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L'Avènement du Grand Monarque

L'Avènement du Grand Monarque

Révéler la Mission divine et royale de la France à travers les textes anciens.

Publié le par Rhonan de Bar
Publié dans : #EN FAVEUR DE LA MONARCHIE

 

DE


LA MONARCHIE 

 

FRANCAISE

 

DEPUIS SON ETABLISSEMENT

 JUSQU'A NOS JOURS

 

OU

 

RECHERCHES

 

SUR LES ANCIENNES INSTITUTIONS FRANCAISES,

 LEUR PROGRES, LEUR DECADENCE,

 ET SUR LES CAUSES QUI ONT AMENE LA REVOLUTION

ET SES DIVERSES PHASES JUSQU'A LA DECLARATION D’EMPIRE

 

AVEC

 

UN SUPPLEMENT

 

SUR LE GOUVERNEMENT DE BUONAPARTE

DEPUIS SON COMMENCENS JUSQU'A SA CHUTE

 

ET SUR LE RETOUR DE LA MAISON DE BOURBON

 

PAR M.LE COMTE DE MONTLOSIER

DEPUTE DE LA NOBLESSE D’AUVERGNE AUX ETATS-GENERAUX.

 


 

VOLUME PREMIER.  1er EXTRAIT.


LIVRE PREMIER. SECTION PREMIERE.

 

 

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AVERTISSEMENT.


Il m'est indispensable de faire connaître l'époque à laquelle cet ouvrage a été composé, ainsi que les circonstances qui ont déterminé sa composition.

 

Attaché au Ministère des Relations Extérieures, je reçus du ministre de ce département, quelques mois avant la déclaration d'empire, l'ordre du Premier Consul de travailler à un ouvrage dans lequel je rendrais compte : « 1° de l'ancien état de la France « et de ses institutions ; 2° de la manière dont la révolution était sortie de cet état de choses ; 3° des « tentatives faites pour la renverser ; 4° des succès « obtenus par le Premier Consul à cet égard ;et de « ses diverses restaurations. » Cet ouvrage devait être prêt et publié à l'époque prochaine de la déclaration d'empire. Quelque grande que fût cette tâche, sous beaucoup de rapports, j'y étais préparé. Dès ma première jeunesse, je me suis occupé de l'état de nos anciennes institutions : j'avais ainsi sur cette matière de grands travaux accumulés. En ce qui concerne la révolution, je n'avais de même qu'à rappeler à ma pensée ce que j'avais publié précédemment, soit comme membre de l'Assemblée Nationale, soit pendant le cours de mon émigration.

 

Avec toutes ces ressources, si je n'ai pu remettre, avant quatre ans, un ouvrage qui devait paraître dans quatre mois, ce n'est pas seulement, comme on l'a cru, par le dégoût d'attacher mon nom à un événement que je devais sans doute subir, mais que je n'avais probablement aucun penchant à consacrer ;c'est surtout à cause de la difficulté particulière attachée à un pareil travail. Cette difficulté consistait dans le dégoût de composer, comme destiné à la publicité, un travail que je ne pouvais faire que selon ma pensée, et que, par là même, je savais d'avance condamné à l'oubli et à l'obscurité.

 

En remplissant selon ma conscience la tâche qui m'était proposée, ma volonté sans doute a été de rendre des hommages à l'homme qui avait vaincu la révolution, et qui s'était mis ensuite à dessiner, dans des directions différentes, les commencemens d'un ordre social : je n'ai pas attendu, sur ce point, l'année 1804; mes sentimens à cet égard ont été prononcés en Angleterre dans plusieurs articles de mon Courrier de Londres. Cependant cette part une fois faite, cette dette acquittée, on sent que je ne pouvais aller au-delà.

 

En relisant les épreuves dans le cours de l'impression, j'ai cru reconnaître sur certains points des inexactitudes de touche qui me sont échappées. Je les ai accompagnées de notes ; je n'ai pas voulu les effacer. Mon intention a été de livrer au puhlic cet ouvrage, tel que je l'ai composé pour Napoléon.

 

Si jamais je puis croire que le reste de mes travaux soit, ou de quelque utilité, ou de quelque intérêt, qu'on soit sûr que je mettrai et la même fidélité et le même empressement à les publier ; le lecteur en verra du moins un extrait dans le tableau du règne de Napoléon, qui forme ma cinquième partie. Les temps de la révolution ont été bien divers, bien difficiles, bien embarrassés ; il n'en est aucun où je ne sois heureux de pouvoir faire connaître au public et ma conduite et ma pensée.

 

  PREMIÈRE PARTIE.

LIVRE PREMIER.


