tout à la fois un nom de lieu, de famille et d’habitation[1]. La France compte plusieurs localités du nom de Paray. De ce nombre mentionnons seulement Paray-le-Moineau (Seine-et-Oise), arrondissement de Corbeil. Dans l'Allier, Paray-le-Frésil et Paray-sous-Briaille. En Saône-et-Loire, notre Paray-le-Monial.

La pluralité des localités du nom de Paray est déjà une raison suffisante pour se défier de toute étymologie, tirée du sol même de notre localité.

Nous avons demandé à M. l'abbé Clément, de Moulins[2] , archéologue de mérite, ce qu'il pensait de l'étymologie du nom de Paray, porté par deux communes du département de l'Allier.

Voici sa réponse :

« Ce nom vient-il du latin ou du cette? Je, le, crois « plutôt gallo-romain. Dans ce cas, j'adopterai comme « étymologie Paredum ; car on sait que la forme « latine du Moyen âge est Paredus. Dans les actes « anciens, les chartes, etc., Paray-le-Frésil est dit : « Paredus Frederici [3], XIIIe siècle, et Paray-sous-Briaille, Paredus tout simplement au XIIIe siècle, et enfin Paray au XIVe siècle. »

En Saône-et-Loire, Paredus se trouve dans un diplôme de Charles-le-Chauve, en 877, donnant à l'abbaye de Saint-Andoche la villa Paredus, située dans l'Autunois. Entre le Paredus Charolais et celui de l'Autunois y a-t-il quelque rapport? Nous l’ignorons ; mais il est certain que Paray vient de Paredum[4], passant par Pared, Pareid et Paroy en vieux style français.

Pour nous renseigner sur les Paray de Seine-et-Oise, nous avons eu recours à M. le Curé de Paray-Douaville. Il nous a informé que Paray-le-Moineau a pris, en 1845, le surnom de Paray-Douaville. Cette ville a son histoire dans le passé aussi bien que Paray-le-Monial. « Dès l'année 1179, dit M. le Curé, le pape Alexandre III ayant confirmé par une bulle, datée des Ides de, février (25 mars), la possession de l'église, de Claire-Fontaine, nous trouvons que l'église de Paray, Ecclesiam de Pireto, est tenue à un muid de vin envers l'abbaye ». Il est certain que Piretum est Paray. Puis, il ajoute : « Dans un ancien Pouillé, connu de l'évêché de Chartres et qui, selon Benjamin Guérard, lut rédigé vers le milieu du XIIIe siècle, on trouve des renseignements clairs et précis. Voici le passage qui a rapport à Paray : grand archidiaconé de Chartres, doyenné de Rochefort, Paray, Parcium, et en note, ces mots : seconde variante du nom de Paray. »

On le voit, il n'y a aucun rapport entre ces variantes Piretum[5]et Pareium de Seine-et-Oise, et Paredus et Paredum de l'Allier et de Saone-et-Loire. Notre conclusion tendrait à admettre que Paredus pourrait bien être le nom d'une propriété ou encore celui d'un propriétaire influent, dont ces deux contrées auraient emprunté le nom, comme cela se pratiquait couramment à l'époque gallo-romaine.

Les archéologues admettent que ces lettres ay viennent du latin us. Comme l'histoire de Paray n'est connue des historiens que depuis la fondation du monastère bénédictin, en 973, le nom de Paray n'est pas donné, tout d'abord au monastère fondé par le comte Lambert et saint Mayeul. Ils baptisent du nom de Vallée d'Or, Val d'Or, Orval, l'emplacement choisi par l'abbé de Cluny[6]. Survaux. super vallem, désignera le monticule qui domine le Val d'Or. Il est à croire qu'un premier monastère, construit peu de temps avant la mort de saint Mayeul, était situé entre Paray et Romay.

