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L'Avènement du Grand Monarque

L'Avènement du Grand Monarque

Révéler la Mission divine et royale de la France à travers les textes anciens.

Publié le par Rhonan de Bar
Publié dans : #ETUDES HISTORIQUES SUR LIEUX SAINTS

NOTRE DAME DE REIMS.

 reims

 

CHAPITRE II. TROISIÈME EXTRAIT.

 

Cathédrale du XIIIe siècle.

 

Son portail.

 plan caté

Parlons maintenant des bas-reliefs placés sur les frontons et les arcades pleines qui terminent la façade de chaque côté. Des piliers de pierres massives en remplissent la partie inférieure et montent à peu prés aussi haut que les grandes statues du portail. Au-dessus s'élèvent des surfaces ayant la forme ogivale, dont le haut s'encadre dans un fronton triangulaire.

Sur la façade sise à gauche, dans la partie inférieure, sont trois figures assez grandes. Celle du milieu tient un livre sous le bras ; elle est placée entre deux démons : l'un semble disputer avec elle; l'autre lui tourne le dos. Ne peut-on pas voir dans ce bas-relief la lutte du christianisme contre les passions humaines ?

Au-dessus sont trois sculptures. Au bas, on voit l'impératrice Hélène demandera saint Macaire, évoque de Jérusalem, en quelle place le Christ fut crucifié. L'évêque écoute prosterné la question qui lui est faite. Plus loin, on est sur le Calvaire; le prélat indique le lieu du divin martyre; les ouvriers travaillent, et la pioche met à jour la croix qui porta le Christ.

La sculpture qui surmonte ces trois sujets représente les trois croix, la fameuse inscription I. N. R. I. et les instruments du supplice. Un personnage tient une des croix debout ; un autre soulève la seconde; un troisième dégage du sol la dernière. Saint Macaire et l'impératrice sont, en prières. Il s'agit de distinguer quelle est la croix du Christ. On les fait toucher à une dame malade ; elle est guérie par la vertu de la troisième.

Au-dessus, des séraphins entourés de fleurs et de palmes soutiennent le signe de la Rédemption. Enfin au sommet du fronton est une figure de femme à genoux devant un crucifix: l'Eglise romaine institue la fête de l'Exaltation de la sainte Croix.

Cette partie de l'édifice fait angle droit sur la place du Parvis ; le côté qui regarde la prison est aussi sculpté. On y remarque des hommes et des anges en prières, et portant des parfums.

Le monument qui termine ta façade du côté de l'archevêché, est orné de la même manière. Dans la partie inférieure sont trois anges armés d'épées : l'un tient son glaive la pointe en bas ; les deux autres ont le bras levé et vont frapper les âmes des coupables, représentées par de petites figures à genoux et suppliantes.

Dans les trois bas-reliefs qui surmontent cette première sculpture, on reconnaît les figures de l'Apocalypse. Le Christ, sous la forme d'un bélier ou d'un agneau, ouvre le livre des sept sceaux.

A droite un ange console les vieillards effrayés des maux qui vont fondre sur la terre. A gauche arrivent deux cavaliers : l'un tient une épée et une couronne ; le second brandit une longue lame de fer. Derrière lui un troisième cavalier se perce de son propre glaive.

Sur le second bas-relief, on voit arriver au galop trois autres cavaliers : l'un tient une balance qu'il agite; les deux autres représentent la mort et l'enfer. Sur le troisième bas-relief est le Irène de l'agneau. Au-dessus, dans une niche, est le Sauveur entre deux anges. A ses pieds sont les âmes des martyrs. Dans la partie anguleuse du fronton est une reine à genoux, et regardant le

Christ du portail voisin. Cette partie du monument a une façade latérale du côté de l'archevêché. On y compta vingt-deux figures.

Les sujets auxquels elles se rapportent sont tirés des Actes des Apôtres. Elles sont rangées sur trois lignes. Au premier rang, on distingue quelques faits de la vie de saint Pierre. L'histoire de Corneille occupe le second ; celle de saint Jean, sa vie et sa mort se font reconnaître au troisième rang.

Des gouttières à formes monstrueuses sont placées aux extrémités inférieures des frontons triangulaires qui dominent les cinq portiques. Elles séparent ceux du centre et terminent les deux autres que nous venons de décrire. C’est probable qu'elles étaient jadis en pierre ; elles sont aujourd'hui de plomb, et représentent des animaux : comme toutes celles dont nous parlerons, on les nomme gargouilles. Au-dessus de chacune d'elles est une statue de chantre ou de musicien. Chaque gouttière semble soutenue par une figure qui plie sous le fardeau ; plus bas sont d'autres personnages qui séparent les arcades ; quelques-uns d'entre eux tiennent des vases d'où s'écoulent des ondes de pierre. Enfin, au-dessus des gouttières et derrière les figures qui tes surmontent y s'élèvent, au nombre de six, des clochetons à la pointe légère. Assis sur de hardis piliers, ils couronnent chacun une niche étroite et longue ; des anges, tenant des instruments de musique ou des vases de parfums, les habitent.

 

Nous avons achevé la description de la partie inférieure du portail.

 

Nous sommes arrivés au second étage de noire admirable façade. Au centre, au-dessus de la porte principale, est placée la grande rosace, qui éclaire toute la nef de sa religieuse splendeur.

Elle est comprise dans une ogive aussi vaste que l'arcade du centre. Toutes les richesses du gothique pur sont développées dans ses rayons. Autour de son coeur circulaire, se dessine une première fleur à douze pétales; celle qui l'embrasse en a vingt-quatre.

Une troisième fleur contient la seconde : ses larges feuilles encadrent celles des deux premières. Leur sommet renferme un trèfle à trois feuilles; un autre trèfle se dessine, entre chacune d'elles, dans l'angle qu'elles laissent vide en touchant de leur extrémité le cercle extérieur de la rosace.

Au-dessus de l'ogive se trouvent de curieuses sculptures. Au sommet, on voit le combat de David et de Goliath : à droite, Goliath reçoit au front la pierre que David vient de lancer; à gauche, celui-ci frappe le géant de l'épée qu'il a pu lui enlever.

Entre ces deux scènes sont trois arbres, des chiens, des animaux qui représentent peut-être le troupeau de l'intrépide berger.

De chaque côté de ce vaste bas-relief est une statue colossale de soldat armé de pied en cap, et portant une lance ornée d'une banderole; ils figurent les deux armées spectatrices du combat.

On distingue encore au même endroit dix groupes de statuettes, cinq de chaque côté de l'arc ogival. On s'accorde à y reconnaître différents détails de ta vie de Saul et de celle de David. Dans le premier groupe, Saul abandonne l'esprit de Dieu; dans le second le prince est chez une magicienne : il lui prie d'évoquer devant lui l'ombre de Samuel. Le troisième tableau représente Samuel ; il apparaît à Saul et lui annonce que la colère de Dieu va l'atteindre.

A côté, on voit la défaite de l'armée d'Israël un soldat montre à Saul un de ses fils percé de coups. Dans le cinquième tableau, on reconnaît David prêt à rentrer en Judée, où la couronne l'attend.

De l'autre-côté de l'ogive-on voit David sacré par Samuel; Isboseth assassiné pendant son sommeil; David recevant la tête de la victime; Nathan ordonnant au prince  coupable de faire pénitence ; enfin la révolte de Séba comprimée.

De chaque côté de cette portion du portail commence à se dessiner l'architecture des tours. Quatre piliers d'une grande élévation, ayant leur base derrière les frontons des arcades, en indiquent le premier étage; il y en a deux de chaque côté de la grande rose. Leur partie inférieure est pleine : le sculpteur s'est contenté d'y tracer trois ogives allongées, et placées côte à côte.

Au-dessus de chaque pilier est une niche aussi de forme ogivale; sa partie antérieure est formée par deux colonnes qui se détachent du monument et portent un clocheton élancé ; il est riche .d'ornements, et monte au deuxième étage du portail. Dans ces quatre niches on remarque la Vierge et trois apôtres.

Entre les deux piliers qui indiquent la première partie de chaque tour, sont deux ouvertures ogivales divisées par une simple colonne de pierre. Une autre colonne aussi légère sépare chacune d'elles en deux autres ogives. Ces quatre ouvertures sont terminées par des trèfles. Elles sont à jour et donnent passage à l'œil : il peut non seulement arriver dans l'intérieur de cette partie de l'édifice, mais encore aller au-delà; car ces ouvertures se répètent de l'autre coté du cube qui porte les tours. Elles laissent voir aussi les légers arcs-boutants qui soutiennent la haute nef; celle-ci disparaît derrière la rosace. Le spectateur, devant toutes ces lignes qui se croisent et laissent au milieu d'elles se jouer les rayons de la lumière, admire l'art de l'architecte qui sut donner de la légèreté et de la grâce à l'immense monument sorti de ses mains.

On remarque, dans les pierres qui encadrent ces ouvertures, des ferrements qui semblent destinés à porter des vitraux. Tous ces jours no furent-ils jamais fermés par des verrières ? C'est ainsi qu'on les voit dans un tableau du Musée de Versailles qui représente l'arrivée de Louis XV à Notre-Dame, lors de son sacre.

L'artiste a-t-il été trompé par ses souvenirs? Dans beaucoup d'églises on a rempli les ouvertures des tours pour empêcher la pluie et la neige d'attaquer les charpentes, et le vent d'ébranler l'édifice en s'engouffrant dans les cavités. N'a-t-on pas fait de môme à Notre-Dame? Nous devons avouer que la tradition n'eu dit rien…

 

A Suivre...

Prosper TARBE.

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Publié le par Rhonan de Bar
Publié dans : #ETUDES HISTORIQUES SUR LIEUX SAINTS

NOTRE DAME DE REIMS.

 

reims

 

 

CHAPITRE II. DEUXIEME EXTRAIT.

 

Cathédrale du XIIIe siècle.

 

Son portail.

 plan caté

 

Avant de pénétrer dans le temple, examinons son extérieur.

Le bas du portail est partagé en cinq parties : toutes les cinq se terminent par des frontons à angle aigu. Les trois divisions du milieu sont des portiques : celles des extrémités sont pleines et couvertes de bas-reliefs : elles sont moindres que les trois autres; Le portail du milieu est plus élevé que ses deux voisins : l'arcade qui l'encadre a 11 m. 37 c. de large dans sa plus grande ouverture; les arcades voisines ne comptent que 6 m. 82 c.

Pour entrer dans la basilique par le portail occidental, il faut franchir cinq degrés. Aux autres portes l'exhaussement du sot oblige à en descendre plusieurs.

Les trois arcades sont exécutées dans le même style et sur le même dessin. Trente-cinq statues, hautes de 2 m. 44 c., en décorent la partie inférieure. Elles sont debout, séparées, placées les unes à côté des autres ; elles forment une chaîne de figures suivant les lignes tracées par la base des trois portiques, et interrompues seulement par les ouvertures destinées à livrer passage aux fidèles. Elles représentent des évoques, des anges, des prophètes, de saints martyrs, des rois et des reines; elles sont posées sur des piédestaux qui ont pour support des figures courbées ou accroupies, des animaux singuliers. Plus bas sont des feuillages d'un travail délicat, semblables à ceux qu'on admire dans l'intérieur de l'église; au-dessous on remarque des draperies faites à une époque moins ancienne.

L'arcade du milieu est divisée en deux parties par une colonne de pierre à laquelle est appliquée une belle statue de la Vierge.

Jusqu'en 1526, une lanterne où l'on entretenait une flamme perpétuelle, pendait devant elle, elle l’éclairait pendant la nuit : à celle époque ce luminaire fut supprimé.

La colonne qui sert de point d'appui à la statue de la Vierge est ornée de huit bas-reliefs: ils représentent l'histoire d'Adam et d'Eve. Ces sculptures sont en mauvais état ; mais on distingue encore assez bien l’Éternel prononçant la condamnation de l'espèce humaine, et l'ange à l'épée flamboyante chassant le premier homme du paradis terrestre.

Les ouvertures des portes sont terminées par des lignes parallèles au sol; des bas-reliefs les surmontent. Les piliers qui forment leurs jambages, sont décorés de la même manière. Ils ont deux faces : l'une regarde la place du Parvis; l'autre forme avec la première un angle carré. Elles sont ornées de sculptures presque toutes aujourd'hui mutilées et méconnaissables. On y remarque encore cependant les joies du paradis, les peines de l'enfer, les signes du zodiaque, les travaux des douze mois de l'année.

On reconnaît facilement le bûcheron chargé de son fagot, le vigneron taillant sa vigne, le moissonneur, le vendangeur, la vieillesse qui brave l'hiver au coin du feu, une jeune fille souriant au printemps, au milieu des fleurs, sous un berceau de feuillage.

Au-dessus des portes sont d'autres bas-reliefs. La travée de celle placée à droite en entrant est divisée en quatre groupes : le premier représenta Clovis victorieux revenant de Tolbiac. Il passe à Toul, et prie saint Vaast, alors simple prêtre, depuis évêque d'Arras, de lui enseigner la parole de Dieu. Dans le second tableau on voit saint Rémi catéchisant le roi des Francs; dans le troisième, le roi, à genoux, se convertit et demande le baptême; un diacre lui montre la croix, et saint Remi reçoit du ciel la Sainte Ampoule apportée par une colombe. Enfin, dans le quatrième sujet, le roi, nu dans une cuve reçoit le baptême : saint Rémi verse sur le chef royal incliné l’eau qu'il vient de bénir.

Au-dessus de la porte principale étaient des bas-reliefs représentant la vie de la Vierge, l'Annonciation, la Visitation et la Purification; ils furent détruits en 1794, et remplacés par cette fameuse inscription :

 

Temple de la Raison.

Le peuple français reconnaît l'Etre suprême

El l'immortalité de l'âme.

 

Ces lignes furent effacées en 1800, et remplacées par celles, qu'on y voit de nos jours :

 

Deo optimo maximo,

Sub invocatione beate Maria Virginis Deiparoe

Templum saecule XIII reaedificatum.

 

Sur la travée de la porte située à gauche on remarque des sujets dont l'interprétation est loin d'être facile. L'un représente un homme tirant son épée; à ses pieds tin personnage est a genoux la tète baissée et attend la mort ; sur le second plan on voit un brasier allumé ; l'autre nous montre l'appel fait à la miséricorde du pouvoir ; des soldats armés de pied en cap complètent le tableau. Au milieu de ces figures se trouve sculptée l'église qu'on donne comme celle élevée à Notre-Dame par Ebon. Ne peut-on pas admettre qu'elles représentent la mort de saint Nicaise ou celle des premiers martyrs rémois?

Le dessus des portes a la forme ogivale. Chacune d'elles est placée au fond d'une arcade spacieuse, voûtée et du même style.

Une rosace circulaire donne celle du milieu. Les deux autres portes sont aussi surmontées de verrières; au centre de chacune se dessine une rose ou un trèfle à quatre feuilles.

Chaque voûte est ornée de figures placées sur cinq lignes : elles s'élèvent au-dessus des grandes statues dont nous avons parlé, de chaque côté de l'arcade, et vont se rejoindre à son sommet.

Des lignes de feuillages montent avec elles et les séparent. On compte quatre-vingts statuettes sous l'arcade du milieu ; il n'y en a que soixante sous chacune des deux autres.

Ces figures venaient d'être remises à neuf quand la révolution arriva. Louis XVI, qui avait appris lors de son sacre quelles étaient les charges de l'église de Reims, avait accordé cinquante mille écus pour les réparations de l'édifice; de plus, il promit de donner pendant quinze ans et donna jusqu'à la fin de son règne une somme de douze mille francs dans le même but. Ce fut au portail central qu'on appliqua les dons de la munificence royale.

Sous l'arcade sise à gauche est représentée la Passion dans tous ses détails. Plusieurs de ses scènes sont faciles à reconnaître ; les autres sont rongées par le temps ou mutilées par la main des hommes. Au-dessus de l'arcade dont il s'agit, dans l'angle aigu formé par les lignes qui couronnent l'ensemble du portail, est sculpté le Christ sur la croix ; à ses pieds sont la Vierge, les deux Marie, saint Jean, Nicodème et Joseph d'Arimathie.

Sous la voûte de l'arcade située à droite, on voit des sujets variés, difficiles à expliquer et parfois inexplicables. On remarque des figures hideuses, singulières, et des allégories qui se prêtent souvent à plusieurs interprétations. Avec beaucoup d'attention et un peu de bonne volonté on distingue la résurrection, les peines de l'enfer, ta prière, saint Jean, saint Pierre, des musiciens, des anges, la sainte face, des rois el des reines portant la bienheureuse Sainte Ampoule, Jézabel el les chiens dévorants, des hommes dont deux crèvent les yeux à un troisième, un cavalier armé d'un glaive, un individu qui marche sur les mains, des malheureux déchirés par des bêtes féroces, la communion, un ange tenant le livre de la vie, et bien d'autres sujets de nature à exercer la sagacité du voyageur. Il y aurait un volume à faire sur les détails de cette voûte. Dans le fronton qui la surmonte est sculpté le Seigneur sur son trône ; six personnages qui l'environnent, tiennent les instruments de la Passion.

Sous l'arcade du milieu sont les statuettes réparées sous Louis XVI; elles représentent dans leur ensemble les bienheureux admis aux joies du paradis ; là sont rangés les rois chers au Seigneur, les apôtres, les martyrs, les vierges saintes et les vertus.

On distingue David et su harpe ;—Salomon et le plan du temple de Jérusalem ;— saint Louis le roi contemporain;— Clotilde la sainte reine des Francs ; — sainte Hélène qui retrouva la vraie croix;—saint Jacques coiffé de son chapeau aux larges bords et le bourdon à la main ; — saint Philippe ; — saint Jude ; — saint-Sébastien et les instruments de leur martyre ; — sainte Cécile et sa guitare ; — Noé et sa grappe de raisin ;— Moïse et les tables de la loi ;— l'amitié fraternelle;— l'amour conjugal ; —-la religion triomphant de l'impiété. De saints personnages tiennent des harpes, des trompettes, des flûtes, des violons; d'autres chantent; et tous ensemble ils célèbrent la gloire et la bonté du Très-Haut. Des anges portent les palmes et les couronnes réservées à ceux qui sont morts pour la foi, aux hommes qui ont servi leurs frères.

Le fronton de cette arcade la couronne majestueusement; ces sculptures sont vraiment majestueuses et dignes de leur position.

L'artiste a placé la scène au plus haut des cieux. La Vierge arrive aux pieds du Seigneur; elle quitte ce monde où elle a tant souffert.