J’ai à décrire l'état de la France sous nos deux premières races. J'ai à faire connaître nos premières lois, nos premières institutions, nos premières mœurs. On trouvera que j'ai entrepris une grande tâche. Comment croire qu'il soit possible d'énoncer quelque chose de juste sur nos temps antiques, lorsque les hommes, qui ont le plus soigneusement recherché ces matières n'ont pu les éclaircir? Je ne me laisserai point intimider par cette difficulté. Nos premières institutions se rattachant à celles des âges subséquens, celles-ci à tout ce que nous avons vu établi dans ces derniers temps, cette longue série forme un enchaînement qu'il faut absolument apercevoir dans ses principes, pour l'apprécier ensuite dans ses résultats. On connaît les points qui ont divisé nos meilleurs écrivains. On connaît aussi ceux surlesquels ils se sont généralement réunis. Je me garderai bien de prendre un parti dans ces débats : car ils me paraissent mal engagés. Les études en ce genre ont été si mal faites, que souvent le véritable état de la question n'est pas même établi. J'affirmerai que tous ces prétendus envahissemens des seigneurs dont il est si souvent question dans les ouvrages modernes n'ont aucune réalité ; que les justices seigneuriales qu'on croit avoir été envahies sur le déclin de la seconde race, sont plus anciennes que la monarchie ; j'en dirai autant des censives, de la servitude, de la glèbe, et des guerres particulières ; enfin j'espère montrer que tout ce qui a été écrit jusqu'à présent sur les causes et l'origine du gouvernement féodal, est un amas de rêves, de futilités et de faussetés.

Je ne me dissimule point ce que doit m'attirer de défaveur un dissentiment aussi prononcé. Celui qui ne cherche que la vérité n'a pas besoin de faveur. Je traiterai d'abord de l'établissement des Francs. Je dirai comment s'est formé le rapprochement, et ensuite le mélange des divers peuples qui sont entrés dans les Gaules, et je décrirai le nouvel ordre social qui en est résulté. 

Je traiterai en second lieu de l'autorité royale, ainsi que de la succession au trône ; enfin je rendrai compte des causes qui ont amené la chute de nos deux premières races, et élevé la maison capétienne sur le trône.

Mon intention est de diriger d'abord ma marche comme les événemens, sans l'embarrasser ou l'arrêter par les discussions. Toutefois les points de controverse ne seront pas négligés. Arrivé au chef de la troisième race, je reviendrai un moment sur mes pas pour traiter toutes les grandes questions que ces temps anciens ont fait élever.

 

SECTION PREMIERE.

 

Un groupe de petits états plus ou moins liés  par les mêmes mœurs et par les mêmes intérêts : telle a été la forme primitive de toutes les grandes nations occidentales. Quelques domaines sous la protection des villes formaient ces états. Les gaules furent, à cet égard, constituées comme la Grèce ; l’Italie, comme les Gaules. Les Germains n’offrent d’exception qu’en un seul point : le territoire, chez eux, formait la cité ; ils ne connaissaient point la propriété, les terres. Ils n’avaient ni châteaux, ni villes, ni villages. 

Poussés par l’inquiétude de leurs dissensions intérieures, les Romains durent la conquête du monde aux arts de la guerre, et à cette espèce d’orgueil qu’ils appelèrent amour de la gloire. Animés par l’espoir du butin et par un profond mépris pour les autres nations, le courage brut et sauvage des Gaulois ravagea le monde. Les Germains défendus par leurs mœurs encore plus que par leurs forêts, résistèrent d’abord aux Romains qui avaient conquis les Gaules; ils ressuscitèrent  ensuite les Gaules et  soumirent le peuple romain.

Si on ne veut les considérer que relativement au fracas qu'elles ont fait dans l'histoire du monde ; chacune des ces nations a sa portion de gloire. On peut dire toutefois que les Gaulois, en ont plus que les Germains, les Romains plus que les Gaulois. Relativement aux mœurs et à l'énergie des institutions,  c'est l'inverse. Les Gaulois ont beaucoup de grandeur en ce genre que les Romains, les Germains que les Gaulois.

Ce n’est point du fracas des dévastations et des conquêtes que j’ai à occuper ici le lecteur : je dois ajouter que ce n’est pas non plus de tout ce vain bruit que font les lettres et les arts. En portant mes regards vers le berceau de la nation française, j’ai le bonheur de le voir entouré de beaux sentiemens plus que de belles lettres et de vertus encore plus que de gloire.