La charte de fondation dit que l'église fut bâtie sur le penchant de la colline, colliculum[7]. L'église, construite plus tard et consacrée en 1004, est en plaine et très près de la Bourbince. Il est encore dit, dans celle même charte, que les travaux commencèrent en 973 et qu'au bout de trois ans le monastère et l'église lurent achevés. On a lieu d'être surpris de la rapidité de construction d'un monastère, fondé pour vingt-cinq moines. Elle fut consacrée en grande pompe, cum magna gloria, sous le vocable du saint Sauveur, de la Vierge Marie et de saint Jean-Baptiste, en présence du fondateur et de sa famille, de trois évêques, d'une multitude, de clercs, moines et laïques.

Le comte Lambert dota princièrement le, monastère. Les seigneurs des environs l'imitèrent à l'envi. Le comte mourut loin des siens, le 22 février 988[8]. Il avait choisi l'église du monastère de Paray pour lieu de sa sépulture.

M. l'abbé, Ulysse Chevalier relate « que Hugues 1er fils du comte Lambert, fut sacré évêque d'Auxerre, le 5 mars 999. Peu de jours après (en mai), il unit le Cenobium, monastère de fondation encore récente, à l'abbaye de Cluny, qui avait alors à sa tête saint Odilon. Ce fut comme une nouvelle fondation ».

Nous pensons qu'à ce moment, les moines quittant le penchant de la colline, s'établirent définitivement dans le nouveau monastère, construit près de la Bourbince[9].

L'église conventuelle fut érigée en l'honneur du Seigneur Dieu, de la Bienheureuse Marie, de saint Gervais, et de saint Grat, évêque de Chalon, dont le corps avait été donné au monastère du Val d'Or par le fondateur, le comte Lambert. Il n'est plus question du saint Sauveur et de saint Jean-Baptiste, comme dans la consécration précédente. La date de cette dernière est du 9 décembre 1004.

Vers le milieu du XIe siècle, le monastère prend le nom de Paray et, peu après, celui de Val d'Or disparaît.

II

ÉTYMOLOGIE DU MOT ROMAY

Quelle que soit la véritable étymologie du nom de Romay, sa consonance exhale un parfum de Rome. Romay est un écho de la grande Rome. (M. l'abbé CUCHERAT).

Dans la plaquette Notre-Dame de Romay, publiée en 1897, nous disions : Il est difficile, pour ne pas dire impossible, d'assigner à ce nom de Romay une étymologie quelque peu acceptable. Cette persuasion ne nous a pas arrêté dans nos recherches pour pénétrer le secret de ce nom, comme nous l'avons fait pour le nom de Paray. Le fruit de notre travail depuis ce temps-là, le voici : M. l'abbé Cacherat pense que saint Mayeul, quatrième abbé de Cluny, aurait donné ce doux nom de Romay à l'emplacement des carrières découvertes pour les constructions du monastère dont il fut le fondateur spirituel. — Nous mettions en doute cette opinion sur l'origine de Romay, sous prétexte que le document sur lequel s'appuie l'auteur nous échappait. — Cependant le rapprochement suivant nous a frappé quelque peu. La fondation de notre monastère date, nous l'avons dit de 973, et c'est l'année précédente 972 que saint Mayeul, en revenant de Rome, fut arrêté par une bande de Sarrasins et retenu captif. En dépouillant notre Saint, ils lui laissèrent par mégarde le Petit Traité de l'Assomption de la Sainte Vierge, attribué à saint Jérôme. On était au 23 juillet. Le saint pria la Sainte Vierge d'obtenir de son divin Fils qu'il pût, avec ses compagnons de captivité, aller célébrer cette fête avec les chrétiens. Grâce à une rançon de mille livres pesant d'argent, fournie les Seigneurs et Frères de Cluny, Mayeul fut mis en liberté, avec tous ses compagnons de captivité. Il put célébrer la fête de l'Assomption parmi les chrétiens, ainsi qu'il l'avait demandé à Dieu[10] .

Cet événement fut-il pour quelque chose dans le choix du mystère de l'Assomption, vocable de l'église monacale et de l'oratoire, élevé non loin des carrières de Romay ? Rien ne l'indique dans les documents qui nous restent du monastère de Paray.