Ses jours de douleur sont passés; le moment de son triomphe est venu ; le Christ lui pose sur la tète la couronne royale. La sainte Mère, humble comme dans l'étable de Bethléem, baisse la tête ; ses pieds posent sur un globe doré. Derrière elle le soleil l'éclairé de ses rayons étincelants. Cette brillante auréole relève la beauté de la noble figure ; autour d'elle des anges, des chérubins aux longues ailes, encensent et saluent le groupe divin. Cette grande composition est abritée sous des pendentifs légèrement sculptés et terminés en pointes qui descendent en saillie des rebords du fronton. Ce savant tableau peut-il être l'oeuvre du XIII siècle ? Ne doit-on pas plutôt lui donner pour date te siècle suivant?

Dans l'origine ces sculptures étaient peintes : le docte chanoine Lacourt, dans le siècle dernier, constatait encore la présence des couches d'azur et des feuilles d'or; on nous assure qu'on en voit encore quelques parcelles.

Celte partie de l'édifice avait reçu des réparations notables en 1611.

Louis XIII, lors de son sacre, donna de l'argent à cet effet. Ses bienfaits étaient rappelés par celte inscription placée au portail : « Ludovicus XIII, Franciae et Navarrae rex christianissimus in hoc augustissimo templodie 17. octob.anno 1610, regum Franciae inauguratus, regiâ munificentia instaurandam curavit. »

 

Les travaux furent conduits par maître Vincent, architecte de Laon...

 

 

A suivre...

Prosper TARBE.

 

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NOTRE DAME DE REIMS.

 reims

 

CHAPITRE II. PREMIER EXTRAIT.

 

 

Cathédrale du XIIIe siècle.

 

 Son portail.

 

 

plan caté

 Les dévastations dont avait souffert Notre-Dame de Reims n'avaient pas entamé son vaisseau ; les premières années du XIIe siècle le voyaient encore intact, lorsqu'on 1211, suivant les uns le 6 mai et suivant d'autres le 24 juillet, un effroyable incendie dévora une partie de la ville de Reims et la cathédrale d'Ebon. Si on en croit dom Marlot, le grand-prieur de Saint-Nicaise, l'Un de nos historiens du XVe siècle, sa voûte et ses piliers étaient en bois, au moins en partie. Cette circonstance facilita singulièrement les progrès et les ravages du feu;

La flamme descendit le long des piliers, ravagea le chœur y brûla les reliquaires, une partie du trésor et des archives. La Vieille église avait vécu 390 ans environ. Bientôt un amas de ruines noircies, de cendres fumantes, marqua la place où s'élevèrent successivement la citadelle gallo-romaine, le temple de Vénus, l’église bâtie par saint Nicaise, celle achevée par Hincmar.

Lorsqu'on 1844 on creusa dans la cour de l'archevêché le sol pour opérer la fonte d'un second bourdon, on distingua sur les parois de la fosse, à une profondeur de quelques pieds, un lit de charbons et de matières noires, qui pouvaient être les traces de l'incendie de 1211.

L'archevêque Albéric de Humbert, après avoir pleuré sur les ruines de la sainte basilique et prié Dieu de lui prêter l'assistance dont il avait besoin pour relever son temple, commença par donner, à cette fin, tout l'argent dont il pouvait disposer.

Le Chapitre suivit son exemple et vida son trésor. L'architecte du monument à construire, l'immortel Robert de Coucy, voulut faire mieux que Romuald. Son plan était vaste et couvrait les lignes du vieux monument ; il les dépassait de toutes parts; et la nouvelle cathédrale allait renfermer dans son sein les fondations de tous les édifices qui l'avaient précédée. Sa voûte hardie, ses forêts de clochetons, ses sept tours élancées vers le ciel, devaient lui donner un aspect gigantesque. Mais il fallait beaucoup d'or pour tenter cette vaste entreprise. L'architecte, sûr de son génie, doutait de ses ressources et faisait part de ses inquiétudes à l'archevêque : — « Commencez, dit Albéric à Robert, Dieu et les hommes nous aideront. » Et il on fut ainsi. Alors la foi était vive, et la charité donnait largement à la voix de l'espérance; le clergé demanda des secours au nom du Seigneur; en son nom il pardonnait au repentir généreux. Dans les provinces on promena les reliques, les vases sacrés, tristes témoins de l'incendie auquel on avait pu les soustraire. Partout sur leur marche on racontait le fatal désastre; l'or du châtelain et du riche marchand, le denier de la veuve et de l'ouvrier, remplissaient les sacs destinés à l'architecte; il en fit bon et bel usage.

Ce fut en 1212 qu'Albèric de Humbert posa la première pierre de l’admirable édifice, orgueil de notre cité (1). Depuis ce jour, les travaux marchèrent sans interruption, les artistes sculpteurs y dévouèrent jour vie; les tailleurs d'images y épuisèrent toutes les richesses de leur imagination; plusieurs architectes y consacreront leurs jours, leurs veilles, les trésors de leur science ; un chef-d'œuvre sortit de leurs mains.

Ce fut vers 1430 seulement qu'il fut achevé. Pendant deux cent vingt-neuf ans on y vit travailler bien des hommes qui, eux aussi, avaient leurs idées, leur savoir; ils ont respecté le plan de Robert de Coucy; ils ont su le continuer et le conduire à perfection. Leur modestie s'est inclinée devant la supériorité du maître ; leur foi s'est mise à genoux devant sa pensée, elle commandait du fond de la tombé; et pendant plus de deux siècles ses ordres furent exécutés. Elle était devenue la pensée de tous.

Aussi la gloire de Robert de Coucy leur appartient à tous; tous ils y ont droit. Le génie qui obéit, s'élève au niveau de celui qui commande.

Dès 1213, une cérémonie imposante eut lieu ; c'était la dédicace de l'église. Le même jour on bénissait à Reims l'église Sainte-Balsamie(2)

La veille de la  Noël 1241, les hymnes sacrées se faisaient entendre sous les voûtes nouvelles. Le Chapitre prenait possession du choeur, sans doute il s'établissait au centre d'une église encore imparfaite : de longs travaux extérieurs suivirent cette première installation.

En 1295 on bâtissait encore; il fallait de l'argent. Les fidèles, le Chapitre en donnèrent, et los clochetons virent leurs pointes amincies s'effiler en aiguilles ; les niches désertes reçurent bientôt leurs immobiles habitants ; les terribles gargouilles vomirent les eaux de la pluie qui baignait la toiture; les milliers de ligures qui décorent les cinq portiques achevés, se classèrent et se mirent en place; les tours s'élevèrent majestueusement, et l'œil étonné se demanda comment l'art pouvait être à la fois si léger et si noble.

Les nombreuses statuettes dont nous parlerons bientôt, ne furent pas faites dans le même temps; on ne dut s'en occuper que quand les grands travaux furent terminés. L'exécution de quelques-unes d'entre elles révèle le ciseau des XIV et XVe siècles.

La tour du midi était encore imparfaite sous Charles VI. Le cardinal Filastre, ancien chanoine de Reims, se souvint alors de l'église dans laquelle il avait commencé sa brillante carrière : il se fit un devoir de lui venir en aide et eut l'honneur de payer les dernières pierres de l'édifice dont Robert de Coucy traçait le plan deux siècles plus tôt.

Un immense désastre menaça peu après Notre-Dame de Reims.

Le 24 juillet 1481, des ouvriers plombiers raccommodaient sa vaste toiture do plomb ; c'étaient Jean et Rémi Legoix. Ils omirent de surveiller les charbons dont ils avaient besoin pour la fusion du métal; vers midi tout le haut de la grande église fut en feu. La flamme gagna rapidement le clocher élevé sur le transept, les quatre tours placées à ses deux extrémités. La charpente qui les composait, celle qui soutenait la couverture, étaient de véritables forêts. Rien ne put les empêcher de brûler.

L'incendie atteignit les deux tours de la façade. Les cloches, le plomb du toit se mirent à fondre. Des ruisseaux de métal coulaient de toutes parts et tombaient en cascade du haut de l'édifice sur ceux qui portaient des secours. Ce formidable torrent brûlait tout ce qu'il touchait, et formait un obstacle invincible au dévouement des Rémois. Ils ne purent sauver que le corps de l'édifice et le portail; tout le resta périt. Le dommage fut estimé à plus de cent mille florins. (Deux cent mille livres tournois de cette époque)

Il fallut annoncer ce terrible malheur à Louis XI. Ce prince, alors âgé, bizarre et soupçonneux, faisait parfois mine de prendre des accidents pour des actes volontaires. Que faire pour prévenir sa colère sans pitié? Les plombiers sont arrêtés et conduits à Laon devant le bailli de Vermandois. Les habitants s'assemblent à l'échevinage, et les chanoines au Chapitre. Des gardiens sont placés de tous côtés. Voici qu'à neuf heures du soir l'incendie reparaît et relève sa tête de feu : on s'en rend de nouveau maitre.

Le jour de l'Ascension, une immense procession fait le tour des débris fumants en implorant la miséricorde du Seigneur; Le peuple portait des torches; les bannières des métiers, les hautes classes marchaient à sa tête. Cependant le Chapitre et le conseil de ville avaient envoyé une députation au Plessis-lès-Tours. Ils cherchèrent à se justifier cl parvinrent à atténuer les effets du mécontentement royal. Le Chapitre courut risque d'être remplacé par des moines, si nous en croyons Fourquart, le syndic des habitants, témoin et historien de ce triste événement. Il n'en fut rien. L'irascible monarque entendit raison. Les frères Legoix même finirent par être graciés.

L'archevêque, les chanoines, les Rémois, les fidèles du diocèse et des provinces voisines se cotisèrent pour faire disparaître les traces du funeste sinistre. Bientôt les travaux recommencèrent.

En 1484 oui lieu le sacre de Charles VIII. Ce jeune prince, que l'on reçut au milieu des ruinés encore irréparées, vit avec peine l'état de la royale église. Il accorda, pour sa reconstruction, une somme considérable à prendre sur l'impôt du sel. D'autres rois prolongèrent après lui celto généreuse concession. Les ouvriers purent travailler avec activité. La toiture fut recouverte de plomb; toutes les cloches furent réunies dans les deux tours du portail. Les clochers qui décoraient les bras et le centre du transept, devaient être rétablis. Des marchés furent débattus à celle intention. Les bois furent apportés et déposés dans l'intérieur de l'église. Le chanoine Cocquault constata qu'ils y étaient encore dans les premières années du règne de Louis XIV. Nous dirons plus loin comment on recula devant les difficultés de l'entreprise, comment on finit par y renoncer.

La toiture, mal refaite en 1484, fut recommencée en 1487. Jean Rogier, maître plombier, dirigea les nouveaux travaux, et termina la crête de l'édifice par un feston dentelé et surmonté de fleurs-de-lys et de trèfles en plomb doré, placés alternativement.

La façade du portail méridional fut rebâtie en 1501. Le sagittaire qui se dresse à son sommet, fut remis en place en 1502.

En 1506, des fonds accordés par Louis XII furent employés à refaire la galerie du nord. En 1515 seulement, on se décida à terminer par des toits le sommet des tours du portail. Jusqu'alors elles avaient attendu les hautes flèches dont Robert de Coucy voulait les couronner. Depuis cette époque l'édifice n'a plus éprouvé de modifications dans son ensemble : nous le voyons tel quo l'a vu François Ier,

Chaque année le Chapitre dépensait 25,000 livres en réparations.

Nos rois venaient à son secours et contribuaient à conserver intacte la grande église. La république la menaça dans son ensemble après l'avoir ruinée dans ses revenus, dans son trésor, dans ses autels.

Quand le catholicisme releva la tête, la cathédrale fut rendue au culte, et l'empire lui donna son offrande. De 1809 à 1814, M. Rondelet, et d'autres après lui dirigèrent des travaux dont vingt ans d'abandon avaient augmenté l'urgence. La restauration et le gouvernement de 1830 les ont continués ; les pouvoirs que Dieu depuis quatre ans place à la tête de la France, n'ont pas voulu les abandonner. Le pays dans sa détresse a su trouver des fonds pour continuer la réparation d'un édifice qui lui rappelle tant de jours de gloire et de bonheur. La Providence veut qu'il vive : ne peut-il pas encore voir briller dans son sein l'aurore d'une ère d'honneur et de prospérité? Mais de longues années, des sommes considérables y seront dépensées avant que Notre-Dame n'ait plus besoin de secours.

Ce récit chronologique était nécessaire pour arriver à ce qui va suivre : en désignant chacune des parties de l'édifice, nous rappellerons, quand cela nous sera possible, les dates, les faits, les détails qui s'y rattachent.

Les pierres employées à la construction de l'église ont été fournies par les carrières d'Hermonville, de Merfy et de Marsilly. On dut aussi chercher à utiliser les débris amoncelés sur cet emplacement que de somptueux édifices n'avaient cessé de couvrir depuis près de dix siècles.

La grande église de Reims compte, en longueur en dehors, 149 m 17 c, et en dedans 138 m. 69c. Le transept a en long à l'intérieur 49 m. 45 c. et à l'extérieur 61 m. 25 c. L'édifice, mesuré entre les bas côtés, compte à l'intérieur 30 m. 13 c. de large, l'extérieur 34 m. 07 c. Les contre-forts forment une saillie de 7 m. 50 c. On trouve au chœur, depuis la grille jusqu'à la barrière élevée derrière le maître-autel, en longueur, 45 in. 42 c. L'arrière-choeur n'a que 20 m. 45 c. Le choeur et la grande nef, entre les piliers, sont larges de 12 m. 23 c ; l'axe des piliers 14 m. 65c; les bas-côtés ont en hauteur 16m. 40 c et en largeur, entre les piliers, 5 m. 53 c. De l'axe du pilier au mur latéral 7 m. 74 c. L'élévation des chapelles de l'abside est la même que celle des bas-côtés. Les voûtes ont 37 m. 95 c. de haut. Les tours montent à 81 m. 50 c.

 

(1) Autour du cierge paschal on plaçait jadis un rouleau qui portait celle inscription: «Anno 1211, die festo Sancti Joannis ante portant Latinam, 6 maii, ecclesia remensis fortuito incendio concremata fuit; et eodem die anno revoluto, fabrica ejusdem ecclesiae incoepta fuit a bonae memoriae Alberico archiepiseopo, qui primum lapidem fundamentis manu proprid collocavit

(2)Elle était située dans le quartier Saint-Nicaise, dans le haut de La veille à l'extrémité de la rue qui porte son nom. Elle fut détruite en 1793.

 

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III

 

La persécution ! N'y comptez pas, répondent ceux qui s'efforcent de modérer le mouvement.

Nous n'avons pas perdu la mémoire et nous ne vous rendrons pas ce service; nous ne persécuterons pas. Si! vous persécuterez. Ceux qui le veulent l'emporteront sur ceux qui ne le veulent pas : cela est fatal.

Vous persécuterez, parce que vous êtes passionnés et que la passion a autant de logique que la raison, quelquefois plus. Vous persécuterez, parce que cela est écrit dans votre propre histoire, parce que c'est l'inévitable destin des hommes de parti qui, arrivés au pouvoir, restent hommes de parti. M. de Serre, ministre de la Restauration, disait à la tribune du Palais-Bourbon : « Le triomphe d'un parti, funeste au pays, ne tarderait pas à l'être à ce parti lui-même; nous sommes tous Français ! il n'y a, il ne doit y avoir d'exclusion, d'exhérédation pour personne. On commence par exclure, on finit par proscrire (1). »

Comment ne persécuteriez-vous pas ? Mais regardez donc votre passé.

Les Jésuites étaient bannis de France et même de presque toute l'Europe ; ils l'étaient avec l'assentiment d'un pape, et la révolution débutait en face d'une Église affranchie de tout alliage ultramontain. Vos pères en furent-ils désarmés? Nullement. En 1790, ils rêvèrent la constitution civile du clergé; en 1793, ils ne rêvaient plus, ils en étaient à l'Etre suprême et à l'échafaud. En 1828, on obtint du roi Charles X ce qu'on avait obtenu de Clément XIV, soixante ans auparavant; la révolution de 1830 n'en éclata pas moins deux ans après, et tout l'effort des haines populaires, toutes les calomnies, toutes les caricatures, furent tournés contre le clergé. Saint-Germain l'Auxerrois, Notre-Dame de Paris furent dévastés, et M. de Quélen, notoirement gallican, comme presque tout le clergé de la Restauration, mourut dans une cellule qui, durant dix ans, lui avait servi d'archevêché.

Ainsi, même en laissant de côté les menaces et les aveux sinistres dont tant de journaux sont remplis, on peut prédire hardiment que vous ne vous en tiendrez pas longtemps au cléricalisme ou à l'ultramontanisme. Ce sont des mots commodes qui se prêtent à tout ce qu'on veut, et tout catholique, quand cela vous conviendra, sera justement convaincu d'être clérical ou ultramontain. Des hommes de savoir et d'esprit, comme le sont plusieurs d'entre vous, n'ignorent point cela ; ils savent parfaitement ce qu'ils veulent, ce qu'ils visent, et l'immolation de quelques pauvres religieux ou de quelques pauvres religieuses ne les consolera pas de se retrouver, le lendemain comme la veille, en face de l'Église tout entière, de sa hiérarchie, de sa discipline, de son enseignement et de ses oeuvres.

Ce que vous commencez aujourd'hui, c'est une guerre sans merci, guerre qui a déjà dix-huit cents ans de durée, vieux dessein toujours stérile, même quand il triomphe, mais toujours renaissant, même quand il succombe, que nous ne devons ni redouter ni dédaigner outre mesure; mais qu'en tous cas, il faut appeler de son véritable nom. Ou vous vous arrêterez lorsqu'il en est encore temps, ou vous ramènerez vos préfets au rôle de Pline le Jeune mettant deux femmes à la torture pour mieux découvrir les prétendues superstitions chrétiennes et les dénoncer à Trajan (2).

Ne vous récriez pas devant ce rapprochement, il ne se justifie que trop par le chemin si rapidement parcouru depuis le commencement de la campagne.

Quant à votre effroi de l'ultramontanisme, peut-il être sincère ? Vous savez parfaitement que l'ultramontanisme ne date pas d'aujourd'hui et que Pie IX ne l'a point inventé (3); vous savez bien que les ordres religieux font partie de l'Église et qu'on ne peut logiquement admettre l'une et repousser les autres. Faites-vous subir cette dissection au protestantisme ?