Les mœurs de trois grands peuples, voilà où j’ai principalement à tourner mon attention ; j’ai  à montrer comment ces peuples, étant venue se rapprocher,  leurs mœurs se sont rapprochés également, de cet amalgame on a vu se produire, avec l'apparence de quelques formes nouvelles, un peuple gouverné en réalité par des mœurs et des institutions antiques.

C’est ce qui distingue dès son commencens le peuple français des autres peuples du monde. Les autres nations ne sont dans leur origine qu’un germe qui s’accroît peu à peu, se fortifie et s’étend. La France, au contraire, en se présentant au milieu des autres nations avec l’apparence d’un pays et d’un peuple nouveau, se trouve en réalité, dès son berceau même, composée avec toute l’énergie d’un peuple mûr.

Cette circonstance qui rend raison de l’éclat immense du peuple français dès le premier moment qu’il paraît sur la scène du monde, rend également raison de quelques obscurités qui se trouvent répandues sur ces commencens. Dans ces obscurités, toutefois, il est essentiel de distinguer celles qui proviennent de la nature des temps, et celles que notre fausse science a faites. Des nuances appartenant à trois sources différentes peuvent offrir des contradictions et des vissicitudes : les obscurités de ce genre sont susceptibles de s’éclaircir. Il n’en est pas de même de celles que notre fausse science a composées.

Qui n’a pas lu dans nos livres les nombreuses recherches sur l’institution de la féodalité, sur celles des seigneuries, sur l’usage des guerres particulières, sur le droit de censive et celui de justice, sur l’origine de la pairie, de la noblesse et des anoblissemens, sur l’ancienne distinction des terres, des personnes et des rangs ? Chacun a assigné à cet égard des époques à sa manière. Celui-ci a vu dans nos institutions un résultat de guerre et de conquête : il a désigné pour époque l’envahissement des barbares ; celui-là a vu de préférence les effets de la tyrannie, ou des usurpations d’une caste : il a désigné l’état d’affaiblissement de l’autorité royale. Une autre se prévalant de ces contrariétés pour s’abandonner au pyrrhonisme, a vu dans les routes diverses un prétexte pour n’en tenir aucune. On l’a entendu citer, comme essentiellement propres à ces matières, les ténèbres que nos écrivains avaient créées...

Je ne sais si je parviendrai à éviter, comme il convient, tous ces écueils. Je me garderai au moins d’en assigner une origine aux grandes institutions de la France ; persuadé, comme je le suis, que cette origine appartient à l’origine même des trois grandes nations dont elle s’est formée.

Et d’abord, comme les Germains n’avaient ni domaine, ni village, ni ville, ce ne sera point chez eux que j’irai chercher celle de nos institutions qui sont relatives, soit à l’administration des cités, soit au gouvernement des domaines, soit, en général, à tout ce qui peut concerner la propriété des terres. D’un autre côté, les mœurs gauloises ayant été courbées pendant près de quatre siècles sous le fer des Romains, ce ne sera point dans les mœurs dégradées et avilies des Gaulois, non plus que dans les mauvaises mœurs et les mauvaises lois de Rome, que j’irai chercher ce lustre de grandeur, d’honneur et de générosité, qui, dès ses premiers âges, caractérise la France. L’objet de mes recherches peut se réduire à ce peu de mots. Comment les mœurs germaines sont-elles parvenues à s’associer à ce qui restait encore des mœurs gauloises ? Quel a été le mouvement de ces mœurs germaines tout énergiques, au milieu de ces mœurs gauloises tout avilies ? Mon but étant bien connu, je vais rechercher, 1° l’ordre social des Gaules avant la domination des Romains ; 2° l’ordre social des Gaules sous la domination des Romains.

Un premier point remarquable dans la Gaule antique, c’est la distinction des terres. Lorsque les Romains entrèrent dans les Gaules, les terres (choses singulières) avaient des conditions et des rangs. Soit qu’une partie des propriétaires eussent été amenés à livrer de gré à grè un tribut sur leur possession, à l’effet de s’assurer la protection de personnages considérables ; soit que les besoins de Etat eussent déterminés depuis longtemps un ordre régulier de rétributions, les propriétaires des Gaules présentent, dès la plus haute antiquité, deux ordres différens. Ici c’est la terre tributaire, assujettie, ainsi que le porte sa dénomination même, à un ordre régulier de tributs, qu’on a depuis appelé cens, là c’est la terre libre et indépendante appartenante en toute franchise à son maître,  et plus connue particulièrement par la suite sous le nom d’alleu.  Une double condition des personnes correspondant à cette double condition des terres. Le possesseur d’une terre libre est classé parmi les ingénus : c’est une espèce d’ordre de noblesse. D’un autre côté, le possesseur d’une terre assujettie au tribut est classé parmi les hommes tributaires : ce sont les roturiers de ce temps là. Au-delà de ces deux classes ; si l’on veut apercevoir aux deux extrémités, savoir, en haut les membres des sénats des villes en qui résidait la principale part de la souveraineté publique, et en bas les esclaves proprement dits, qu’on vendait, qu’on achetait, et qui n’avaient ni propriété, ni existence civile, on aura un aperçu complet de toute le population des Gaule.