Romay vient du mot latin Romera[11]. Son orthographe a varié avec la suite des siècles. Il s'écrivit d'abord Romey, Romaye, quelquefois Romel ; on trouve aussi Romay en Val d'Or et présentement Romay. — Aucun pays ne s'appelle de ce nom, mais nous connaissons une famille du nom de Romay. — Aucun document, à notre connaissance, ne cite Romay avant le XIIIe siècle. Mgr Touchet, évêque d'Orléans, vint en pèlerinage à Paray en 1900, et prononça le panégyrique de la Bienheureuse Marguerite-Marie, le 17 octobre. Le lendemain, comme on parlait en sa présence de notre sanctuaire de Romay, le grand orateur fit soudain cette réflexion : Romay ! Ce mot signifie pèlerin, pèlerinage. J'ai lu il y a quelques jours seulement, que Jeanne d'Arc parlant pour Chinon, pour délivrer la ville d'Orléans, occupée par les Anglais, envoya son confesseur, sa mère et ses deux frères, afin d'implorer la protection de la Sainte Vierge pour la France, à Notre-Dame du Puy où, à l'occasion du Jubilé de 1429, l'Église Romaine avait ouvert le trésor des Indulgences en faveur des pèlerins du Puy.

C'est à partir de ce moment qu'on appela Elisabeth Romet la mère de Jeanne d'Arc. Monseigneur voulut faire le pèlerinage de Romay le surlendemain matin, à la suite des pèlerins de son diocèse, et en présence de la photographie de la Vierge de Romay, Sa Grandeur déclara qu'il n'était pas possible de la classer au-delà du XIIe siècle. Deux prêtres du diocèse d'Autun, nos amis[12] après avoir lu notre étude sur Notre-Dame de Romay, nous adressèrent leurs observations sur l'étymologie de Romay, en démontrant que Romay pourrait bien rappeler la Ville Eternelle, comme l'a écrit M. Cucherat.

Nous avons résumé les deux lettres de nos confrères dans la livraison du Pèlerin de Paray, le 1er février 1898, en ces termes : Les pèlerins qui vont à Rome sont appelés Romèens, en italien Romey. Dans la même langue, le mot Romeo signifie pèlerin et pas autre chose. Mais bientôt il s'est généralisé et on l'appliqua indistinctement à toute personne qui avait visité un des grands sanctuaires de la chrétienté. De la langue italienne, le mot est passé dans les langues espagnole et portugaise avec des modifications insignifiantes. En espagnol, le mot Romeria signifie pèlerinage de Rome. Romero, Romera se traduisent par pèlerin, pèlerine ; mais ce terme signifie pèlerin tout court ; rien d'étrange que l'italien ait pénétré jusqu'à nous, puisque la langue de Rome a toujours tracé partout.

Dans notre Brionnais, on retrouve encore des traces de ce mot Rome, appliqué aux pèlerins en général.

A environ 25 kilomètres de Romay, sur le territoire de la paroisse d'Oyé, canton de Semur-en-Brionnais, il existe un sanctuaire qui a nom Notre-Dame de Sancenay[13]. Comme Romay, Sancenay est un lieu de pèlerinage, fréquenté spécialement les jours de fête de la Sainte Vierge. La fêle de l'Assomption est le jour où le concours des pèlerins est le plus nom-breux. Nous avions appris de notre premier vicaire, M. l'abbé Girardon, natif de la paroisse d'Oyé, que dans le pays, de temps immémorial, on nomme romis et roumis les pèlerins qui viennent prier Notre-Dame de Sancenay. La chapelle, jadis seigneuriale, dépend maintenant de la paroisse d'Oyé. L'an dernier, nous avons visité en pèlerin Sancenay, et les habitants nous ont affirmé qu'ils avaient toujours appelé, ainsi que leurs ancêtres, les pèlerins de Sancenay les romis et roumis, sans s'expliquer pourquoi. De nos jours, où les pèlerinages à Rome ont repris, sous une autre forme, leur antique usage, on donne le nom de Romains aux ouvriers qui ont fait le pèlerinage, de Rome[14].