Frappez-vous les luthériens au profit des calvinistes? favorisez-vous les piétistes aux dépens des quakers? Tous les fondateurs d'ordre ont inséparablement professé l'amour de Jésus-Christ et la soumission à son vicaire: saint Benoît, saint Bruno, saint François d'Assise, saint Dominique, n'avaient point, à cet égard, une autre doctrine que saint Ignace de Loyola ou saint Alphonse de Liguori. L'ultramontanisme n'est qu'un fantôme,

on l'avoue dans vos propres rangs aux —heures de justice ou de distraction. D'ailleurs, seriez-vous donc plus gallicans qu'ultramontains?

Qui de vous, affectant le plus profond respect pour l'Église gallicane, voudrait adopter son Credo et réciter son Confiteor ?

Voici, entre mille autres semblables, une page de la main de Bossuet : « Dieu a fait un ouvrage au milieu de nous qui, détaché de toute autre cause, et ne tenant qu'à lui seul, remplit tous les temps et tous les lieux et porte par toute la terre, avec l'impression de sa main, le caractère de son autorité : c'est Jésus-Christ et son Église. Il a mis dans cette Église une autorité seule capable d'abaisser l'orgueil et de relever la simplicité, et qui, également propre aux savants et aux ignorants, imprime aux uns et aux autres un même respect; c'est contre cette autorité que les libertins se révoltent avec un air de mépris (4) » Cette page, voulez-vous la signer? Vous empruntez volontiers aux jansénistes leurs accusations contre les Jésuites, mais qui de vous s'agenouillerait aux pieds de M. Singlin ou de M. de Saint-Cyran, s'enfermerait à Port-Royal des Champs avec le grand Arnaud ou traduirait les Pères du désert avec M. d'Andilly? Vous aimez à vous targuer de quelques rigueurs des vieux parlements ; mais vous ne voudriez pas épouser leur royalisme, leur jurisprudence et leurs pénalités. Toutes ces évocations ne sont que des ruses de guerre et non des professions de foi.

On est donc amené à vous rappeler le conseil d'un homme de génie qui était, au suprême degré, un homme de bon sens :

 

Quand sur une personne on prétend se régler,

C'est par les beaux côtés qu'il lui faut ressembler.

Et ce n'est pas du tout la prendre pour modèle,

Ma sœur, que de tousser ou de cracher comme elle.

 

Écouterez-vous Molière? Non. A tous les anciens régimes on emprunte leurs iniquités, leurs violences, leurs faiblesses et leurs fautes, sans s'embarrasser ni des principes, ni des vertus, ni des repentirs de ceux qu'on met en scène. On choisit ce qui sert, on écarte ce qui condamne ; on composé un dossier faux avec des documents vrais ; on fait comparaître les grands siècles et leurs grands noms pour les transformer en faux témoins; on les enrôle, malgré eux, dans une oeuvre dont ils auraient eu horreur s'ils l'avaient pressentie.

Ce triste jeu, que cache-t-il ? On doit avoir un dessein en rapport avec le trouble que l'on jette dans les coeurs et dans les consciences. Il n'est pas admissible que l'on ait soulevé tant de clameurs, accompli déjà tant d'actes arbitraires pour les minces griefs qui étaient portés naguère à la tribune. Comment ! le christianisme aura triomphé du monde païen et planté la croix sur le tombeau des Césars; il aura détruit la servitude antique et doté le monde nouveau de la chasteté et de la charité ; il aura, de l'extrême Orient à l'extrême Occident, montré la civilisation, converti et policé les barbares, construit, à côté des monastères, les écoles et les universités ; il en aura fait sortir les savants, les politiques, les saints qui ont illustré le monde moderne; il aura, le premier, professé et pratiqué l'égalité en faisant asseoir d'humbles prêtres sur les marches de tous les trônes et posé la triple couronne sur la tête des pâtres et des mendiants ; il aura créé les grandes monarchies et les grandes républiques du moyen âge, retrouvé et sauvé les trésors de la poésie et de la philosophie antiques; il aura porté à leur plus sublime expression les lettres et les arts, donné dans les conciles le modèle des plus larges et des plus hautes délibérations; en un mot, il aura tout fondé ou tout régénéré parmi nous, depuis dix-huit cents ans, et tout cela serait non avenu! Tout cela serait mis en échec, et même en péril, parce qu'un casuiste trop épris de son art, se sera livré à de puériles subtilités ! Tant de grandeurs et tant de bienfaits seront reniés, repoussés, conspués pour flageller un théologien inconnu, pour venger la vache ou la chèvre d'un berger imaginaire (5)! Non, non, vous ne voudriez pas qu'on vous prît au mot, qu'on vous crût si mesquins dans votre ingratitude! Non, vous prétendez à plus d'honneur et à plus d'indignité.

Ni le sacrifice des casuistes, ni le sacrifice des Jésuites ne vous suffira; c'est la vieille guerre au Christ qui recommence. Sans doute, quelques-uns aimeraient à faire d'abord cette guerre par surprise; mais votre armée est trop nombreuse pour qu'on ne la voie pas de loin et trop bruyante pour qu'on ne l'entende pas marcher. Ce n'est pas l'ultra-montanisme seul que vous attaquez, ce n'est même pas le catholicisme seul : vous en voulez au christianisme tout entier.

Ne vous récriez pas. Acceptez plutôt franchement le rôle que vous voulez jouer, avec les libres penseurs allemands et les athées de fous les pays, dans la grande campagne qui s'ouvre contre l'Église. « Je ne puis oublier, nous a dit un observateur d'une rare clairvoyance, un aveu arraché à l'une des intelligences les plus puissantes que j'aie rencontrées, à un homme qui, né protestant, était devenu panthéiste et qui tarissait au service de ce système tous les trésors d'une imagination riche et féconde (6).

Cet homme, comme il arrive communément, rejetait ou défigurait tout dans le système chrétien; mais il ne haïssait que le catholicisme, dont une des gloires est de recevoir toujours l'hommage de la haine à défaut de celui de l'amour. Au milieu d'une longue discussion où toutes les préventions de son ancienne erreur avaient reparu sous la couche plus nouvelle du panthéiste, je l'arrêtai en lui

demandant s'il admettait sérieusement que, la forme catholique n'ayant point existé dans le monde, il serait, à travers dix-huit cents ans de lutte, resté autre chose du christianisme qu'un système de morale, comme le Portique ou le Stoïcisme. Après quelques moments de silence, qui firent prendre à la physionomie de mon interlocuteur une expression que je vois encore : — Non, me répondit-il, la durée eût manqué au christianisme comme religion ; il eût simplement gardé sa place comme système de philosophie morale (7). »

Détruire le catholicisme et réduire le christianisme à l'état de théorie purement spéculative, voilà le fond de la pensée; cette pensée est la seule qui puisse expliquer ce que nous voyons !

Mais qu'on y réfléchisse ! les destructions qui séduisent de loin entraînent quelquefois plus de ruines qu'on ne l'avait d'abord imaginé; souvent on se félicite d'avoir fait plus de peur que de mal, tenez-vous-en là; souvent on conjure un grand incendie en éteignant un feu de cheminée; croyez-en d'autres que moi, ne méprisez pas cette précaution.

Secouer tous les jougs et particulièrement le joug de Dieu est l'invariable penchant des puissants; beaucoup l'ont entrepris, nul n'a obtenu plein contentement, pas plus Philippe le Bel que Frédéric Barberousse, pas plus les Hussites que les Albigeois. Et cela ne tient pas à ce que vous nommeriez volontiers la barbarie du moyen âgé, car l'ère moderne ne rend pas un témoignage différent. Vous ne serez certainement pas plus forts que vos devanciers de la Convention ni plus habiles que Napoléon Ier; vous n'aurez ni plus de mépris d'autrui que ces grands contempteurs du droit, ni plus de confiance en vous-mêmes que ce grand favori de la fortune. Manuel, procureur syndic de la Commune de Paris, proposait d'écrire sur le frontispice de l'église des Carmes, après le massacre des prêtres : CI-GÎT LE CI-DEVANT CLERGÉ FRANÇAIS, et cette inscription n'était pas encore gravée sur le marbre, que déjà les terroristes s'égorgeaient entre eux.

Le 16 juin 1811, l'empereur faisait entendre au Corps législatif le langage suivant : « La paix conclue avec l'empire d'Autriche a été depuis cimentée par l'heureuse alliance que j'ai contractée; la naissance du roi de Rome a rempli tous mes voeux et satisfait à l'avenir de mon peuple. Les affaires de la religion ont été trop souvent mêlées et sacrifiées aux intérêts d'un État de troisième ordre. Si la moitié de l'Europe s'est séparée de l'Église de Rome, on peut l'attribuer spécialement à la contradiction qui n'a cessé d'exister entre les vérités et les principes de la religion qui sont pour tout l'univers et des prétentions et des intérêts qui ne regardaient qu'un très petit coin de l'Italie. J'AI MIS FIN A CES SCANDALES POUR TOUJOURS ; j'ai réuni Rome à l'empire; j'ai accordé des palais aux papes à Paris et à Rome. S'ils ont à coeur les intérêts de la religion, ils voudront séjourner souvent au centre des affaires de la chrétienté. C'est ainsi que saint Pierre préféra Rome au séjour même de la Terre Sainte. La Hollande a été réunie à l'empire; elle n'en est qu'une émanation. Sans elle, l'empire ne serait pas complet. »

Peut-on pousser plus loin l'aveugle et superbe arrogance de la présomption, l'ignorance des choses divines et humaines ? Quatre ans à peine écoulés, Pie VII était ramené à Rome par l'Europe entière, et Napoléon dépérissait lentement à Sainte-Hélène, sous la main d'un geôlier.

C'est là un formidable sujet de méditation ; en voici un autre moins grandiose et moins imposant, mais par cela même plus applicable à chacun de nous.

Dans un article sur les Mémoires d'Etienne Delécluze, rédacteur des Débats (8), M. Sainte-Beuve nous introduit dans l'atelier de David à l'époque du Directoire; on était donc en pleine anarchie morale, en pleine insurrection contre Dieu. « Un élève mêlait à une histoire bouffonne le nom de Jésus-Christ; un de ses camarades, Maurice, chef de la secte des Penseurs, lui imposa impérieusement silence. Belle invention, dit-il en continuant de peindre, que de prendre Jésus-Christ pour sujet de plaisanterie ! Vous n'avez donc jamais lu l'Évangile, tous tant que vous êtes? L'Évangile! c'est plus beau qu'Homère, qu'Ossian! Jésus-Christ au milieu des blés se détachant sur un ciel bleu ! Jésus-Christ disant : « Laissez venir à moi les petits enfants ! » Cherchez donc des sujets de tableaux plus grands, plus sublimes que ceux-là! Imbécile, ajouta-t-il avec un ton de supériorité amicale, achète donc l'Évangile et lis-le avant de parler de Jésus-Christ. Lorsque Maurice eut cessé de parler, il y eut un intervalle de silence assez long, pendant lequel tout le monde se consulta du regard pour savoir comment on prendrait la chose. Le brave Morier, un vieil élève, ancien militaire, trancha la difficulté. C'est bien, cela, Maurice ! » dit-il d'une voix ferme, et à peine ces mots eurent-ils été prononcés que tous les élèves crièrent à plusieurs reprises : Vive Maurice! »

M. Sainte-Beuve ajoute en son nom : « La crise morale qui travaillait la société se réfléchit là en abrégé : la Guerre des dieux de Parny d'abord triomphante est repoussée et bat en retraite; le Génie du christianisme approche, il est dans l'air ! »

Tout cela, vous le reverrez quand vous vous en douterez le moins. On peut bannir le christianisme de ses temples et de nos codes; mais quand il est dans Pair, comment l'atteindre?

Prenez-y garde! Blesser, irriter à plaisir le sentiment le plus vivace et le plus indépendant du coeur humain, c'est se mettre une bien grosse affaire sur les bras. Laissons pour un moment de côté tout appel à la Providence et aux divines promesses; ne prenons la question qu'au point de vue politique.

Pour bon nombre de républicains sérieux et convaincus, la république en est encore au jardin d'acclimatation ; pour bon nombre de conservateurs résignés, elle règne en France comme le sultan à Constantinople, par l'impossibilité de se mettre d'accord sur son remplaçant.

Vous en êtes donc encore à l'heure de la prudence, non à celle des grandes aventures. Peut-on arracher à un peuple sa religion sans l'émouvoir jusque dans ses dernières profondeurs? Ne vous en flattez pas; ce ne serait pas méconnaître la France seulement, ce serait méconnaître le coeur humain dans son instinct le plus universel. Les désespoirs et les joies, les découragements et les espérances, tout ramène l'homme à Dieu, et vous ne lui barrerez jamais ce chemin-là.

Quand vous aurez fermé les asiles de la consolation, aurez-vous tari la source des larmes?

Tôt ou tard, cruels insensés, vous rallierez contre vous l'innombrable multitude de ceux qui souffrent durant la vie et de ceux qui aiment après la mort. Et si le christianisme ne revenait pas par les plus douloureuses épreuves de l'humanité, il reviendrait encore par la poésie et par les arts. La soif de l'infini, la nostalgie d'un monde meilleur, qui dévorent le coeur de l'homme, ne seront jamais apaisées, ni même trompées, par le matérialisme, et la scène de l'atelier de David se reproduira perpétuellement. Ces religieux, ces moines, ces enfants du cloître qui sont, en même temps, les enfants du peuple, verront toujours la popularité revenir à eux, tantôt par une sympathie, tantôt par une autre. La plus virile et la plus saine portion de la France ne délaissera jamais pour longtemps ces bienfaiteurs et ces bienfaitrices, que le pauvre et le malade n'appellent pas en vain : mon frère ! ma soeur !

La Guerre des dieux ne triomphe qu'une heure; le règne de Dieu revient toujours. Et quand même il faudrait prévoir votre succès momentané (hélas! il n'est pas interdit de le craindre, puisque Fénelon nous avertit que le don de la foi peut se transporter d'une contrée à une autre par de mystérieux décrets (9), alors nous reverrions les temps déplorables qui arrachaient à saint Jérôme ce cri désespéré : « Le monde s'écroule, et notre tête ne sait pas s'incliner ! »

A quoi bon d'ailleurs tant de ruines? Pour la protection de la république? Mais qui la met en péril, si ce n'est vous ? Le général Cavaignac vous le disait, il y a trente ans, et ce n'est pas moins vrai à cette heure-ci : « Si la République devait périr, rappelez-vous bien que nous en accuserions vos exagérations et vos fureurs (10). »

Le désarroi des partis n'est-il pas assez complet? Ne voyez-vous pas vos adversaires les plus apparents, les plus attitrés, conspirer pour la république, infiniment mieux que vous ne la servez vous-mêmes? Un gouvernement portant en soi des initiatives et des progrès véritables, pourrait-il souhaiter un avènement  moins contrarié et des adversaires plus dispersés? Si vous avez la main pleine de bienfaits, que ne l'ouvrez-vous? Assurément le dernier mot de la société française n'est pas dit: le dernier mot d'une société chrétienne ne l'est jamais. Nous sommes prêts à vous seconder; nous vous demandons seulement autre chose que des plans dix fois avortés, des déclamations creuses, une philosophie sans oeuvres parce qu'elle est sans dévouement, sans abnégation, sans sacrifices. Si vous ne trouvez pas assez d'Évangile dans les lois et dans les moeurs, mettez-en davantage; mais ne supprimez pas d'abord l'Évangile. Innovez, améliorez sérieusement, réellement, sans rien mutiler et sans garrotter personne. Si nous avons des retardataires parmi nous, stimulez-nous par l'émulation; si nous avons des préjugés, faites-nous-en rougir; si nous avons des injustices, faites-en des ingratitudes; mais pas de proscriptions, pas de calomnies, pas d'insultes!

« Baptisez l'héroïne sauvage », comme vous le demandait, en pleine basilique de Rome, le P. Ventura parlant de la démocratie moderne. Prenez ce mot pour programme, et les auxiliaires ne vous manqueront pas. L'unité nationale pourra se refaire aussi solide et aussi indissoluble que jamais; on pourra répéter la parole des anciens jours : « Justifia et pax osculatoe sunt : la Justice et

la Paix se sont embrassées. » La justice ramène la paix; la paix est le salaire de la justice! Mais si vous restez sourds à la voix autorisée de quelques-uns de vos amis, si vous restez aveugles devant l'évidence, si le monde civilisé demeure incessamment, persévéramment, comme il l'est aujourd'hui, le point de mire de vos attaques, heureux alors les yeux qui se ferment et les coeurs qui cessent de battre ! L'esprit conçoit avec peine quel nom devra porter cette société future.

Prédicateurs, orateurs, écrivains, savants chrétiens, vous qui avez cru, vous qui avez enseigné, célébré les vérités éternelles, vous qui avez ardemment recherché l'alliance naturelle de la religion et de la liberté, Chateaubriand et Lacordaire, Montalembert et Ravignan, Ozanam et Tocqueville, Biot et Cauchy, soyez honnis ! Vous aurez été, on vous le répète chaque matin, les corrupteurs du dix-neuvième siècle ! Et vous, utopistes systématiques, qui faites abstraction de la nature humaine, fauteurs d'athéisme, nourris de chimères et de haines, émancipateurs de la femme, destructeurs de la famille, généalogistes de la race simienne, vous dont, naguère, le nom était une injure, soyez contents ! vous aurez été les prophètes et vos disciples seront les pontifes d'un abominable avenir.

 

(1) Le comte de Serre, par M. Ch. de Lacombe, Correspondant du 10 septembre 1879.

(2) Pline, Ad Trajan. imper., Traj. imp. ad Plin. epist. liber, XCVII.

(3)Voy. sur l'infaillibilité, sur le Syllabus, sur le Concordat, sur les Articles Organiques, l'Église et l'État au concile du Vatican, par M. Emile Ollivier. Voy aussi Où est l'ennemi? par un ancien membre des Assemblées françaises.

(4)Oraison funèbre d'Anne de Gonzague.

(5)Chambre des députés, séances des 5 et 7 juillet 1789.

(6) Le professeur Raupach.

(7)Vie et oeuvres de Mme Swetchine, t. II, p. 199.

(8)  Sainte-Beuve, Nouveaux lundis, t. III, p. 95-90.

(9)Sermon pour la fête de l'Epiphanie.

(10)  Moniteur du 14 juin 1849.

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II

 

Soit ! disent nos adversaires les plus modérés ; au point de vue pédagogique, les lois de 1850 et de 1875 ne donnent prise à aucune récrimination : nous sommes forcés d'en convenir ; mais les catholiques manquent à la fois de patriotisme et de libéralisme; nous ne pouvons donc tolérer leur immixtion dans l'éducation.

Les catholiques manquent de patriotisme !

Cette accusation n'est pas sérieuse et vous-mêmes, au besoin, vous en feriez justice !