Les justices seigneuriales, dont l’origine a donné lieu à tant de déclamations, appartiennent au même temps. On les trouve établies dans les Gaules avant l’arrivée des Romains, à peu près comme on les a vues dans ces derniers temps. César nous apprend que c’étaient les principaux personnages, qui dans chaque canton rendaient la justice à leurs subordonnés. Il en est de même des guerres particulières, du droit d’entretenir les corps armés. César nous apprend que chaque personnage, selon qu’il était plus considérable par son rang et ses richesses, s’entourait d’un plus ou moins grand nombre d’hommes armés, qui lui étaient dévoués et qui composaient sa garde. D’un autre côté chaque ville était indépendante d ‘une autre ville, et qu’elles avaient chacune leur milice particulière, on les voit négocier entr’elles des traités, et faire, ainsi qu’il leur convient, la paix ou la guerre

Tel était, sous ce rapport, l’état antique et immémorial des Gaules. Je passe à la domination des Romains. Cette domination ne changea dans aucun des points l’ordre établi. Il est à remarquer que, tout conquérans qu’ils étaient, les Romains évitèrent de s’en arroger le titre ; la Gaule ne fut point regardée dans le principe comme une conquête, mais seulement comme un pays confédéré. Dans la suite des temps, il n’est jamais question que des anciens traités, prisca foedera. Les Gaulois ne sont point appelés les sujets de Rome, mais seulement ses alliés ; socii. Les villes des Gaules se conservent ainsi avec leur sénat, leur milice, leurs lois municipales ; il n’y a de nouveaux que le corps de troupes romaines stationnés ça et là avec leurs commandemens militaires. Il faut ajouter, sous le nom d’indiction et de superindiction, le tribut qu’il fallu payer au vainqueur.

Non seulement les Romains ne prirent point d’ombrage de tout cet ancien régime des Gaules ; ils mirent même du zèle à le protéger. Ils tolérèrent les anciennes diètes générales ; ils allèrent quelquefois jusqu’à les convoquer.

L’ancienne hiérarchie des rangs et l’ancienne distinction des terres ne reçurent pas plus d’altération : on continua à distinguer dans les Gaules des terres libres et terres asservies ; des hommes ingénus et des hommes tributaires. Les justices seigneuriales se conservèrent de même. De grands jurisconsultes ont cru que Justinien, dans ses Novelles, avait consacré le droit de justice comme inhérent à la seigneurie. Les preuves qu’ils en rapportent ne me paraissent pas décisives ; mais j’ai lieu de croire que rien ne fut changé sur ce point dans l’ancien état des Gaules. 

Relativement aux guerres particulières, l’ancien ordre social ne fut pas changé : les cités des Gaules continuèrent à se battre les unes contre les autres, quand cela leur convint ; les Romains ne s’en embarrassèrent en aucune manière. L’établissement des Francs et des autres nations germaines : voilà où commencent les grandes difficultés.

Mais d’abord nous devons observer que les Francs suivirent presqu’en tout l’exemple des Romains. C’est un point qui a été très-bien éclairci par l’abbé Dubos.

Clovis continua à gouverner les Gaules selon les lois gauloises : il conserva le régime particulier des campagnes qui étaient distribués en seigneurs et en colons, il conserva de même le régime particulier des cités, leur sénat, leurs curies, leur milice. Ni le droit, ni le titre de conquérant ne se montrèrent. Celui qui fut roi des Francs ne fut pour les Gaules qu’un Patrice, ou un consul romain. Ce prince accepta avec beaucoup d’empressement ces deux titres, qui lui furent déférés par l’empereur Anastase : il parait qu’il y attacha plus de prix qu’à son titre de roi.

On ne peut douter de ces égards des Francs pour les Gaulois. Après la destitution de Childérich, la couronne fut donnée non à un Franc mais à un Gaulois. Un Gaulois est fait duc de Melun sous Clovis ; ce Gaulois est en même temps premier ministre de ce prince et son ambassadeur. Enfin les Gaulois sont appelés à toutes les charges du royaume ; on en trouve dans la loi salique faisant partie de la cour du monarque, et désignés sous le nom de convives du roi.