Il n'y a pas longtemps, nous eûmes l'occasion de consulter,— par l'intermédiaire de sa propre soeur, — sur l'étymologie de Romay, M. Paris, de l'Académie française, très lié avec M. d'Arbois de Jubainville, auteur d'un savant ouvrage sur les étymologies des noms propres et des noms de lieux. Voici sa réponse :

« M. le Curé de Paray a raison de croire que romi, romiage signifient pèlerin, pèlerinage [15]. On a dit d'abord Romacus, Romeaginus, du pèlerin qui allait à Rome, du pèlerinage dirigé vers Rome, puis de tout pèlerin et de fout pèlerinage. Le nom Romeo n'est, à l'origine, pas autre chose, car le mot existait en italien, en français et en provençal (Romien, Roumien); mais il me paraît très douteux que le nom de lieu Romay en vienne. Il faudrait Romiay et encore ce ne serait pas probable. Ces noms de lieux en ay, ainsi que ceux en y remontent à l’époque gallo-romaine ou mérovingienne. Ils se sont formés, comme l'a montré notre ami d'Arbois de Jubainville, de noms d'anciens propriétaires de domaines avec la terminaison actun, qui en Gaulois indique l'appartenance. Ainsi Avenay est l'ancien domaine d'un Avennus, etc. Il est bien probable que Romay, Paray, sont formés de même sur le nom d'un Romus, Parus. Pour en être très sûr, il faudrait connaître les anciennes formes de ces noms. »

Les formes du nom Romay nous sont connues. Romaye, Romey sont deux noms qui se rapprochent de Romiay. A notre sentiment, l'oratoire bénédictin tira de ce fait son nom de Romay. Aussi bien, penchant toujours pour la signification Romay, lieu de pèlerinage, nous n'insisterons pas davantage pour rallier le lecteur à cette opinion, qui nous semble assez probable après cette étude. Nous avons cherché à l'éclairer, en respectant sa liberté, suivant l'adage : Dans les choses douteuses, liberté. In dubiis libertas...

 

 

[1] Plusieurs châteaux en France se nomment Paray.[2] M. l'abbé Clément, aumônier de religieuses à Moulins, a lu au Congrès de Fribourg un rapport très remarquable sur les Vierges, du diocèse de Moulins. Son exposition de Vierges antiques lui a valu une médaille d'or. [3] M. Cucherat a traduit Paray-le-Frésil par Paray-les-Frères, en s'appuyant sur le livre 48, n° 51, des Annales Bénédictines de Mabillon où il dit qu'il y a un autre lieu du même nom que notre Paray-le-Monial, non loin de Bourbon-Lancy, dit Paray-les-Frères pour le distinguer de l'autre qui prend le surnom de Frères ou bien de Moines. [4] Les chartes et dictionnaires latins portent aussi Paroedum, Pariacum. — Dans le recueil de Pérard, on lit Pararium, Pareriacum. — En 1271, on lit : Paredus Monialis, Paray-le-Monial. [5] Piretum vient du mot grec, qui signifie feu. Etymologie inapplicable à notre Paray-le-Monial. [6] Saint Mayeul était originaire de Valensole, nom qui signifie Vallée du Soleil. — Serait-ce le souvenir de sa terre natale qui aurait valu à la vallée de la Bourbince, en latin Borbincia, le nom de Val d'Or, à raison de la richesse de ses prairies ? [7] Le lieu appelé autrefois Orval, au bas de Survaux et dénommé présentement La Vigne serait vraisemblablement ce Colliculum.[8] Introduction au Cartulaire de Paray, par Ulysse Chevalier, p. XII. [9] Ce monastère se trouvait au nord de l'église, dans le jardin de M. de Chiseuil. Vers 1700, on commença les constructions du monastère actuel et on employa pour la charpente et la boiserie les beaux chênes de la superbe futaie, plantée près du cimetière au lieu appelé encore La Forêt de Paray. Le roi Louis XIV autorisa l'exploitation de cette forêt à la condition que le cardinal Emmanuel-Théodose de Bouillon, doyen de Paray, donnerait 40 arbres de 1re classe pour la marine française.[10] Histoire de saint Mayol, abbé de Cluny par l'abbé L.-J. Ogerdias, chanoine honoraire, curé de Souvigny, p. 79 et suivantes. [11] Carte du duché de Bourgogne, 1763, par MM. Camus et Montigny.[12] M. Trichard, aumônier du Prieuré de Charolles, chanoine honoraire, et M. l'abbé Clément, professeur d'histoire au Petit Séminaire d'Autun, décède depuis.[13] M. Cucherat, dans son Romay et Sancenay ; - Mâcon, imprimerie Protat, 1861, — consacre plusieurs pages à ce sanctuaire.[14] Lettre de M. Léon Harmel à un industriel. — Val-des-Bois, le 8 août 1898.[15] Au moment où nous transcrivons la lettre de M. Gaston Paris, nous recevons la nouvelle de sa mort à Cannes, le 5 mars 1903.