L'ancienne France, fille aînée de l'Église, a été, d'âge en âge, agrandie ou défendue avec le sang et par l'épée des plus fervents chrétiens. Les maréchaux de l'empire ne trouvaient pas les conscrits de la Vendée inférieurs à leurs autres recrues. Dans nos derniers désastres, qui a surpassé les zouaves pontificaux, Charette, Bouillé, Cazenove et leurs amis ? Qui n'a point admiré le dévouement sexagénaire du marquis de Coriolis et au marquis de Coislin ? Et la Moricière ! Si Dieu nous l'avait conservé, qui ne le voit, rugissant comme un lion, bondir à la frontière pour rejoindre à tout hasard, à tout prix, ses anciens compagnons d'armes? Et les soeurs de charité dans les ambulances ? Et les héroïques brancardiers du frère Philippe? Tout cela, vous l'avez vu ; on vous l'a éloquemment rappelé (1) ; il est inutile de le redire. Non, votre préoccupation n'est pas là.

Ce que vous redoutez, c'est que l'éducation politique soit donnée par d'autres que par vous ; ce que vous craignez, ce n'est pas qu'on élève sous vos yeux une génération vaillante, charitable, ce n'est pas là votre souci ; mais  une génération hésitante ou hostile au point de vue de ce faisceau d'idées que vous nommez improprement les conquêtes de la Révolution ; une génération qui caresse un autre idéal que la Convention et qui ne se passionne pas exclusivement comme vous, pour tout ce qui, vrai ou faux, bon ou mauvais, porte le millésime révolutionnaire. Oui, des dissidences existent parmi les Français; de graves problèmes sont posés.

Mais ne vous y trompez pas ; c'est l'affaire des hommes et non pas des enfants. Laïques ou congréganistes, les collèges n'y peuvent rien.

Vous croyez qu'en s'emparant de l'enfance,  on s'empare de la nation (2) ? c'est une erreur capitale. La génération élevée par le monopole est-elle donc unanime ? M. Taine comprend-il la Révolution comme M. Mignet? M. Henri Martin et M. Michelet la peignent-ils sous les mêmes couleurs que M. Laurentie ou M.Poujoulat ? Il n'y aurait qu'un moyen de vous satisfaire : supprimer, non le collège, mais l'histoire et les historiens. Le voulez-vous ? Pouvez-vous étouffer cet incessant travail, ce perpétuel enfantement de l'esprit humain, cette inépuisable activité de la tribune, de la littérature, du barreau, de la presse, et ce terrible engrenage qui nous saisit tous tant que nous sommes et quelles que soient nos origines ? Oui, c'est bien là le cauchemar de tous les maîtres absolus; oui, c'est le péril, mais c'est aussi le mérite et l'honneur de toutes les libertés. Élèves de l'École normale, élèves des universités catholiques, prenez-en également votre parti. Longtemps encore, chrétiens et libres penseurs, vous vous rencontrerez dans une confuse mêlée. Sous peine d'être les renégats de votre temps, entrez-y avec résolution, les uns par confiance dans la liberté, les autres par confiance dans la vérité.

Ai-je la pensée de nier ou de diminuer l'intérêt fondamental de toute société : l'éducation ? Dieu m'en préserve ! L'éducation de la jeunesse est un intérêt moral de premier ordre ; mais ce n'est à aucun degré ni une arène politique ni un moyen de domination; Cette thèse n'est point ici un expédient de circonstance pour esquiver une difficulté ; je n'entends point rapetisser ma cause afin qu'elle éveille moins d'ombrage. Ce que je me permets d'affirmer aujourd'hui, je l'ai affirmé de tout

temps ; je l'ai soutenu contre mes amis eux-mêmes.

On n'ignore pas que de publiques divisions éclatèrent, il y a vingt-cinq ans, non au sein de l'épiscopat, qui, en grande majorité, demeura en dehors de ces tristes débats, mais dans la presse catholique. Ce n'est pas l'heure de raviver ces souvenirs : ils ont un côté fâcheux ; ils auraient peut-être un côté utile ; en tout cas, j'ai à cœur de les éviter aujourd'hui.

Je ne rappellerai donc une page de 1856 que pour donner à mon opinion son antériorité et par conséquent son caractère de sincérité. A des catholiques qui voulaient, contrairement au conseil de Bossuet, « non conduire les gens au bien, mais les y précipiter », et qui semblaient croire, comme la République française, qu'il suffit de s'emparer de l'éducation pour s'emparer de la nation, j'osais dire : « Non, on ne mâtera point la société par le collège, l'homme par l'enfant, et on les placerait bien inutilement dans une sorte de duel permanent l'un vis-à-vis de l'autre. Quelques milliers de jeunes gens d'élite élevés à force de soins et de sacrifices, à l'abri d'une corruption générale, ne parviendraient pas sans miracle à réformer leur patrie. Mais de ces réformateurs eux-mêmes serait-on bien sûr ? Ces jeunes reclus, si laborieusement préservés dans leur adolescence, se préserveront-ils toujours eux-mêmes, une fois arrivés à l'âge et à la liberté d'homme, si tout ce qu'ils rencontrent dans la vie se ligue pour dénigrer les principes de leur éducation ? Quel empire n'exercera pas sur les jeunes gens la crainte de se voir interdire les services publics, l'avancement, les cordiales camaraderies ? Les parents eux-mêmes seront-ils plus que les enfants exempts de cette faiblesse ? Il ne suffit donc pas, pour sauver une nation, que l'éducation des familles d'élite soit irréprochable au point de vue religieux ; il faut aussi que, dans tout ce qui est légitime, l'éducation se mette en rapport avec le milieu social qui attend l'homme au sortir de la jeunesse. Gardons-nous qu'il ait jamais à rougir de ses maîtres, qu'il soit tenté de leur imputer jamais son infériorité dans la magistrature, dans l'armée, dans quelque carrière que ce soit. Élever les jeunes gens au dix-neuvième siècle comme s'ils devaient, en franchissant le seuil de l'école, entrer dans la société de Grégoire VII ou de saint Louis, serait aussi puéril que d'exercer à Saint-Cyr nos jeunes officiers dans le maniement du bélier et de la catapulte, en leur cachant l'usage de la poudre à canon (3). »

« J'en appelle donc hardiment à l'expérience de tous. L'éducation est la grande, l'indispensable initiation à la vie morale, mais elle laisse intacts le choix ultérieur et la préférence finale des opinions politiques. Charles de Montalembert, Henri Lacordaire, Augustin Cochin, étaient élèves de l'Université; plusieurs républicains, fort en vue de nos jours, ont été élevés par les Jésuites. M. de Morny et moi avions suivi les cours du même Lycée à Paris, et je ne me suis pas aperçu, au 2 décembre, que nous eussions embrassé le même parti. Les républicains et les royalistes se querellent dès le collège, et le jeune Cavaignac se levait des bancs d'un lycée impérial pour refuser un prix suspect de bonapartisme. Les opinions politiques se puisent à deux sources : dans la famille d'abord; voulez-vous supprimer la famille? Dans le spectacle que nous présente la société à notre entrée dans le monde, pouvez-vous supprimer les premières impressions du jeune homme et les conclusions qu'il en tire ? Montesquieu, peu préoccupé des effets sur l'âme de l'éducation religieuse, allait plus loin et disait : «Aujourd'hui, nous recevons trois éducations différentes ou contraires : celle de nos pères, celle de nos maîtres, celle du monde. Ce qu'on nous dit dans la dernière renverse toutes les idées des premières (4). »

Si le collège était le régulateur de toute la vie, comment expliquerait-on le contraste frappant qui existe entre deux siècles où l'éducation appartenait exclusivement aux corporations religieuses ? Au dix-septième siècle, tout demeure chrétien ; au dix-huitième, tout devient impie, et cependant ce sont les Oratoriens et les Jésuites qui élèvent successivement la génération du grand règne et la génération de l'Encyclopédie, Voltaire en tête.

Les deux phénomènes s'expliquent de la même façon : par l'aspect différent, par la moralité différente des deux sociétés. A l'aube du dix-septième siècle, saint François de Sales et saint Vincent de Paul hantaient la cour avec le cardinal de Bérulle et M. Olier.

Peu après, sous Louis XIV, le jeune homme sortant du collège voyait la grandeur partout ; son regard passait de Bossuet à Fénelon, de Pascal à Malebranche, de Condé à Catinat ; il entendait cette belle parole du duc de Bourgogne répétée par Saint-Simon : « Les rois sont faits pour les peuples, et non les peuples pour les rois. » C'était le temps où Vauban, réclamant justice à Louvois, lui tenait ce fier langage : « Examinez hardiment et sévèrement, bas toute tendresse ! car j'ose bien vous dire que sur le fait d'une probité très exacte et d'une fidélité sincère, je ne crains ni le roi, ni vous, ni tout le genre humain ensemble (5). » Le théâtre lui-même, le théâtre de Polyeucte et de Saint-Genest, du Misanthrope et d'Athalie, était une grande école. Tout n'était pas irréprochable à cette époque, loin de là; mais du moins, quand la jeunesse avait eu ses désordres, des vieillesses austères et d'admirables morts montaient l'expiation à la hauteur du scandale.

Au dix-huitième siècle, quel contraste ! L'enseignement est toujours dans les mêmes mains, mais, sauf l'enseignement, tout va changer.

L'abbé Dubois s'asseoit sur le siège de Fénelon; la luxure en habit de velours et l'impiété en petit collet s'étalent partout ; trop souvent les revers militaires dénoncent l'incapacité du commandement, et le gémissement de la misère publique accuse les fautes du gouvernement. Le théâtre, à l'unisson, accélère la décadence sociale. Aux applaudissements du parterre, Voltaire (6), prête à Jocaste cette allusion transparente : Nos prêtres ne  sont pas ce qu'un vain peuple pense et, devançant la Révolution, il s'écrie : Je suis fils de Brutus et je porte en mon cœur La liberté gravée et les rois en horreur.

L'aristocratie n'était pas plus épargnée que la royauté ; on était à la veille du Mariage de Figaro.

Une grande voix cependant retentissait encore dans la chaire, et Massillon disait à un roi de neuf ans : « Sire, vous que la main de Dieu, protectrice de cette monarchie, a comme retiré du milieu des ruines et des débris de la maison royale pour vous placer sur nos têtes; vous, qu'il a rallumé comme une étincelle précieuse dans le sein même des ombres de la mort où il venait d'éteindre toute votre auguste race et où vous étiez sur le point de vous éteindre vous-même; vous êtes, vous et les grands, établis pour la perte comme pour le salut de plusieurs... N'oubliez jamais ces derniers moments où votre auguste bisaïeul, vous tenant entre ses bras, vous baignant de ses larmes paternelles, quitta la vie avec joie, puisque ses yeux voyaient l'enfant miraculeux que Dieu réservait encore pour être le salut de la nation et la gloire d'Israël !»

A ce royal enfant, l'orateur présentait courageusement le tableau qu'il avait sous les yeux : « les places occupées par des hommes corrompus!., l'autorité, établie pour maintenir l'ordre et la pudeur des lois, méritée par les excès qui les violent; les astres qui devaient marquer nos routes changées en des feux errants qui nous égarent!., le désordre débarrassé de la gêne même des ménagements; la modération dans le vice devenue presque aussi ridicule que la vertu (7). » Hélas! le prince que saluait ainsi Massillon s'appelait Louis XV! le tableau qu'il venait de tracer fut celui de la France durant soixante ans ! Grand avertissement pour ceux qui veulent mêler la superstition à la fidélité, pour ceux qui croient pouvoir s'affranchir de la sagesse humaine et laisser tout à faire à la Providence!

Louis XVI naissait et régnait trop tard. Qui voudrait soutenir aujourd'hui qu'un enseignement scolaire, quelque irréprochable qu'il fût, aurait suffi pour refouler le torrent et balancer l'indignation ? Il faut donc le répéter, l'éducation de l'enfant demeurera toujours le premier intérêt et le plus impérieux devoir de la famille, mais il ne s'agit point pour cela de préparer ou de combattre la république, de préparer ou de combattre la monarchie. La langue de Cicéron  et celle de Démosthènes, l'histoire grecque et l'histoire romaine, la rhétorique et la philosophie, ce programme classique enfin, toujours le même avec Rollin, avec les corporations religieuses, avec l'Université, tout cela est destiné à former des esprits justes, éclairés, et, s'il se peut, élevés. L'éducation a pour but de former avec soin la droiture et la pureté du coeur, non moins nécessaires à la République qu'à la monarchie; l'instruction et l'éducation ont une seule et même mission : neutraliser le mauvais levain qui fermente dans toutes les pâtes ; vaincre l'ennemi qui naît et grandit avec chacun de nous : le péché originel. Quand le gouvernement applique toutes ses forces à le combattre, il n'est pas toujours sûr de remporter la victoire ; mais si le gouvernement se met d'accord avec le péché originel et devient son complice, alors tout équilibre entre le bien et le mal est rompu ; toute vertu est écrasée dans son germe et la dissolution sociale est imminente. Ah ! n'ayez qu'une crainte en matière d'éducation religieuse, c'est que cette éducation aussi solide, aussi profonde qu'on puisse la donner, ne demeure encore impuissante contre les séductions, les ambitions et les orgueils de la vie! Vous trouvez que les Jésuites ne sont pas assez libéraux : c'est possible. Eh bien ! ramenez-les plus doucement au libéralisme et ne vous plaisez pas à justifier leurs griefs ou leur méfiance. Vous craignez que les catholiques n'aiment pas assez la république ? Condamnez-les à l'admirer ! Renouvelez le dix-septième siècle à votre façon ; offrez de nobles exemples et de beaux modèles aux générations qui vont passer de l'école dans le monde, et les adhésions de toute provenance ne vous manqueront pas. Peu de gens refuseront de rendre à la république ce qui est à la république, quand la république voudra bien rendre à Dieu ce qui est à Dieu (8). Si, au contraire, vous vous obstinez dans une voie différente, si vous voulez exiger la docilité sans gagner les convictions, imposer l'estime sans la mériter, vous faites fausse route, et ceux qui souhaitent le plus de mal à la république ne lui en feront jamais autant que les républicains exclusifs, démontrant que la république ne peut et ne veut vivre qu'à l'aide de la persécution…

 

(1)Voir les discours prononcés dans les réunions privées à Paris par MM. de Mun, Chesnelong, Depeyre et Baragnon

(2)Voir l'article de M. Jules Favre dans la République française du 14 octobre 1879.

(3) Le parti catholique. Ce qu'il a été, ce qu'il est devenu, p. 92

(4)Esprit des Lois, livre IV, chapitre IV.

(5)Histoire de Louvois. par M. Camille Rousset, de l'Académie française.

(6)OEdipe, acte IV, scène première.— Brutus, acte II, scène deuxième.

(7)  Petit Carême de Massillon : Sermon sur les exemples des Grands.

(8)  Voyez le discours du duc de Fitz-James à un comice agricole, Gazette de France du 28 septembre 1879.

 

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Publié le par Rhonan de Bar
Publié dans : #EN FAVEUR DE LA MONARCHIE

DE L'UNITÉ NATIONALE


PAR


LE COMTE DE FALLOUX


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I

 

Vous portez atteinte à l'unité nationale! Voilà l'un des reproches les plus fréquemment adressés aux catholiques, et, selon moi, le plus blessant. Je voudrais examiner ici la valeur de cette accusation; je voudrais, sans personnalités, sans amertume, rechercher comment notre unité s'est fondée, développée, et, à travers d'inévitables crises, perpétuée.

On a nommé l'histoire la sage conseillère des princes, il faut qu'elle devienne aussi la sage conseillère des peuples, et on peut lui demander aujourd'hui d'éclairer ce grave sujet.

« Nous sommes nés, tous tant que nous sommes, dans une puissante, inclination de faire ce qu'il nous plaît », a dit Bossuet (1). Il aurait pu ajouter : Faire ce qui nous plaît ne nous suffit pas; nous voulons aussi l'imposer à autrui, et, quand nous sommes les plus forts, nous aimons à nous assujettir jusqu'à la pensée du plus faible. La plupart des nations, à leur origine, comptent des vainqueurs et des vaincus, et l'unité se forme alors par les envahissements du vainqueur. Le vaincu disparaît, ou du moins s'efface devant le conquérant, et cela dure autant que dure l'empire de la force', mais souvent ce qu'on avait plié se redresse, ce qu'on croyait mort revit, et l'histoire du monde enregistre presque autant de représailles que de défaites. Ne point exagérer la victoire est donc la meilleure manière d'en user et la plus sûre garantie de sa durée. A la longue, les peuples l'ont compris, et les hommes d'État, dignes de ce nom, ont tenté d'imprimer à la puissance plus de retenue et de modération. Quand ils y ont réussi, ils ont été salués par le respect de la postérité, et c'est un des caractères de notre civilisation que d'avoir de mieux en mieux compris, de mieux en mieux pratiqué les conditions de l'unité moderne, en nous conduisant, d'étape en étape, de l'unité nationale dans la contrainte à l'unité nationale dans la liberté.

En cela, comme en tant d'autres choses, la France a été une grande initiatrice. Le royaume très chrétien fondé par une conversion, éclairé par des apôtres, gouverné, illustré par des évêques, eut d'abord le christianisme pour inspiration de ses progrès. Charlemagne et saint Louis en furent les législateurs et les héros. Jusqu'au seizième siècle, l'unité nationale se confondit avec l'unité catholique.

Quand éclata le protestantisme, l'unité ne se laissa point attaquer et briser sans résistance ; le sang coula ; la guerre religieuse, la plus douloureuse et la plus funeste de toutes, porta partout la désolation et ne recula point devant l'appel à l'étranger. La France huguenote invoqua l'aide des Anglais et des Allemands ; la France catholique invoqua le secours de l'Espagne et de l'Italie. Le meurtre prit toutes les formes, même les plus odieuses, et ce fut à bout d'efforts et de luttes que les deux partis commencèrent à écouter les hommes qui imploraient une trêve et qui parlaient de tolérance. Michel de l'Hospital fut à la tête de ceux-là (2). Secondé par des coeurs généreux, par des esprits élevés, le Chancelier fit entrevoir, à travers les passions déchaînées, les solutions pacifiques; mais, comme tous les précurseurs, il vit souvent ses conseils méconnus ; il mourut dans la disgrâce, et quand Henri III, chef d'une ligue qui était l'organisation régulière de la guerre civile, fut frappé d'un coup de poignard, le beau royaume de France se trouvait à la veille d'un démembrement. La loi même de la succession au trône était contestée; on proclamait un monarque in parti bus, et le légitime héritier mettait cinq ans à gagner de batailles en négociations, de traits de courage en traits d'esprit, de traits d'esprit en traits de bonté, l'incomparable et impérissable nom d'Henri IV.