Le même respect est porté aux institutions ; et d’bord c’est la même hiérarchie des propriétés. La loi salique fait mention d’un ordre des terres assujetties au tribut, et appelées pour cette raison tributaires ; elle fait mention aussi d’un ordre des terres franches et allodiales, et appelées pour cette raison alleu. On y trouve le même ordre correspondant de personnes : le Gaulois possesseur, c'est-à-dire celui qui possède ses terres en propre, et le Gaulois tributaire, c'est-à-dire celui qui possède ses terres à la condition du tribut.

Les justices seigneuriales ne reçoivent pas plus d’altération ; il est fait mention de ces justices dans la loi des ripuaires ; elles sont rappelées expressément au concile de Paris, en 615. Il en est de même des guerres particulières. On voit sous la domination des rois mérovingiens, ainsi que sous celle des Romains, diverses cités gauloises se déclarer la guerre. On voit dans les Formules de Marcoule, de la même manière que dans les Commentaires de César, les grands seigneurs se faire accompagner d’une escorte guerrière. Il semble, d’après ce qui vient d’être dit, que les Francs conservèrent en s’établissant tout l’ancien régime des Gaules ; et néanmoins nous allons voir peu à peu ce régime se modifier en plusieurs points et s’altérer.

Il ne faut pas oublier qu’en arrivant dans les Gaules, les Francs y portèrent des lois, des mœurs, un langage même qui leur était propre : or ; tout en respectant l’ancien régime des Gaules, comme ils ne voulurent point abandonner le leur, il dut y avoir, pendant quelque temps, à plusieurs égards, comme deux régimes divers : l’un tenant à l’ancienne constitution des Gaules ; l’autre appartenant à la nouvelle nation qui s’était établie. Ces deux régimes mis en présence l’un de l’autre durent s’embarrasser quelquefois : peu à peu ils se mêlèrent ; ils finirent par se confondre.

C’est ce que nous attestent nos anciens monumens. Ils nous présentent trois âges distincts. Le premier, celui où les divers peuples sont en présence les uns des autres, et demeurent séparés ; le second, celui où les divers peuples commencent à se fondre ensemble et à s’amalgamer ; le troisième, celui où on voit de cette fusion même de cet amalgame se produire un nouvel état social

Lorsque Clovis, après s’être défait de ses compagnons d’armes, qui avaient voulu être ses rivaux, eut soumis successivement  les Armoriques et les Francs ripuaires, les Bourguignons et les Visigoths, comme les lois et les institutions de chacun de ces peuples leur furent religieusement conservées, les Gaules eurent beau se trouver réunies sous le même gouvernement, elles présentèrent moins une nation, qu’un agrégat de nations.

Cet état n’est susceptible d’aucun doute. Dans les anciennes chartres, les ordres sont adressés aux Francs, aux Bourguignons, aux Romains. On ajoutait : et à toutes les autres nations qui sont établies dans les Gaules. Je dois remarquer que ce langage s’est conservé dans les âges suivans. Jusque dans ces derniers temps, les rois dans leurs adresses, soit au parlement, soit aux autres grandes corporations, continuaient à employer l’expression nostras gentes ; nos gens.

On conçoit tout ce qu’a du produire de confusion le rapprochement habituel de plusieurs nations diverses, de mœurs diverses. Je citerai quelques exemples de cette confusion.

J’ai fait remarquer, comme existant de toute antiquité ; deux espèces de terres, l’une assujettie au tribut, et appelée tributaire, l’autre allodiale, et appelée alleu ; j’ai fait remarquer de même deux ordres de possesseurs correspondans, les uns ingénus, les autres aussi libres à plusieurs égards, mais assujettis cependant à des devoirs et à des tributs. Dès que les Francs sont arrivés, la première chose à observer, c’est que tout l’ordre social se compte à double : on a d’un côté le Gaulois libre, sous le nom d’ingénu ; d’un autre côté le vainqueur, sous le nom de Franc ou d’homme salique.

L’ordre des terres libres se compte de même à double, on a d’un côté l’alleu ou la terre libre, possédée par le Gaulois ingénu, d’un autre côté la terre originaire de la conquête, appelée la terre salique.

Les lois des deux peuples ne sont, par la même raison ; ni tout à fait communes, ni tout à fait égales. Le Franc vainqueur veut avoir dans les délits une composition double, de celle du Gaulois ingénu. D’un autre côté, comme selon l’antique loi des Germains, les femmes ne succèdent pas, et que, selon les lois gauloises, les femmes succèdent, il se trouve que tandis que les femmes sont admises à la succession des propriétés libres gauloises, appelées alleu, elles sont excluses de la succession des propriétés libres, appelées terres saliques.

 

 

A suivre....

 

 

 

 


 

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