 

http://lieuxsacres.canalblog.com/archives/2012/07/31/24811011.html 1ère et seconde photos. 3ième et 4ième © Rhonan de Bar.
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Publié le par Rhonan de Bar
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Sainte Geneviève

(422/23-512)

Le fils de Mérovée, Childéric, servait alors dans les armées romaines comme auxiliaire ; les Franks et lui étaient pour les Romains des alliés indispensables, mais terribles, dont le naissant empire et la jeune puissance allaient bientôt peser dans la balance du monde bien plus lourdement que la gloire passée et le nom antique des Césars. Il arrivait souvent que, pendant ses expéditions, Childéric s'arrêtait à Paris ; on lui parla de Geneviève, et quoique païen, le roi des Franks témoignait un grand respect pour les vertus de la sainte. Un jour même, au moment où il allait faire exécuter une sentence de mort contre plusieurs condamnés, Geneviève se présenta inopinément à ses yeux, se jeta à ses pieds et lui demanda la grâce des coupables. Childéric ne put la lui refuser, et Geneviève rentra dans Paris, menant à sa suite les captifs qu'elle venait de délivrer. On ajoute que les portes de la ville s'étaient ouvertes miraculeusement devant ses pas, au moment où elle se disposait à aller implorer la clémence du roi , au nom d'un Dieu qu'il ne connaissait pas , mais qu'il révérait en voyant les vertus de ses serviteurs.

Clovis succéda à Childéric, et fidèle aux desseins des chefs barbares, ses ancêtres, il voulut étendre ses possessions du côté de la Seine. Il s'empara de Soissons, et de là se porta vers Paris, qu'occupaient encore les troupes romaines. La ville était alors renfermée toute entière dans l'île de la Cité et défendue par des murailles et des tours. Clovis désespéra de la prendre d'assaut, mais il la bloqua étroitement, l'enveloppant comme dans un réseau d'ennemis. Bientôt les vivres devinrent rares, la famine se fit sentir : des femmes pâles et languissantes, des guerrier» fléchissant sous le poids des armes, des enfants expirant sur le sein tari de leurs mères remplissaient les rues et les places publiques de la ville. Geneviève, qui, durant les calamités, ne quittait presque pas le pied des autels, sentit à la vue des malheurs de ses concitoyens, s'animer ce pieu* courage, celle énergie patriotique et sainte dont le Ciel avait allumé la flamme sacrée en son âme. Une seule ressource restait à la ville assiégée: elle possédait quelques nefs qui, dirigées par des hommes intrépides, pouvaient rapporter des vivres aux habitants de Paris et les sauver ou de l'agonie de la faim, ou des fureurs du roi barbare. Mais qui osera entreprendre ce périlleux voyage? Geneviève se présente, et ses paroles portent l'espérance dans tous les cœurs. Elle s'embarque, menant avec elle quelques personnes dévouées, parmi lesquelles l'histoire cite un prêtre nommé Bessus ; onze barques suivent la sienne, et cette petite flottille remonte la Seine jusqu'à la ville d'Arcis. Là, on fit d'amples provisions. Voulant les augmenter encore, Geneviève alla jusqu'à Troyes, où elle reçut également d'abondants secours pour son peuple affligé. Mais la vierge, à son tour, répandit autour d'elle, en ce saint voyage, les grâces dont le Seigneur l'avait rendue dépositaire ; elle guérit les malades et les aveugles par la vertu de ses prières et du signe de la Croix ; ce fut comme un échange, où les peuples donnaient leurs biens aux amis, aux compatriotes souffrants de Geneviève, et où Geneviève répandait sur les peuples les dons surnaturels dont elle était enrichie. Pleine de joie, elle reprit sa route vers Paris; sur le point d'y rentrer, la tempête assaillit la petite flotte, et lui fit courir le plus grand danger. Les passagers se croyaient au moment de périr, quand Geneviève se mit en prières, forte de sa confiance et de sa foi.... Une heure après, les barques chargées de blé entraient dans Paris, pendant que les prêtres elle peuple chantaient le cantique de l'Exode : Le Seigneur est ma force et ma louange; il a été mon salut.