Une fois maître de son royaume, assurément par droit de conquête autant que par droit de naissance, ce prince avait une belle occasion pour s'accorder à son tour les jouissances du despotisme ; il lui était bien aisé de prendre son épée pour sceptre, de tirer une éclatante revanche de la Saint-Barthélémy et d'humilier les catholiques devant les souvenirs du protestant; il lui était également aisé de renier le protestantisme qui lui avait coûté si cher et de se jeter dans la réaction catholique qui lui avait ouvert les portes de Paris ; mais ni l'une ni l'autre de ces extrémités ne pouvait tenter un prince modèle accompli du capitaine et du politique. Il repoussa toutes les suggestions de la colère ou de la rancune, considéra les deux camps comme les deux moitiés de la France, les unit d'abord dans son coeur de roi, puis, les forçant à vivre en paix, il promulgua l'Édit de Nantes.

L'unité française en fut-elle compromise?

Cette magnanimité était-elle une imprudence ? Etait-ce un nouveau germe de discorde ou le terme de soixante ans d'anarchie? La réponse à cette question est écrite partout.

L'Édit de Nantes prit aussitôt et gardera le titre de grande pacification; il produisit un apaisement soudain et fécond. Il explique et résume tout le règne d'Henri IV, ce règne qui, dans sa plénitude, dura seize ans à peine et qui laissa dans l'âme des peuples un souvenir qui n'a pas d'égal. Son successeur politique fut le cardinal de Richelieu. Ce prince de l'Église proposa-t-il à Louis XIII de déchirer l'Edit de Nantes? Non, pas même en face d'exorbitantes prétentions et d'attentats à main armée. La Rochelle appela encore l'étranger à son aide. Le baron de Chantal, fils de sainte Jeanne de Chantal et père de Mme de Sévigné, fut tué de vingt-sept coups de pique en repoussant les Anglais descendus dans l'île de Ré. C'était bien là un péril pour l'unité nationale; cependant le cardinal de Richelieu, satisfait de la répression, répudia la vengeance. Il réduisit les protestants au devoir, non à la servitude ou à l'extermination.

Le maréchal de Gassion, élève de Gustave-Adolphe, vit accueillir ses services, et près du grand Condé décida de la victoire de Rocroi. Turenne, neveu du prince d'Orange, pouvait être tenté par une haute fortune en Hollande; la liberté religieuse lui fit préférer la France, et il avait atteint déjà le comble de la renommée, lorsque lentement, volontairement, il abjura le protestantisme pour devenir l'exemple du chrétien, comme il avait été l'exemple de l'homme de guerre. Fléchier, prononçant son oraison funèbre, put lui appliquer ce verset des Saintes Ecritures : « Tout le peuple le pleura amèrement, et, après avoir pleuré pendant plusieurs jours, ils s'écrièrent : Comment est mort cet homme puissant qui sauvait le peuple d'Israël? »

Le soleil de Louis XIV inclinait vers son couchant, lorsqu'on parvint à ramener ce prince à l'idée de l'Unité selon le despotisme ; l'édit de son glorieux aïeul fut révoqué. Grande faute, dans ce grand règne, trop inaperçue par les plus illustres contemporains, et, depuis, presque universellement déplorée. On n'avait voulu ni prévu la persécution ; on y fut conduit cependant. L'émigration protestante dépassa toutes les prévisions; elle porta au delà de nos frontières une science, une industrie, qui firent plus d'une fois défaut à la mère-patrie, des ressentiments qui lui causèrent plus d'un préjudice.

Les effets en ont survécu même à l'ancien régime, et, dans la première moitié de notre siècle, le descendant d'un des proscrits de 1685 présidait les conseils de la Prusse. Cent années de silence et d'apparent oubli ne cicatrisèrent point cette plaie. Louis XV n'y fut pas plus sensible qu'à tout autre grief de la justice et de l'opinion, mais Louis XVI s'en émut. Turgot et Malesherbes, ses premiers conseillers, qui, malgré l'inévitable influence de leur siècle sur leurs vues, auraient peut-être sauvé la monarchie si on leur en avait laissé le temps, cultivèrent dans le coeur du jeune monarque la pensée d'une équitable réconciliation entre tous ses sujets : l'état civil fut rendu aux protestants. Beaucoup, parmi les bannis, acceptèrent avec reconnaissance le bienfait et se hâtèrent de rentrer en France; mais le souvenir de la souffrance et de l'injure demeura dans l'âme de quelques-uns, et ce souvenir se retrouve en traces visibles dans l'histoire de la Révolution. Est-ce donc l'Édit de Nantes ou sa révocation qui avait compromis l'unité nationale?

Nos institutions sortirent du creuset de 89, les unes pures de rouille et d'alliage, les autres anéanties ou transformées dans des conditions sur lesquelles l'expérience n'a point encore prononcé. La Constituante, se jetant imprudemment dans une mission qui n'était pas la sienne, voulut donner au catholicisme une constitution civile qui plaçait le clergé français entre l'apostasie et la résistance. Le résultat de cette folle entreprise fut de conduire à l'échafaud les membres du clergé dont elle n'avait pas fait des renégats ou des émigrés. Les mécomptes de la Constituante devinrent les fureurs de la Convention. Que ne se préoccupait-on alors de l'unité nationale? Deux cents ans auparavant on versait le sang pour la religion, en 93 on versa le sang contre la religion ; les rôles furent renversés, mais la tyrannie qui change de drapeau ne change pas pour cela de caractère. Les massacres de Septembre et le long règne de la Terreur firent pâlir les horreurs du seizième siècle. La protestation ne pouvait se faire attendre : la Vendée en eut l'immortel honneur; elle fut vaincue, mais point domptée. L'occasion eût paru belle à un esprit vulgaire pour en finir avec le vieux culte, avec ce qu'on appelait, alors comme aujourd'hui, la vieille superstition; mais Bonaparte en savait plus long que les médiocres déclamateurs, et il ne s'arrêta même pas devant la répugnance opiniâtre de quelques-uns de ses compagnons d'armes. L'homme de génie qui allait tirer des ruines du passé la société de l'avenir, commença son œuvre réparatrice par la restauration religieuse.

La première chose qu'il voulut faire et qu'il fit; le grand acte qui, à l'égal de la victoire, lui rallia le plus de suffrages et lui donna le plus de prestige, fut la réouverture des églises.

Le Consulat est, de l'aveu de tous, la belle page de l'histoire de Bonaparte ; il eut vraiment alors la grandeur du coup d'oeil, de l'énergie et de l'impartialité ; il eut le mérite toujours rare de voir plus vite et plus loin que la plupart de ses contemporains; il ne sépara point sa propre grandeur de la grandeur de la France ; il ressaisit d'une main sûre les éléments dispersés de l'existence d'un grand peuple, et cette clairvoyance souveraine se traduisit en deux conceptions qui demeureront les plus justes titres de sa renommée : le Concordat et le Code civil.

Le Concordat, ce fut la vie morale rendue à la France ; le Code civil, ce fut la société moderne tirée du chaos révolutionnaire pour vivre et pour durer. Les articles organiques sont promptement tombés en désuétude; ils n'exprimaient pas la véritable pensée de leur auteur, un historien bonapartiste l'affirme aujourd'hui ; ils ne représentaient qu'une concession forcée et n'avaient pour but que de faire accepter le Concordat lui-même (3). Le Code civil a été amélioré dans quelques articles ; il peut l'être encore, mais cette double conception, promptement devenue presque aussi européenne que française, n'en a pas moins pénétré nos moeurs. La société catholique était calmée, parce qu'elle était rassurée sur sa foi. La Vendée avait eu deux pacificateurs, Hoche et le Concordat. La société  civile était satisfaite, non parce que chacun entrait en possession de ce qu'il avait préféré ou rêvé, mais parce que l'unité nationale avait rencontré un organisateur puissant. A partir de ce jour, la France reprit sa marche ascendante, et Napoléon put tomber sans emporter avec lui aucun des grands lambeaux de la vitalité française. Infidèle à sa première sagesse, il a plus que personne contribué à la destruction de sa propre grandeur; il n'a pu toutefois entamer le granit de ces deux principaux monuments : l'architecte a péri, l'œuvre a survécu.

Après l'Empire, la Restauration inaugura la liberté politique; le gouvernement de 1830 l'a développée après l'avoir compromise; mais ce qui s'est maintenu, ce qui s'est fortifié par les épreuves mêmes, c'est le sentiment de l'unité par la liberté. La patrie a fait comme la famille, elle n'a plus reconnu ni aîné ni cadet; elle a traité tous ses enfants sur le même pied ; elle a laissé à chacun le soin de sa vocation, le libre essor de ses aptitudes et une égale part dans l'héritage commun. Elle n'a plus cherché le lien social dans la subordination de tous à quelques-uns, mais dans le respect de la conscience de tous et dans la plus grande somme pour tous du bien-être général. Cela peut donner lieu d'un côté à des regrets inutiles, d'autre part à des convoitises exagérées, mais du moins cela ne fait plus de doute pour personne, et si l'unité française est aujourd'hui plus inattaquable que jamais, c'est par là.

Dans un grand pays protestant qu'on aime à citer, la tolérance a suivi une marche plus lente, mais elle n'en est pas moins arrivée au même terme. L'Angleterre nous avait devancés et nous a toujours surpassés dans la pratique du régime constitutionnel ; pour la liberté religieuse, nous lui avons donné une leçon dont elle a fini par profiter. Henri VIII et Marie Tudor voulurent imposer, par des supplices trop semblables, leur foi si différente.

Le dernier mot de la tyrannie restant au protestantisme, l'Irlande acheta par trois siècles de martyre l'honneur de se personnifier dans O'Connell, tribun qui devint libérateur parce qu'il portait en lui-même toute la modération et toute l'énergie du chrétien.

O'Connell émancipa son pays et sa religion ; par lui les catholiques prirent leur place dans le parlement anglais, non comme des ennemis, mais comme des frères loyalement réconciliés.

La proscription légale ne disparut pas seule, les préjugés mêmes s'évanouirent; les trois royaumes purent réellement et sincèrement s'appeler les Royaumes-Unis, et récemment un Irlandais catholique, sous-secrétaire d'État au ministère de la guerre, entrait, pour prix de ses services, à la Chambre des lords, sous le titre de lord Emly. L'unité anglaise, comme l'unité française, a été bien servie par la liberté religieuse s'alliant à la liberté politique; les mêmes exemples et les mêmes idées font leur chemin dans toute l'Europe. La Suisse y revient, la Prusse entrera forcément dans la même voie, si elle veut garder et fortifier sa prépondérance en Allemagne ; et si la Russie consent à faire pour la Pologne ce que l'Angleterre a tant hésité à faire pour l'Irlande, elle en recueillera les mêmes fruits.

Quant à la France, l'éducation publique était restée en dehors des évènements de 1814 et de 1830. Un malaise latent existait à cet égard sans s'accuser hautement. Le monopole subsistait; mais faire, comme l'avait imaginé le fondateur de l'Université, des moines ou même d'honnêtes célibataires sans la religion, est une entreprise au-dessus des forces humaines. L'esprit et les bonnes intentions

de M. de Fontanes y échouèrent.

L'évêque d'Hermopolis, l'évêque de Beauvais, M. de Vatimesnil, tentèrent de nouveaux efforts ; aucun ne réussit complètement. C'est alors que se produisirent les premières réclamations en faveur du droit des pères de famille.

La liberté d'enseignement avait été inscrite dans la Charte de 1830 sans beaucoup de réflexion et plutôt comme figurant avec bonne grâce dans une nomenclature générale de toutes les libertés; mais ce point de départ constitutionnel servit bientôt à d'ardentes revendications et devint promptement une sérieuse préoccupation de l'opinion publique.

La Révolution de Février trouva les choses en cet état. Avec son habituelle sagacité, M. Thiers ne tarda pas à comprendre la portée de cet évènement soudain ; il sentit que la notion du pouvoir avait subi un rude échec et que, si l'on n'y cherchait pas un contrepoids moral, la France pouvait être rapidement précipitée dans les abîmes ; il ne craignit pas de se l'avouer à lui-même et de professer franchement que l'état démocratique en général, que l'état républicain en particulier, a besoin du frein religieux et qu'aucune pénalité, qu'aucune mesure répressive, allât-elle jusqu'à la déportation, ne peut remplacer, chez un peuple maître de lui-même, l'intime discipline du coeur et de la volonté.

Les radicaux affectent de dire qu'à cette époque l'esprit de M. Thiers fut étrangement troublé et que son éminent bon sens lui fit alors défaut. Rien n'est moins vrai; jamais M. Thiers ne se montra plus manifestement homme d'État; ses discours, durant cette période agitée et périlleuse, furent ceux d'un véritable ami de son pays, et sa fermeté égala sa clairvoyance. Ceux qui ont le droit de critiquer son oeuvre, n'ont pas le droit d'en méconnaître le caractère et le succès. La loi de 1850 fut son ouvrage le plus durable, le seul durable peut-être. Il s'est trompé dans e rêve caressé de sa jeunesse, la Révolution de 1688 transportée d'Angleterre en France; il s'est trompé sur l'Egypte; il s'est trompé sur la coalition qu'à coup sûr il n'avait point formée pour M. Guizot et qui ne profita qu'à M. Guizot ; il s'est trompé sur la campagne des banquets qui, dans sa pensée, devait aller à peine jusqu'à M. Odilon Barrot et qui ne s'arrêta qu'à M. Ledru-Rollin. Sur tous ces points, l'évènement lui infligea un douloureux démenti.

La leçon de 1848, du moins, ne fut pas perdue pour lui comme pour quelques autres; il ne voulut pas non plus qu'elle fût perdue pour la France. Non, M. Thiers ne s'est point laissé entraîner par une passagère frayeur. Non, il ne s'est pas trompé sur la nécessité de résoudre enfin par la liberté les questions d'éducation laissées depuis quarante ans dans le faux ou dans le vide : il ne s'est point trompé sur la nécessité d'armer, autant qu'on le peut, d'une forte conviction religieuse, les générations appelées à se mesurer désormais avec toutes les épreuves, toutes les tentations de la liberté. Il ne s'est pas plus trompé sur la loi de 1850 qu'Henri IV sur l'Édit de Nantes, que Napoléon sur le Concordat (4). La gloire est moins grande parce que les difficultés furent moindres, mais le service rendu n'en est pas moins digne de la reconnaissance nationale. M. Thiers n'eut point, comme Henri IV, à faire plier des hommes encore haletants des ardeurs du champ de bataille et qui ne connaissaient, ainsi que leur siècle, d'autre noblesse et d'autre ambition que celles du soldat. M. Thiers n'eut pas non plus, comme le premier Consul, à dompter des révolutionnaires encore sanglants des meurtres de 93 ; il n'eut point à faire ouvrir les portes de Notre-Dame par des jacobins encore amoureux de la déesse Raison. Il ne trouva devant lui qu'une révolution effrayée d'elle-même, un parti conservateur mûri par ses propres revers, un épiscopat exemplaire, pacifique et calme, un pape que n'alarmait aucun esprit libéral. Cependant, pour rapprocher ces éléments, pour les coordonner, pour les fondre dans une loi, il fallait une sûreté d'intuition et une autorité qui s'imposât. On peut donc affirmer, malgré le tumulte actuel, que ce fut là le point culminant de la carrière de M. Thiers, parce que ce fut son acte le plus désintéressé. Jusque-là il avait involontairement confondu l'esprit d'opposition et l'esprit de gouvernement; il avait cédé à des irritations jalouses qui lui avaient fait dépasser le but ou méconnaître le péril; souvent il avait gâté par l'impatience ce qu'il eût pu mener à bonne fin par le sang-froid. En 1849, en 1820, il fut, sinon supérieur à lui-même, du moins véritablement lui-même; aucune brigue personnelle, aucune compétition de pouvoir n'étant en jeu, il ne consulta plus que son patriotisme et le patriotisme étincelait en lui quand il n'était pas voilé par l'égoïsme.

C'est d'ailleurs par l'irrécusable témoignage des faits que la loi de 1850 peut se défendre. Elle fonctionne depuis vingt-neuf ans ; quelle plainte a-t-elle soulevée parmi les hommes spéciaux et les juges compétents ? Quel conflit s'est élevé entre l'Université et le clergé, soit à Paris, soit en province, soit dans le Conseil supérieur de l'instruction publique, soit dans les conseils départementaux? Tout au contraire, les liens d'estime et de confiance réciproques se sont de jour en jour resserrés, et les deux émules ne se sont jamais rendu plus de justice qu'en se voyant de près dans une action commune.

Et voilà ce qu'en pleine paix des esprits et des consciences, vous venez attaquer brusquement, violemment, outrageusement! Quoi! l'unité nationale s'est, depuis trois siècles consolidée par la liberté : elle n'a été passagèrement troublée que par le despotisme, et vous, vous, la République d'apaisement et d'avenir, vous reniez les traditions de la liberté pour recommencer le néfaste travail de tous les depostes ! Quoi ! le seizième siècle a pu faire vivre en bonne harmonie Sully et le

P. Cotton, et le dix-neuvième ne pourrait souffrir, côte à côte, sous le même ciel, le Rationalisme et la Foi ! Malesherbes a su devancer son temps, et vous voulez faire rétrograder le nôtre ! Le premier Consul a signé le traité de paix de la République française avec Pie VII, et vous ne pouvez pas le pratiquer avec Léon XIII ! Le duc de Wellington a mis sa main dans la main d'O'Connell, et vous ne pouvez pas laisser la vôtre dans celle de M. Thiers! M. Guizot tenait à honneur de recevoir le P. Lacordaire à l'Académie, et vous, à deux pas de la Roquette et d'Arcueil, vous poursuivriez à outrance tout ce qui porte un nom ou un habit religieux !

 

(1)Sermon pour une vêture.

(2)Voy. Des Luttes religieuses au seizième siècle, par le vicomte de Meaux.

(3)L'Église et l'État au concile du Vatican, par M. Emile Ollivier.

(4)Dans la République française du 14octobre 1879, M. Jules Favre attribue aux champions de la Société de Jésus l'assimilation de la loi de 1850 à l'Édit de Nantes. M. Jules Favre se trompe : ce rapprochement est d'un champion déclaré de la société moderne, le P. Lacordaire.

 

A suivre.

Comte de Falloux.

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En l'année 1715, à l'heure où le Soleil de France se meurt, le Marquis de Dangeau, l'un des fidèles du Roi Louis XIV note avec beaucoup d’émotion les instants qui sont comptés. Je ne donne ici qu’un bref aperçu de ceux-ci.