Geneviève s'occupa aussitôt à distribuer les vivres qu'elle avait apportés. Aux uns elle donnait du blé, aux plus pauvres et aux plus affamés du pain, et elle éprouvait une telle angoisse de cœur en entendant quelqu'un se plaindre de la faim, qu'elle allait chercher au four les pains que ses compagnes avaient fait cuire pour l'usage de leur maison. Les vierges s'inquiétaient alors, mais la joie et la confiance renaissaient en leur âme, quand elles entendaient les pauvres vanter la charité de Geneviève et montrer les pains frais qu'elle venait de leur donner. Lorsqu'elle distribuait ses dons, Geneviève semblait rayonnante de joie; ses yeux se remplissaient de douces larmes, et l'on voyait que cette âme céleste, après avoir renoncé à tout, goûtait encore une félicité secrète dans le bonheur des autres.

Le blocus de la ville durait depuis quatre ans, lorsque Clovis reçut la nouvelle d'une invasion, faite par les Tongriens ou Tongres, sur le territoire des Franks-Saliens. Ces Tongres, qui sont maintenant les habitants du pays de Liège, étaient chrétiens, et par conséquent amis dos habitants de Paris; ils mutaient, par leur brusque entreprise, faire diversion et forcer le roi des Franks à lever le siège. Clovis les attaqua avec sa vigueur ordinaire, les battit en plusieurs rencontres, s'empara de la ville de Tongres (an 191), joignit ce nouvel état à ses conquêtes, et revint vers Paris, qu'il continua à resserrer étroitement. Mais Paris, la ville des Denis et des Eleuthère, Paris, depuis si longtemps chrétienne, ne voulait pas reconnaître un maître païen, et en voyant les qualités de Clovis, ses vertus militaires, la générosité qui éclatait souvent en ses actions, toute l'Eglise des Gaules formait des vœux afin que le fier Sicambre courbât la tête sous le joug de Jésus-Christ. Geneviève priait avec ardeur, affligée par les maux de ses concitoyens, par ceux de la sainte Eglise, que désolait alors l'hérésie d'Arius, les irruptions des barbares, et les guerres sanglantes des peuples chrétiens.

Bientôt une circonstance favorable vint présenter aux Chrétiens quelques lueurs d'espoir. Le jeune roi frank n'était pas marié; on apprit tout-à-coup dans les villes et les bourgades, et dans le sein même de la ville assiégée, qu'il avait fait porter son anneau à la princesse Clotilde, fille de Çhilpéric roi de Bourgogne. Captive dans la maison de son oncle, de Gondebaud, le meurtrier de sa famille, Clotilde avait conservé, au milieu d'une cour tout arienne, les principes de la foi catholique, et, guidée par l'esprit de Dieu, elle avait donné au roi païen sa foi de fiancée, se souvenant que la femme fidèle sanctifie l'époux infidèle, et se sentant appelée sans doute à une haute et magnifique mission. Elle avait été reçue à Soissons avec une pompe, royale; Clovis l'avait épousée par le sol et le denier, lui assignant, en témoignage d'amour, un riche apanage. Dès ce moment, la jeune reine acquit un grand ascendant sur l'esprit de son époux; elle obtint môme la permission de faire baptiser ses premiers nés; néanmoins, pendant plusieurs années, son pouvoir n'alla pas plus loin. Clovis ne voulait pas abandonner le culte de ses ancêtres; mais la prière de deux saintes se liguait contre lui. Clotilde priait comme épouse et comme mère; Geneviève priait au nom de toute l'Eglise de Dieu, et leurs prières furent exaucées.