Les Editions Lacour se chargeant bientôt de les faire renaîtrent. Le Roi, fatigué des affres de la Cour de Versailles, s’est retiré au Château de Marly-le-Roy, une monographie est aussi à paraître aux mêmes Editions courant d’année 2012.

Louis XIV fut à la foi courtisan, courtisé, batailleur et dévot...sur son déclin. Louis XIV fut à la hauteur de la France, Louis XIV fut La Lumière parmi les ombres qui déjà, sournoisement, couvraient de leurs ailes impudiques le Royaume.   

 

 

MÉMOIRE


DU MARQUIS DE DANGEAU


SUR


CE QUI S'EST PASSÉ DANS LA CHAMBRE


 

DU ROI  PENDANT SA MALADIE (1).

 

 

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 Rosace de la Chambre du Roi louis xiv.

chateau de marly-le-roy (source bnf).

 

 

Dimanche 25 août 1715, à minuit, dans mon appartement dit château de Versailles. Je sors du plus grand, du plus touchant et du plus héroïque spectacle que les hommes puissent jamais voir.

Il y a plus de deux mois que la santé du roi commençoit à s'affoiblir et qu'on s'en apercevoit, mais comme il agissoit à son ordinaire, qu'il se promenoit, alloit à la chasse et faisoit des revues de ses troupes, je n'en mets le commencement qu'au mercredi 1 d'août, parce que la veille il donna audience de congé à l'ambassadeur de Perse et se tint debout pendant toute l’audience et quoique dès le soir il avancé d'une heure celle de son souper, qui n'étoit jamais qu'à dix heures, il me paroissoit pas assez malade pour qu'on dû craindre pour sa vie.

Des le samedi 10, qu'il revint de Marly, il était si abattu et si foible, qu'il eut peine à aller, le soir, de son cabinet à son 1-prie-Dieu; et le lundi qu'il prit médecine et voulut souper à son grand couvert, à dix heures, suivant sa coutume, et ne se coucher qu'à minuit, il me parut en se déshabillant un homme mort. Jamais le dépérissement d'un corps vigoureux n'est venu avec une précipitation semblable à la maigreur dont il étoit devenu en peu de temps; il sembloit, à voir son corps nu, qu'on en avoit fait fondre les chairs.

Hier samedi 24 août, qui étoit le onzième jour de la maladie du roi, S. M. soupant en public dans sa chambré à coucher, comme elle avoit fait depuis le mardi, 13 du môme mois, elle se trouva plus mal, et ayant eu une assez grande foiblesse âpres souper, S. M. demanda à se confesser, et le fut sur les onze heures du soir mais ayant un peu dormi ce matin. S M. s'est trouvé encore assez de force et de courage pour faire entrer le public à son dîner. Comme c'est aujourd'hui là Saint-Louis, qui est le jour de sa fête les tambours sont venus lui donner des aubades. Elle les a fait avancer sous son balcon pour les entendre mieux, parce que son lit en est assez reculé et les vingt-quatre violons et les hautbois ont joué pendant son dîner, dans son antichambre (2), dont il a fait ouvrir la porte pour les entendre mieux. La petite musique, qu'il avoit accoutumé depuis quelque temps d'entendre sur le soir chez madame de Maintenon et depuis très-peu de jours dans sa chambre, étoit prête à y entrer sur les sept heures du soir, quand S. M., qui s'etoit endormie, se réveilla avec un pouls fort mauvais et une absence d'esprit qui effraya les médecins et qui fit résoudre à lui donner sur-le-champ le viatique, au lieu que S. M. avoit la veille, en se confessant, déterminé d'entendre la messe à minuit et d'y communier.

Le roi, revenu de l'embarras qu'il eut dans l'esprit près d'un quart d'heure après son réveil et craignant de retomber dans un pareil état, pensa lui-même qu'il devoit recevoir le viatique sans attendre plus longtemps, et comptant de ce moment qu'il lui restoit peu d'heures a vivre, il agit et donna ordre à tout comme un homme qui va mourir, mais avec une fermeté, une présence d'esprit et une grandeur d'âme dont il n'y a jamais eu d'exemple. Le cardinal de Rohan, grand aumônier de France, accompagné de deux aumôniers de quartier et du curé de la paroisse de Versailles (3), ont apporté le viatique et les saintes huiles, un peu avant huit heures, par le degré dérobé par lequel on entre dans les  cabinets de S. M. (4); et cela s'est fait avec tant de précipitation que cette pieuse et triste fonction devoit être faite avec plus de décoration pour le moindre citoyen.

Il n'y avoit que sept ou huit flambeaux, portés par les frotteurs du château et par deux laquais du premier médecin et un laquais de madame de Maintenon. Le cardinal de Rohan portoit Notre-Seigneur, et le curé les saintes huiles. M. le duc d'Orléans et ceux des princes du sang (5) qui ont été assez tôt avertis ont accompagné Notre-Seigneur et, pendant qu'on l'alla querir, toutes les princesses et leurs dames d'honneur sont venues par les derrières dans l'appartement du roi, où les grands officiers de sa maison se sont rendus aussi. Il n'y est point entré d'autres personnes. Les prières pour le viatique et les cérémonies de l'extrême-onction ont duré plus d'une demi heure.

Les princes et les officiers de la maison qui se sont trouvés les plus proches de la chambre du roi y sont entres pendant tout ce temps-là j mais les princesses sont demeurées dans le cabinet du Conseil (6).

 

Les princes et plusieurs des grands officiers ont reconduit Nôtre-Seigneur, Dès qu'il a été hors de l'appartement, madame de Maintenon qui avoit été toute l'après-dînée dans la chambre du roi est sortie de l'appartement, conduite par le duc de Noailles, et S. M. a en môme temps fait apporter sur son lit une petite table et a écrit de sa main quatre ou cinq lignes sur la quatrième page d'un codicille qu'il avoit fait et dont les trois premières étoient remplies; et il n'y eut pendant ce temps-là, dans sa chambre que M. le chancelier (7), la porte qui donne dans le cabinet dit conseil étant demeurée ouverte et les courtisans auprès de la porte en dedans du cabinet. Pendant que le roi écrivoit, Madame de Maintenon est rentrée et s'est mise à la ruelle la plus éloignée de la porte du cabinet (8), en sorte qu'on ne la voyoit point. Dès que le roi a eu fini d'écrire, il a demandé à boire, et les courtisans les plus près de la porte ont avancé deux ou trois pas dans la chambre, à la vue du roi, dont le rideau du lit, du côté de la cheminée et de la porte du cabinet, étoit ouvert. S. M., ayant jeté les yeux sur le maréchal de Villeroy, l'a appelé avec une voix si forte qu'elle n'avoit rien d'un mourant, et lui a parlé pendant un demi-quart d'heure; le maréchal est rentré dans le cabinet tout baigné de larmes. Après le maréchal de Villeroy, le roi a appelé M.Desmaretz (9), et lui a parlé pendant une ou deux minutes. S.M a pris ensuite un bouillon, et après elle a appelé M. le duc d'Orléans, et lui a parlé pendant près d'un quart d'heure. Le duc du Maine, qu'elle avoit aussi demandé en même temps, étant retourné dans son appartement, il n'est venu qu'après que le discours que le roi a fait au duc d'Orléans a été fini.

 

  (1) Le manuscrit de ce Mémoire est indique dans la «Bibliotheca Hohendorfiana, ou Catalogue de la bibliothèque de feu M. Georges-Guillaume, baron de Hohendorf, dans son vivant colonel des cuirassiers an service de S. M. Impériale et Catholique, gouverneur de la ville et de la châtellenie de Courtrai, et commandant des  gardes à cheval de S. A. S. le prince Eugène de Savoie, etc. » (La Haye, 1720, 3e partie, page 268). La Bibliothèque historique de la France, par le P. Lelong (tome II, page 609,de l'édition de 1769), «lit que ce Mémoire est aujourd'hui dans la Bibliothèque impériale » et c'est en effet à la Bibliothèque Impériale de Vienne que se trouve encore sous le n° 6861 ce manuscrit. Nous en devons la copie que nous reproduisons à M. le comte de Monti de Rezé.

Pour qui voudra comparer ce récit éloquent et plein de coeur, dans lequel la vérité éclate à chaque mot aux pages romanesques de Saint-Simon, composées vingt-cinq ans après la mort de Louis XIV, le document que nous publions aura une véritable valeur historique et littéraire! Saint-Simon s'est servi du Journal de Dangeau et lui a emprunté des passages entiers ; mais il n'a pas connu ce Mémoire, dont le manuscrit se trouvait déjà hors de France à l'époque où il rédigea ses additions, puis ses Mémoires.

Lefebvre de Fontenay, l'un des continuateurs du Mercure galant3 a donné en supplément au Mercure d'octobre 1715 un Journal historique de tout ce qui s'est passe depuis les premiers jours de la maladie de Louis XIV jusqu'au jour de son service à Saint-Denis. Toute la partie relative à la maladie de Louis XIV a été prise par Lefebvre dans le Mémoire de Dangeau,

qui lui avait été communiqué probablement par l'auteur. Nous avons déjà eu occasion de signaler les relations de Dangeau avec les auteurs de la Gazette et du Mercure. Mais Lefebvre a profondément modifié dans la forme et dans le fond le récit de Dangeau, et l'on jugera de sa manière par le préambule de son Journal « Voici pour les lecteurs le plus grand le plus touchant et le plus héroïque spectacle, etc. » En outre, Lefebvre a supprimé tout ce qui pouvait, dans le manuscrit de Dangeau, déplaire au nouveau gouvernement du régent. Nous noterons seulement quelques-unes des différences qui existent entre les deux récits de Dangeau et de Lefebvre. L'appartement de Dangeau a Versailles se trouvait au deuxième  étage de l'aile du Midi ou des Princes, sur l'emplacement occupé aujourd'hui par l'extrémité de. la galerie des Portraits (n" 167 de la notice des peintures et sculptures composant le Musée impérial de Versailles par Fini. Soulé. –2e partie, 1855), par la salle n° 168(portraits anglais) et par la voussure delà galerie des batailles, du côté de l'escalier des Princes.

(2)C'est le salon de l’œil-de-bœuf auquel on ne donna ce nom que sous Louis XV.

(3) Claude Huchon. 

(4) Ce degré dérobé a été remplace sous Louis XV par la pièce qui porte au premier étage le nom de cabinet des Chasses. Le salon des pendules et la pièce qui devint plus tard la chambre à coucher de Louis XV formaient sous Louis XIV ce qu'on nommait les cabinets du roi. Ces pièces se trouvant derrière l'appartement du roi, on disait des personnes qui y étaient admises qu'elles entraient par les derrières dans sa chambre au lieu de passer par les devants, c'est-à-dire par la salle des gardes et l'antichambre.

(5)Les princes du sang autres que le duc d'Orléans étaient Louis-Henri de Bourbon (Monsieur le Duc), duc de Bourbon, prince de Condé, né en 1092.

Charles de Bourbon-Condé, comte de Charolais né en 1 760.

Louis-Armand de Bourbon, prince de Conti, né en 1095.

Louis-Auguste de Bourbon, duc du Maine, né en 1670.

Louis- Alexandre de Bourbon, comte de Toulouse, né en 1678.

Nous né mentionnons pas les jeunes princes des maisons d'Orléans, de Condé, de Conti et du Maine, qui, comme on le verra plus loin, ne furent pas appelés, à cause de leur âge.

(6)Le cabinet du Conseil se trouvait à la place qu'occupe encore aujourd’hui la salle dite du Conseil, mais cette pièce était alors séparée en deux parties la partie la plus' rapprochée de la chambre du roi était le cab.net du Conseil ; l'autre partie, donnant sur une petite cour, se nommait le cabinet des Perruques.

 

(7) Daniel-François Voisin.

(8) C'est-à-dire dans la ruelle du côté de l'Oeil de Bœuf ; les courtisans étant dans la salle du Conseil ne pouvait voir Madame de Maintenon.

(9) Nicolas Desmaretz, Marquis de Maillebois, contrôleur général des finances.

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LA


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LA SOLUTION 

 

…La période écoulée de 1830 à 1848, est la seule où on ne fut pas obligé de rebrousser chemin après avoir marché en avant. On avançait lentement, c'est vrai, mais on allait sûrement, et sans la Révolution malheureuse de 1848, il est plus que probable que notre progrès libéral serait beaucoup plus accentué qu'il ne l'est aujourd'hui. Nous aurions accompli les diverses étapes que nous avions à parcourir sans les secousses terribles que nous avons subies, et qui n'ont servi qu'à nous éloigner du but que nous avons à atteindre.

Le lendemain du 24 Février, s'ouvre pour notre histoire une nouvelle parenthèse, dans laquelle sont enregistrées ; la Journée du 15 mai, celles de Juin 1848 et celle du 13 Juin 1849. Vient ensuite le Coup-d'État du 2 décembre 1851, qui clôt la deuxième phase républicaine.

La période du second Empire, a incontestablement donné à la France, pendant un certain nombre d'années, un immense éclat. Mais, malheureusement, sa fin nous a plongés dans un abîme si profond, que nous devons faire tous nos efforts pour oublier cette page de notre histoire!

Nous arrivons à la troisième phase républicaine. Nous ne savons hélas! que trop, ce qu'elle nous coûte, d'argent, de larmes et de sang!...

Au milieu de nos désastres et des conditions barbares qui nous sont dictées par le vainqueur, Paris apparaît ceint d'une belle auréole. Les puissances Européennes sont prises d'une grande sympathie pour notre malheureuse capitale que l'ennemi n'a réduite que par la famine. Son prestige commence à décroître avec le résultat des élections de la Seine du 8 février. Le 18 mars, et le règne de la sanglante Commune, en font un objet de réprobation pour le monde entier.

La République étant l'oeuf dont l'éclosion a produit la hideuse orgie communeuse, nous ne pouvons pas comprendre que tout Français aimant son pays et jouissant de toutes ses facultés mentales puisse entendre, encore, prononcer sans frémir ce mot de République.

Depuis le 20 septembre 1792, jour où la Convention prononça l'abolition de la Royauté et proclama la République, plusieurs gouvernements se sont succédés en France; nous allons examiner dans quelle situation chacun d'eux a laissé le pays à la cessation de son mandat.

A l'expiration de la première phase républicaine, la France est désorganisée, ruinée, et dans un état complet d'abattement. La venue de Napoléon est acclamée comme une voie de salut.

A la chute du Premier Empire, le pays est épuisé d'hommes et d'argent et sa situation est au moins aussi précaire que lorsque Bonaparte s'empara du pouvoir. De plus les armées coalisées foulent notre territoire. La nation exténuée par vingt ans de guerre réclame à tout prix, les bienfaits de la paix.

L'avènement de Louis XVIII est accueilli avec un grand enthousiasme, sous la restauration la France se réorganise administrativement et financièrement, elle cicatrise ses plaies profondes et reprend son rang dans le concert européen, Charles X en quittant le trône laisse la nation régénérée et ne demandant qu'à être bien dirigée pour reprendre le premier rang parmi les grands peuples.

Sous le règne de Louis-Philippe la prospérité intérieure de la France prend un développement considérable sous tous les rapports.

Aussi, après la révolution de février ceux qui se sont emparés du pouvoir trouvent-ils le pays dans une situation on ne peut plus florissante.

Au coup d'Etat du 2 décembre 1851, la France est terrifiée par les commotions violentes qu'elle a eues à subir, et entrevoyant avec effroi l'avenir, elle se jette affolée dans les bras de Louis-Napoléon Bonaparte qui met fin à la troisième phase républicaine.

Le 4 septembre, date de la chute de Napoléon III et de l'inauguration de la deuxième phase républicaine nous ployions déjà sous le poids d'une dette écrasante, nous n'avions plus d'armées et notre territoire se trouvait envahi par les hordes prussiennes.

Le gouvernement de la défense Nationale continue à nous plonger de plus en plus dans l'abîme, il accroit notre dette d'environ trois milliards et termine son mandat par la convention du 28 janvier nous obligeant à céder à la Prusse deux de nos plus belles provinces et à lui payer une indemnité de guerre de cinq milliards. De plus, comme encouragement a persévérer dans la voie républicaine, nous avons eu la douleur de subir pendant 70 jours les sanglantes saturnales de la commune.

Ce court exposé démontre, d'une manière péremptoire, que, depuis 1792 jusqu'à ce jour, les deux seuls gouvernements sous lesquels la France au lieu de péricliter ait prospéré, sont ceux de là branche ainée et de la branche cadette des Bourbons.

Le comte de Chambord est le seul et unique représentant de la branche aînée avec lui s'éteindra cette illustre famille pour laquelle nous devons tous avoir le plus grand respect. Car elle avait fait de la France une grande et puissante nation, Ce prince est malheureusement en proie aux mêmes errements que Louis XVI et Charles X. Il s'obstine comme eux à avoir les yeux fermés à la lumière, n'est-ce pas être aveugle, en effet, que de ne pas vouloir compter avec le mouvement national qui s'est opéré depuis 1789.

Nous sommes obligés de nous incliner respectueusement devant la loyauté irréprochable du comte de Chambord, ses manifestes sont empreints d'une honnêteté sans égale. Mais cela ne suffit pas. Il faut être de son temps, et surtout ne pas froisser les aspirations de la grande majorité de la nation sur laquelle on voudrait être appelé à régner.

La branche cadette est très nombreuse, le comte de Paris fils ainé du feu duc d'Orléans en est le chef.

Que peut-on dire de cette grande et noble famille? Louis-Philippe n'a-t-il pas laissé en 1848, la France dans un grand étal de prospérité? Le duc d'Orléans dont la mort prématurée fut un deuil vraiment national, n'a-t-il pas, dans son testament, donné une preuve irrécusable de son amour sans bornes pour sa patrie? Le fils d'un tel homme doit avoir indubitablement hérité des vertus paternelles !

Maintenant, qu'elle a été la conduite des princes depuis la révolution de février, époque à laquelle ils ont dû quitter le sol français qui les avait vu naître ? Se sont-ils mêlés au moindre mouvement politique capable de compromettre la sécurité du pays? nous savons tous le contraire.

Sous l'Empire se sentant pris de la nostalgie française, ils réclament l'abolition des lois d'exception qui les frappent injustement. N'ayant jamais forfait à l'honneur, ils demandent à être assimilés au dernier des citoyens français. Quelle voie emploient-ils pour formuler leur juste revendication? Ils adressent purement et simplement une pétition au Corps législatif. On ne croit pas devoir faire droit à leur réclamation; ils se soumettent, sans mot dire à la décision de ceux qu'ils ont choisis pour juges.