Les Allemands, de concert avec les Suèves, les Doyens et d'autres petits peuples, se jetèrent sur les états de Clovis, et commencèrent à les ravager. Clovis se joignit à Sigebert, son parent, chef ou roi des Franks Ripuaires, réunit quelques légions romaines et marcha contre les alliés Allemands, qui formaient une armée de plus de cent mille hommes. Il les rencontra à Tolbiac (an 496) aujourd'hui Tulpich, dans le duché de Juliers. Le combat s'engagea et se soutint avec force de part et d'autre. Cependant les troupes de Clovis plient; Gaulois, Romains, Franks eux-mêmes semblent reculer devant la farouche armée des Allemands... Un moment encore, et Clovis va perdre le fruit de tant de conquêtes... Un moment encore, et l'avenir si brillant, ouvert devant sa race, va se fermer pour jamais... Clovis hésite; mais Clotilde et Geneviève prient pour lui; il lève les mains au ciel :

«Dieu de Clotilde, s'écrie-t-il, donne-moi la victoire, et je me ferai chrétien ! »

Le Dieu de Clotilde l'a entendu; Clovis fut victorieux, et le royaume de France fut fondé.

Geneviève allait recueillir le fruit de ses travaux, car tous les historiens l'ont pensé: les larmes et les prières de la pieuse vierge n'avaient pas moins contribué à la conversion du roi que les exhortations de Clotilde. On apprit par toutes les Gaules que Clovis se faisait instruire des vérités du christianisme par l'évoque de Reims, saint Remy. Le moment du baptême arriva, et la nuit de Noël de l'an 496 vit cette auguste cérémonie. Remy tenait par la main, comme un fils bienaimé, le jeune roi barbare, nouvelle conquête du Christ; il le conduisit vers l'église dédiée à Saint-Martin , et qui, entre tous les sanctuaires de la ville de Reims, avait été choisie à cause de la dévotion des Gaules au saint évêque de Tours Cette église était ornée avec une étonnante splendeur; une profusion de lampes et de candélabres ressuscitaient la lumière du jour; des guirlandes couraient en festons sur les murs et formaient, sous les voûtes de pierre, des voûtes fleuries et embaumées; des miroirs d'argent éclataient au milieu des tentures de pourpre, et Clovis fut si frappé à la vue de ces magnificences, qu'il demanda au saint évêque: « Père, est-ce là le royaume du ciel que tu m'as promis?

« — Non, mon fils, répondit Remy ; c'est seulement le chemin qui y conduit. »

L'eau sainte coula sur le front du Sicambre, qui se releva chrétien et roi de France. Clotilde assistait à cette fête du ciel; elle vit son époux régénéré dans l'eau du salut, et avec lui, trois mille guerriers, l'élite des tribus franques ; elle vit, dans les jours qui succédèrent à ce beau jour, les nobles actions qu'inspirait à Clovis sa foi nouvelle: ses largesses aux pauvres, sa clémence envers les captifs, son dévouement à l'Eglise, et surtout son zèle pour la doctrine de Jésus-Christ. Elle l'entendit, au récit de la Passion du Sauveur, prononcer cette parole, où semblent se confondre l'ignorant barbare et l'ardent chrétien:

« Que n'étais-je là avec mes Franks ! »

Elle eut encore un autre sujet de joie: la ville de Paris, qui, soutenue par les exhortations de Geneviève, préférait s'ensevelir sous ses propres ruines que de se rendre à un prince païen, ouvrit ses portes à Clovis, et reconnut pour maître celui qui venait de confesser Jésus-Christ. Clovis et Clotilde entrèrent solennellement dans Paris et prirent possession de la ville où, durant quatorze siècles, leur postérité devait régner.

Photos Sainte Geneviève. Source Net.
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