La guerre éclate; aussitôt ils mettent de côté tous les ressentiments excusables qu'ils peuvent avoir contre leur persécuteur qui cependant fut traité par leur père avec une mansuétude sans égale. Ils oublient tout pour n'avoir qu'une seule pensée, qu'un seul amour au coeur.

La France. Ils demandent à l'Empereur, comme une faveur exceptionnelle, de pouvoir offrir leur sang à la patrie commune. Nouveau refus. Le 4 septembre a lieu, Tous ces nobles coeurs, pensant que le nouveau gouvernement va faire du salut du pays sa seule et unique préoccupation, accourent se ranger sous l'étendard de la France. Les Membres du Gouvernement de la défense nationale, qui veulent d'abord sauver leur République, et la France après si la chose est possible, regardent la venue des princes, au milieu d'eux, comme un danger et ils s'empressent de les éconduire. Craignant d'être un ferment de discorde, au moment où la nation a besoin de se serrer en un faisceau puissant, ils retournent, l'âme navrée, sur la terre d'exil, M. le duc d'Aumale a eu la douleur dans une circonstance aussi solennelle de

ne pas pouvoir mettre au service de sa patrie l'épée qu'il avait noblement portée jadis. A un moment donné, n'y tenant plus, le Prince de Joinville revient en France et parvient en cachant son identité à se faire admettre, comme simple soldat, dans un bataillon de volontaires.

Il fait le coup de feu toute une journée. Sa joie est à son comble, il expose ses jours pour sa France bien aimée !

Son bonheur ne devait pas être de longue durée! Il fut reconnu, et Gambetta fut instruit de sa présence dans l'armée. Ce dernier s'empressa d'ordonner son arrestation et son expulsion du territoire, nous laissons aux gens de bien ayant le coeur vraiment français le soin de juger la conduite du dictateur de Bordeaux, dans cette circonstance. Tout le monde connaît la noble attitude du duc de Chartres qui a été assez heureux sous le nom de Robert Lefort pour passer inaperçu dans l'armée du général Chanzy.

Il est urgent que, dans le plus bref délai possible, nous ayons, à notre tête, un gouvernement capable de nous assurer à l'intérieur, l'ordre et la reprise du travail, base de notre richesse et de notre résurrection, et qui, à l'extérieur, donne des garanties suffisantes de stabilité pour permettre aux puissances européennes de se rapprocher de nous et d'accepter ou de rechercher notre alliance. Il faut, pour que nous puissions reprendre notre rang dans le grand concert des nations, que nous cessions d'être un épouvantait constant par nos discussions intestines et que nous ne continuons pas à être isolés comme des parias.

La forme républicaine nous permettrait-elle d'atteindre le but dont nous ne devons par nous écarter un seul instant? nous ne le croyons pas : Toutes les puissances européennes, à l'exception de la Suisse, sont régies par des gouvernements monarchiques. Les souverains de ces états, tiennent non seulement à leur couronne, mais encore font tous leurs efforts pour en assurer la transmission à leurs descendants, il est donc indubitable, qu'ils regarderont, toujours, comme un danger, l'existence, au milieu d'elles, d'un grand état gouverné par un régime qui les menace constamment d'envahir leur royaume, et qui à un moment donné peut briser le sceptre qu'ils tiennent dans la main. En un mot avec la République il n'y a pas à compter sur de sérieuses alliances.

Si nous ne venions pas de subir les désastres dont nos yeux devraient être épouvantés, si nous étions libres de tous nos mouvements, pourrions nous, peut-être, nous permettre de renouveler les essais qui en d'autres temps plus prospères, ont déjà été infructueux. Mais, nous avons l'ennemi sur notre territoire, épiant nos moindres mouvements, nous avons une dette énorme à acquitter, nous avons deux provinces qui nous ont été arrachées violemment et dont les habitants ont constamment les yeux tournés vers nous. Nous est-il permis dans une situation pareille de nous obstiner à vouloir rester dans un complet isolement ! évidemment non : nous devons mettre l'affranchissement de la France au-dessus de nos plus chères aspirations, pénétrons-nous bien de la vérité dépouillée de tout artifice, et ne nous laissons pas éblouir par des mirages trompeurs.

Sachons prouver au monde qui nous observe que nous sommes toujours un grand peuple et que grâce à notre puissante vitalité nous saurons sortir régénérés du creuset du malheur.

 

FIN DE L’OUVRAGE.

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LA


SOLUTION


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LA MONARCHIE


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LA SOLUTION 

 

…Voyons maintenant ce qu'ont fait les membres du gouvernement de la défense, après leur installation à l'Hôtel—de-Ville? Jusqu'aux deux ou trois jours qui ont précédé l'arrivée des Allemands sous Paris, ils ont savouré, dans une douce quiétude, leur avènement inespéré au pouvoir, ils ont comblé tous leurs favoris et tous les membres de leurs petites cours, qui chaque jour les encensaient, mais, des prussiens, il n'en était nullement question. Cependant, lorsque la présence de ces derniers fut signalée officiellement à quelques lieues de la capitale, il fallut sortir de cet état de somnolence dans lequel ils se complaisaient. On se décida à envoyer précipitamment une délégation gouvernementale en province, afin de surexciter la fibre nationale de ses habitants. Cette délégation, qui par sa jeunesse, sa vigueur, son entrain, devait faire sortir des armées de dessous terre, était composée de MM. Crémieux et Glais-Bizoin.

Sitôt après leur installation à Tours, les deux vétérans de la démocratie envoient dépêches sur dépêches, pour annoncer que l'enthousiasme qu'ils ont soulevé est indescriptible, que la France entière est debout, attendant, avec une impatience fiévreuse, l'heure de se mesurer avec l'ennemi. Vers le 8 ou le 10 octobre, c'est-à-dire vingt jours après que Paris était isolé du reste du monde, et 35 jours après le 4 septembre, le gouvernement de la capitale reçut une dépêche lui faisant connaître, d'une manière exacte, la situation de la province: Celle missive, arrivée par voie de pigeon, annonçait que pas un régiment n'était formé, que chaque ville organisait sa propre défense, mais que pas une mesure d'ensemble n'était prise.

Tous les bataillons de la mobile qui avaient un commencement d'organisation avaient été appelés dans Paris.

Les membres du gouvernement de la défense furent atterrés par cette communication à laquelle ils auraient dû s'attendre.

Après délibération, on décida que le fougueux Gambetta se dévouerait à rattraper par une activité dévorante, le temps peut être irréparable, qui avait été perdu. Il fallait affronter les périls d'un voyage en ballon. Après deux jours d'hésitation et de préparatifs, le jeune Ministre de l'Intérieur se décida à enjamber la nacelle d'un aréostat et à se confier aux caprices des vents.

Tout le monde connaît les péripéties du voyage et les dangers courus par M. Gambetta.

Il est incontestable que l'arrivée de cet homme descendant pour ainsi dire, des nues, produisit une grande impression sur les populations de la province. Ajoutez â cela, la mâle et puissante éloquence du jeune tribun et on comprendra que sa venue ait été saluée par un vif enthousiasme. On se rappelait Carnot organisant la victoire et on voyait en Gambetta un nouveau sauveur.

Les fautes commises le lendemain de la révolution du 4 septembre s'enracinèrent plus vivaces, encore, dans la conduite du nouveau dictateur. Il crut que son intelligence et son génie pouvaient tout embrasser et qu'il était de taille à sortir tout seul, la France de l'abîme dans lequel elle était plongée. Il inonda l'administration et l'armée d'une foule d'intrigants et d'incapables, les discours et les proclamations pleuvaient avec une intensité sans égale, il brisait, sans hésitation, le lendemain les généraux qu'il avait exaltés la veille. Il autorisa des emprunts, à des taux pouvant abaisser notre crédit au-dessous de celui du pays le moins favorisé de  la fortune. Il poussa même l'aberration jusqu'à concevoir des plans stratégiques et à imposer sa volonté à ses généraux.

Avec toute cette activité dévorante, le dictateur français parvint à mettre en ligne devant l'ennemi, environ trois cent cinquante mille hommes de troupes d'une valeur douteuse, (nous ne disons pas au point de vue du courage mais au point de vue de l'instruction militaire,) qui aboutirent aux désastres du Mans, de Saint-Quentin, d'Héricourt, et par contre coup à la capitulation de Paris.

Si, au lieu de fouler aux pieds, sans respect ce à quoi l'Empire autoritaire n'avait jamais osé toucher, le Dictateur de Bordeaux s'était servi des forces vives du pays.

Si au lieu de dissoudre les Conseils municipaux et les Conseils généraux issus du Suffrage universel, pour les remplacer par des Commissions formées avec ses créatures, il avait su inspirer une salutaire confiance à ces assemblées, il aurait pu, indubitablement, avec leur concours, obtenir une issue plus favorable pour nos armes.

Vers le 17 septembre, lorsque les têtes de colonnes allemandes font leur apparition aux environs de Paris, M. Jules Favre se rend mystérieusement à Ferrières, à la rencontre de M. de Bismark. Cette démarche faite le lendemain du désastre de Sedan, aurait eu sa raison d'être : elle était même indispensable. Mais que pouvait-on attendre d'un ennemi implacable, enivré de ses succès inespérés et qui se trouvait devant l'objet de toute sa convoitise ! Il était arrivé, sans coup férir, sous les murs de notre Capitale dans laquelle il espérait entrer en triomphateur et nous dicter notre arrêt de mort.

A quoi ont servi les larmes du membre du Gouvernement de la défense nationale ? pouvait-il avoir la pensée de loucher, par nos malheurs, l'homme qui depuis longues années, avait prémédité notre anéantissement!

Pouvait-il croire à une intervention des neutres qui nous étaient plus hostiles que sympathiques ? Lui était-il permis d'avoir l'espoir d'arrêter la marche triomphale des armées allemandes, sans donner à leur chef une compensation capable de satisfaire son puissant appétit et son immense orgueil? Evidemment non! Hé bien! Pourquoi avoir commis cette faute capitale de prononcer la fameuse phrase « pas un pouce de terrain, pas une pierre de nos forteresses ! »

Quelle doit être la mission des édiles d'une ville assiégée? Il nous semble que le premier travail auquel ils doivent se livrer, c'est de se rendre un compte exact, de concert avec l'autorité militaire, de la quantité de vivres qu'il y a en magasins, afin de savoir, pendant combien de temps la place pourra résister, si l'ennemi ne cherche pas ou ne peut pas s'en rendre maître de vive force.

Une administration sage et prévoyante doit, aussi, dès le premier jour de l'investissement, présider économiquement à la distribution des denrées alimentaires pour faire durer la résistance, le plus longtemps possible, et ne pas imposer aux habitants de trop cruelles privations.

Qu'a fait M. Ferry membre du Gouvernement, délégué auprès de la mairie de Paris ? Nous sommes encore à nous le demander. Tout ce que nous savons, c'est qu'il y a eu, pendant longtemps un gaspillage scandaleux des vivres eu réserve.

Ce désordre coupable nous a conduit à manger le pain dont tous ceux qui étaient enfermés dans la Capitale ont gardé le souvenir, et à nous mettre, à un moment donné, à la complète discrétion de notre vainqueur.

On devait réellement espérer d'avantage, de la part de l'auteur des comptes fantastiques d'Hausmann, On ne pouvait pas croire que cet administrateur ne parviendrait seulement pas à organiser, d'une manière convenable, à la distribution des denrées alimentaires.

Nous avons eu la douleur d'assister à l'affligeant spectacle des queux interminables à la porte des bouchers et des boulangers. C'était navrant de voir de malheureuses femmes et des enfants rester quatre et cinq heures les pieds dans la neige ou dans la boue pour obtenir leur part de cheval et de pain. Nous ne croyons pas que les souffrances matérielles endurées à l'Hôtel—de-Ville aient été bien vives !

M. Jules Ferry montait à cheval et allait, en compagnie de son collègue et ami Rochefort, passer en revue les fameux bataillons de Belleville, sur lesquels on comptait pour enfoncer les lignes prussiennes, mais, qui envoyés aux avant-postes prenaient la fuite à la première alerte. Ces mêmes bataillons faisaient les journées du 31 octobre et du 22 janvier, prologue de la grande pièce qu'ils devaient représenter le 48 mars.

Après l'issue malheureuse de la sortie du 19 janvier, le Gouvernement de la défense nationale à Paris, eut connaissance des échecs subis par nos armées de province.

Chanzy, après le désastre du Mans, avait été obligé de se retirer derrière la Mayenne, il était condamné, pour un certain temps au moins, à l'immobilité. Faidherbe, après sa défaite de Saint-Quentin, avait ses forces désorganisées.

La débâcle d'Héricour avait forcé l'armée de l'Est à se réfugier en Suisse pour ne pas tomber aux mains de l'ennemi.

Tout espoir de secours venant du dehors était perdu, de plus, le stock de farine restant en magasins, pouvait à peine suffire à l'alimentation de la population pendant quelques jours. Toute idée de lutte devant être abandonnée, il n'y avait que deux partis à prendre : exposer les habitants de la Capitale à mourir de faim, ou aller implorer la bienveillance du vainqueur. Le Gouvernement s'arrêta à cette dernière détermination, et ce fut M. Jules Favre qui, 4 mois auparavant, avait fièrement lancé la fameuse phrase « pas un pouce de terrain, pas une pierre de nos forteresses, » qui eut la triste mission d'aller se mettre à la discrétion du comte de Bismark.

Quelles cruelles souffrances a dû éprouver le Ministre des affaires étrangères, lorsqu' il lui a fallu subir et signer, au nom de la France, les lourdes conditions aux quelles le chancelier Allemand consentait à nous accorder l'armistice.

Ainsi, une fois les clauses de la convention acceptées de part et d'autre, Paris était entouré d'un cercle de fer, tous les forts étant au pouvoir de l'ennemi. Notre Capitale et l'armée qu'elle renfermait étaient lettres mortes pour la nation, nos trois armées de province étaient démoralisées, et en partie désorganisées. Que restait-il donc pour faire face aux masses ennemies, d'autant plus fortes, qu'elles étaient enivrées de leurs victoires ?

M. Gambetta, malgré notre situation précaire, voulait continuer la lutte à outrance, jusqu'au dernier homme et au dernier écu. On ne peut pas s'imaginer qu'une pareille folie ait pu germer dans un cerveau humain.

La résistance organisée par le Ministre de la Guerre de la délégation provinciale, avait produit de si beaux résultats, qu'il était tout naturel qu'il persistât à la continuer.

La France pouvait être dévastée et anéantie totalement, mais qu'est-ce que cela pouvait faire au fougueux Ministre! Il fallait, à tout prix, conserver le pouvoir et satisfaire son ambition sans bornes. Nous ne pouvons pas nous faire à l'idée qu'après l'accomplissement de tels actes, il se soit trouvé en France, des hommes assez peu soucieux de l'honneur et de l'existence de leur pays pour avoir nommé à l'Assemblée nationale le Dictateur de Bordeaux, Quelle devait être la conduite de M. Gambetta après s'être démis du pouvoir, et une fois l'Assemblée nationale installée à Bordeaux.

Nous croyons que le premier devoir que l'ex-dictateur avait à remplir, était de venir à la Barre de la Nation et de lui faire connaître d'une manière précise l'emploi qu'il avait fait du pouvoir, sans contrôle, qu'il avait volontairement assumé sur sa tête, et des ressources financières qu'il avait eues entre les mains.

M. Gambetta a été l'objet de violentes critiques. La France attend encore sa justification. Dans la négociation des conditions de l'armistice, M. Jules Favre a, incontestablement, commis une faute capitale en ne faisant pas insérer dans la convention du 28 janvier, un article relatif au désarmement de la Garde nationale, et en ne demandant pas au comte de Bismark d'en faire une condition sine qua non du traité, Il est évident que les bataillons de l'ordre auraient donné

une nouvelle preuve de leur patriotisme, en se soumettant sans récrimination, à celte mesure rigoureuse mais nécessaire. Quant aux bataillons fédérés, nous avons l'intime conviction que devant des menaces très-énergiques de la part de la Prusse, ils eussent considérablement rabattu de leur humeur belliqueuse.

M. Jules Favre a probablement craint qu'une clause de cette nature insérée dans la convention, ne compromit sa popularité.

Si, comme la chose a été dite, M. de Bismark, durant le cours des négociations, a fait ressortir le danger qu'il y aurait pour Paris, à laisser des armes à la Garde nationale, et qu'il ait offert au Ministre dos Affaires étrangères de faire du désarmement de celle force une des clauses du traité. Le refus de M. Jules Favre (prévu probablement d'avance par le chancelier allemand) est

inexcusable, et les événements qui se sont produits font peser sur lui une responsabilité terrible, devant sa conscience d'abord, et devant l'histoire ensuite dont le jugement sera peut-être un stigmate ineffaçable.

Il était indubitable qu'un mouvement révolutionnaire était imminent. L'insurrection était prêchée ouvertement, depuis six mois, dans tous les clubs où on professait les théories les plus criminelles. Il était impossible de fonder la moindre espérance sur des hommes dont le but avoué était le bouleversement de fond en comble de la société.

Ce n'était pas un désaccord de principes, c'était la question nettement posée : Être ou ne pas être.

Le 18 mars, jour de l'explosion du volcan, les premiers actes des insurgés qui consistent surtout, dans l'assassinat de deux généraux, prouvent les intentions bien arrêtées des chefs du mouvement, démontrent clairement que la lutte est sérieusement engagée et que la force seule tranchera la question.

Nous ne pouvons pas comprendre, que dans une situation pareille, des gens soient venus parler de conciliation et de concessions à faire de part et d'autre.

Ces démarches stériles ne pouvaient avoir qu'un but : servir la cause insurrectionnelle et entraver la défense opposée par le parti de l'ordre. Nous n'hésitons pas à dire que toutes les démarches conciliatrices faites par un certain nombre d'hommes de convictions douteuses ont été criminelles et doivent être flétries énergiquement par tous les gens de bien.

L'intention formelle des bandits formant le Comité central était de conserver le pouvoir dont ils s'étaient emparés, Aussi, toutes les déclarations de M. Thiers, tous les appels faits aux émeutiers pour les engager à rentrer dans l'ordre, sont-ils restés sans résultat ! Il a fallu entrer violemment dans Paris après un siège de près de deux mois, il a fallu s'emparer de chaque quartier, après des luttes sanglantes. Huit jours de combats terribles et incessants ont été nécessaires pour terrasser la sanglante Commune et ses hideux partisans. Leur cri d'agonie a été le massacre des otages et l'incendie de nos monuments nationaux ainsi que d'un grand nombre de propriétés particulières.

En résumant la synthèse historique, que nous venons de faire, des principaux événements politiques qui se  sont accomplis depuis la grande Révolution jusqu'à ce jour : Nous voyons que le 10 août 1792, le mouvement national auquel la convocation des États Généraux avait donné naissance, se trouve enrayé. A dater de ce jour néfaste, s'ouvre une vaste parenthèse pour notre histoire. Dans cette parenthèse, nous trouvons : Les massacres de septembre, la Terreur de 1793, la réaction thermidorienne, le Directoire et l'avènement de Bonaparte qui mit fin à la première phase républicaine, Arrive, maintenant, la première période impériale faisant toujours partie de la grande parenthèse. Napoléon rétablit le principe d'autorité dans toute sa vigueur, seulement le régime militaire absorbe tout.

L'Empereur récolte pour la France, une abondante moisson de lauriers. Quant au résultat final; c'est l'invasion étrangère, le pays épuisé d'hommes et d'argent, c'est-à-dire, dans un état au moins aussi précaire, que lorsqu'il s'était emparé du pouvoir.

En 1815, la nation eût le bonheur de voir monter sur le trône Louis XVIII. Ce souverain sut mettre à profit la grande influence qu'il exerçait sur le tzar Alexandre, pour sauver la France des griffes des vautours alliés. Tous les hommes qui ont le coeur, vraiment français, doivent avoir pour la mémoire de Louis XVIII un respect sans bornes.

Charles X commit la même faute que son aïeul Luis XVI, de ne pas acquiescer franchement au grand mouvement libéral pour en avoir la direction.

Charles X voulut s'opposer au torrent et le torrent l'emporta en 1830.

Le roi Louis Philippe, comprit que l'ère nouvelle qui s'ouvrait pour la France, ne devait être que la continuation du réveil national, auquel le 10 août 1792 avait imposé un temps d'arrêt.

Le nouveau souverain appela à lui l'élite de la bourgeoisie ; cette dernière se trouvant la partie la plus éclairée de la population, devait nécessairement, en vertu des droits qu'elle avait conquis, devenir la classe dirigeante.

C'est en 1830, que les principes de 1789 reçoivent, pour la première fois, une application réelle et sérieuse. Le grand essor est donné, la liberté est la base de toutes nos institutions. Le souverain a franchement accepté le partage du Pouvoir avec le pays, représenté par les Chambres.

Les questions économiques sont à l'ordre du jour, le grand réseau ferré qui doit couvrir la France est accepté et il n'y a plus qu'à en assurer l'exécution. Des écoles s'ouvrent de tous côtés, pour donner au peuple l'instruction nécessaire à son émancipation, et pour permettre à la Bourgeoisie, de trouver, un jour, de puissantes recrues dans ses rangs.

Le commerce, l'industrie, les sciences, les lettres et les arts brillent avec éclat. La fortune publique est dans un grand état de prospérité...

 

A SUIVRE…

ANONYME.

 

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Publié le par Rhonan de Bar
Publié dans : #EN FAVEUR DE LA MONARCHIE

LA


SOLUTION


PAR


LA MONARCHIE

 

Pairie

 

LA SOLUTION 

 

Après la catastrophe épouvantable que vient de subir la France, chacun est à se faire les demandes suivantes :

«que va-t'il sortir de ces désastres et quelle sera la forme gouvernementale assez puissante pour nous assurer l'ordre, la reprise du travail et la cicatrisation de nos plaies encore toutes saignantes ? »

Nous croyons que pour élucider ces questions ardues, il est indispensable de passer en revue tous les gouvernements qui se sont succédé, depuis la grande révolution française jusqu'à nos jours, et de tâcher de baser l'avenir sur les enseignements du passé.

Après la journée du 10 août 1792, le principe d'autorité était mort en France. Les excès révolutionnaires inaugurés par les massacres de septembre et suivis de la terreur de 93, en sont une preuve irrécusable.

La convention était, certes, composée, en majorité, d'hommes honnêtes et ennemis de la violence ; ils furent impuissants à arrêter les débordements du flot populaire et les membres les plus marquants de cette assemblée périrent, victimes de leur dévouaient à la patrie.

S'il était possible d'accorder la plus légère atténuation aux excès, sans nom, de la commune et de la Montagne de la Convention, ce serait en premier lieu, pour leur ardent amour pour la France et leur haine implacable pour leurs ennemis, ensuite, à cause de l'énergie avec laquelle elles soutinrent le principe de la République une et indivisible. (Contraste frappant avec les révolutionnaires de 1871.)

Le régime de la Terreur devait fatalement aboutir à une réaction violente. Elle fit explosion le 9 thermidor de L'AN II. La convention décréta d'accusation Robespierre et tous ses sanglants acolytes, qui expièrent, comme lui, les crimes sans nombre, qui avaient été commis, au nom de la raison d'Etat.

Sous le Directoire, la France était désorganisée administrativement, ses finances étaient épuisées et le gouvernement était impuissant à utiliser les ressources qui existaient dans le pays. La banqueroute était imminente.

Bonaparte, par son coup d'Etat du 18 brumaire, s'empara du pouvoir et se débarrassa, violemment, de tout ce qui pouvait faire échec à son autorité. La nation se trouvant dans la situation d'un navire, sans pilote, qui s'en va au caprice des vents, s'empressa d'accorder toute sa confiance à celui, en qui elle espérait trouver un sauveur.

Le 1er consul s'entoura de toutes les lumières du pays et présida à la réorganisation financière et administrative de la France. Il s'empressa, aussi, de rendre les églises et les temples à leurs cultes respectifs.

Napoléon 1er, sous son règne, porta la nation française à l'apogée de la gloire militaire. La vieille Europe trembla épouvantée mais, l'incomparable guerrier avait compté sans l'instabilité des choses humaines. La fortune qui l'avait comblé de toutes ses faveurs, l'abandonna un jour et l'épilogue du régime Impérial fut : l'invasion étrangère et l'exil, sur un rocher, du Grand Homme prisonnier des monarques européens.

Sous la restauration, la France épuisée d'hommes et d'argent, parvint cependant à cicatriser à peu près ses blessures profondes et à reprendre son rang dans le concert européen. Jusqu'en 1830, l'ordre matériel ne fut pas troublé, malgré l'existence de nombreuses conspirations dont la vigilance gouvernementale sut toujours saisir les fils.

La Révolution de 1830 est très explicable : Le Roi Charles X et ses Ministres, au lieu de marcher dans la voie du progrès et de la liberté, avaient à coeur de rétrograder et semblaient vouloir revenir aux institutions d'avant 1789; aussi, les journées de Juillet, au lieu de jeter la consternation dans le pays, furent elles accueillies comme un acte libérateur!

La chambre des députés, à ce moment là, eut la sagesse de comprendre qu'il y avait danger de tâtonner avec un gouvernement provisoire, c'est pourquoi elle s'empressa de décerner la couronne au Duc d'Orléans. La critique, toujours amère, qualifia cet acte de bonne et sage politique : d'escamotage des deux cent vingt deux.

Le règne de Louis-Philippe, fut pour la France, une époque de paix et de prospérité : Le commerce, l'industrie, les sciences, les lettres et les arts brillaient du plus vif éclat; on jouissait d'une bonne liberté, et l'avenir s'annonçait sous d'excellents auspices.

Le roi était entouré d'une belle et nombreuse famille dont la simplicité et la rigidité des moeurs, donnaient à la nation le plus salutaire exemple.

Paris, toujours capricieux et impatient, sous le prétexte de réforme électorale, et obéissant, comme d'ordinaire, à la voix d'un certain nombre d'intrigants, éprouva le besoin de s'offrir le luxe d'une nouvelle révolution.

Le trône de Louis-Philippe fut renversé et la République proclamée.

La France, moutonnière, n'ayant pas l'énergie de résister aux entraînements de sa capitale, subit le nouveau gouvernement qui venait de lui être imposé.

Une fois revenu de la première impression causée par ces événements subits, chacun acceptant le fait accompli, était décidé à faire abnégation de ses souvenirs et de ses préférences, pour se rallier sincèrement au gouvernement républicain.

Le ciel pur qui s'élevait au-dessus de la France, commença à s'assombrir le 15 mai ; la journée s'écoula, cependant, sans laisser une impression trop profonde à la population. Mais, l'orage s'amoncelait à l'horizon et devenait menaçant : en Juin, il éclata terrible, il fallut quatre jours de luttes sanglantes pour s'en rendre maître.

Le Gouvernement provisoire et l'Assemblée nationale avaient été impuissants à conjurer cette affreuse tourmente.

Le Général Cavaignac qui avait terrassé l'émeute, était appelé le sauveur de la France, comme récompense, on lui décerna la dictature.

Quelques mois plus tard, c'est à dire en décembre, les élections pour la nomination du Président; de la république, avait eu lieu, pour donner au monde qui nous suivait du regard, un exemple frappant de notre ingratitude et de la versatilité de notre caractère, nous nous gardâmes bien de jeter les yeux sur l'homme dont la grandeur d'âme, le courage et la loyauté étaient indiscutables.

Une imposante majorité de citoyens français déclara par son vote; que le fauteuil présidentiel serait bien mieux occupé par le héros de Strasbourg et de Boulogne que par l'illustre général qui avait sauvé la France de l'anarchie.

Après les journées de Juin, on croyait en avoir fini, pour longtemps au moins, avec l'émeute. On eut bientôt la preuve du contraire.

Une année ne s'était pas écoulée, qu'une nouvelle journée se produisait (1). Le mouvement fut arrêté ; mais, les socialistes qui avaient juré une haine implacable à la société, donnaient, comme date de la nouvelle levée de boucliers, l'expiration du mandat de Louis Napoléon Bonaparte dont la réélection était impossible, en vertu de la Constitution.

Le parti conservateur voyait arriver avec effroi cette date fatale s'avançant à grands pas, aussi, adressait-il pétitions sur pétitions à l'Assemblée législative, pour obtenir la révision de la Constitution.

La bonne harmonie était loin de régner entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif, un conflit était imminent.

Le prince président encouragé par les craintes fondées des conservateurs et par les indécisions de l'Assemblée, déchira, une belle nuit, avec l'aide de l'armée dont il avait su s'attirer toutes les sympathies, celte Constitution dont le pays ne demandait que la révision.

Il éloigna tout ce qui pouvait être un obstacle à la réalisation des projets qu'il avait conçus, il terrorisa le parti d'action qui, cette fois, rentra complètement dans l'ombre, pour ne faire sa réapparition que de longues années après.

Le parti conservateur respirait à l'aise, il était débarrassé de l'échéance 1852 qui lui pesait si lourdement.

Lorsque le nouveau dictateur soumit au pays la ratification de l'acte qu'il venait d'accomplir, les 7,500,000 voix qui sortirent de l'urne électorale furent la meilleure expression des sentiments de la population à son égard.

Chaque conservateur pouvait être comparé à un commerçant chancelant dans ses affaires, couvant une faillite inévitable, et que tout à coup une main inespérée vient sauver du naufrage.

Tout ce monde affolé ne calculant pas les conséquences de l'acte qu'il accomplissait, allait déposer dans l'urne son vote approbateur qui donnait au nouveau souverain les pouvoirs les plus illimités.

Nous savons malheureusement, aujourd'hui, à quel prix, l'ordre a été obtenu pendant vingt ans !

Si l'honnêteté la plus rigoureuse avait présidé à tous les actes du gouvernement Impérial, l'empereur aurait pu faire atteindre au pays, le point culminant de la prospérité mais d'une prospérité vraie et non factice, comme celle qui existait et qui a amené des catastrophes aux premiers revers de fortune que nous avons eus à subir.

Pour obtenir ce résultat, il fallait s'entourer d'hommes intelligents, honorables, capables d'un dévouement désintéressé, n'ayant en vue que le bonheur de la nation et non leur intérêt personnel ; d'hommes qui au lieu de patronner les spéculations les plus hideuses qui ont amené la ruine et l'abaissement moral de la France, se fussent fait un devoir de dénoncer à l'indignation publique les spéculateurs éhontés s'appropriant scandaleusement l'épargne du travail, en faisant miroiter à ses yeux un lucre inaccoutumé.

Au lieu de chercher, par tous les moyens possibles, l'amélioration des classes laborieuses, surtout, en donnant soi-même l'exemple de la plus haute moralité.

Qu'ont fait les hommes de l'Empire ? Ils ont encouragé le luxe le plus effréné, ils ont développé, outre mesure, tous les appétits matériels au détriment des besoins intellectuels, et ils ont poussé la population vers une seule idée ; faire de rapides fortunes par tous les moyens échappant à la loi.

Tous les vices inhérents à la nature humaine, à tous les degrés de l'échelle sociale, s'étalaient sans vergogne, aux yeux de tous.

Cette dégénérescence du pays, devait fatalement nous conduire au désastre de Sedan et aux excès les plus criminels de la démagogie !

Nous ne chercherons pas à approfondir les causes qui ont pu amener le gouvernement impérial à déclarer la guerre à la Prusse. Surtout, après le plébiscite de mai dont la signification était : Progrès libéral, mais, avec l'ordre et la paix.

La guerre était difficile à éviter, nous étions un obstacle à l'unification allemande et tôt ou tard, devaient surgir des difficultés qui ne pourraient se régler que par la voie du canon. Ces cruelles nécessités étant données, il fallait se tenir prêt, attendre le moment favorable pour entrer en lice et ne pas, comme un Don Quichotte relever le gant que M. de Bismark a eu l'habileté de nous faire jeter nous mêmes.

Ce départ pour le Rhin est un acte de folie tellement indigne, qu'il est inexplicable.

Notre brave et vaillante armée a été engagée si niaisement que nous avons marché d'échecs en échecs jusqu'au désastre de Sedan.

Le 3 septembre, en effet, le bruit de notre défaite et de la capitulation acceptée par l'empereur, se répandaient dans Paris. L'émotion, l'indignation même, étaient à leur comble. Le chef de l'Etat prisonnier, il fallait prendre une résolution énergique. Le Corps législatif fut convoqué, en séance extraordinaire à minuit. Le Ministère et la majorité de l'Assemblée commirent la faute irréparable de se séparer sans avoir pris une détermination virile, et d'ajourner leur décision au lendemain.

L'opposition qui attendait, depuis longtemps, un événement qui lui permit de jeter à bas son ennemi, ne perdit pas une minute et profita du répit qui lui était donné jusqu'au lendemain midi, pour discipliner ses électeurs de la Villette et de Belleville.

Les bandes de l'émeute étaient à leurs postes à l'heure indiquée, n'attendant que le signal convenu, pour se ruer sur le palais Bourbon.

La cavalerie qui gardait l'entrée du pont de la Concorde, n'ayant pas d'ordres formels et énergiques, laissa à un moment donné, forcer ses lignes par la tourbe populaire qui. n'avait plus qu'une étape à accomplir pour atteindre son but.

Les députés s'étaient réunis dans leurs bureaux pour discuter les mesures qu'il y avait à prendre, en présence de la gravité excessive de la situation.

Sur ces entrefaites, plusieurs personnes se rendent sur le perron du Palais et font signe à la populace de les suivre. En un clin d'oeil, la salle des séances se trouva occupée par les Bellevillois.

M. Gambetta monta à la tribune et prononça la déchéance de l'Empire; il engagea, ensuite, ses coreligionnaires politiques à le suivre à l'Hôtel-de-Ville, ce que ceux-ci s'empressèrent de faire, sans se préoccuper nullement de leurs collègues, issus comme eux, cependant, du suffrage universel.

Arrivés au palais municipal, les citoyens députés de la Seine consommèrent leur coup d'Etat. Ils proclamèrent la République et décrétèrent la dissolution du Sénat et du Corps législatif.

Messieurs les chasseurs se sont rendu maîtres de la proie qu'ils convoitaient depuis longtemps, mais, la meute est frémissante; il faut sonner l'hallali et livrer la France à la curée.

On pourrait croire que les hommes qui en usurpant le pouvoir, se parent du titre pompeux de : «Membres du Gouvernement de la défense nationale,» se sont empressés, sitôt leur installation à l'Hôtel-de-Ville, de prendre des mesures énergiques pour la défense de Paris, objectif des armées allemandes.

On pourrait penser qu'ils se sont préoccupés de la formation de nombreux corps d'armée dans les provinces non encore envahies! Hé bien non! le 4 septembre au soir et les jours suivants le nouveau gouvernement ne s'occupa pas plus de la défense nationale que des agissements du céleste empire.

Quelle devait être l'attitude du Gouvernement de la défense, après avoir assumé, sur sa tête, la responsabilité  au salut de la patrie?

Il devait surtout, en s'inspirant de son titre, bien se pénétrer de la mission qu'il s'était donnée. Pour avoir toute la force morale nécessaire à l'accomplissement de son mandat, il devait grouper, autour de lui, tous les dévouements et accepter tous les concours de quelque part qu'ils vinssent.

Il est de toute évidence que le parti le plus sage qu'il y avait à prendre : c'était la convocation immédiate des électeurs pour nommer une Assemblée nationale qui aurait été l'expression de la France entière et qui constituée, en pouvoir régulier aurait été à même de mettre en mouvement tous les ressorts nécessaires à la défense.

Nous acceptons les faits accomplis : Le Gouvernement ne fera pas appel au Suffrage universel pour constituer un pouvoir régulier, ses membres préférant se réserver le pouvoir qu'ils ont violemment usurpé.

Le Corps législatif et le Sénat sont dissous. Mais, dans ces deux grands corps de l'Etat, il y a des hommes honnêtes qui jouissent, dans divers centres, d'une grande influence. Est-ce que le devoir du Gouvernement de la défense, n'était pas de faire appel au patriotisme de tous ces hommes en leur confiant la mission de faire vibrer la fibre nationale dans leurs départements? Qui sait, si à l'appel de ceux en qui elle avait confiance la province ne se serait pas levée spontanément!

Au lieu de suivre cette ligne de conduite pleine de logique et de sagesse, qu'ont fait les hommes du 4 septembre ? Ils se sont empressés de révoquer, indistinctement, tous les préfets et sous-préfets pour les remplacer par leurs créatures, pour la plupart notoirement incapables et qui de plus étant complètement inconnues aux populations qu'elles étaient chargées d'administrer ne pouvaient exercer sur elles aucune influence salutaire.

Et certes, à ce moment là plus que jamais, il fallait inspirer aux habitants de la province, la plus grande confiance possible, puisqu'on allait leur demander leurs enfants et leur argent.

Les Membres du Gouvernement de la défense ont eu la bonhomie de croire que les départements allaient se lever, avec un enthousiasme indescriptible, à la seule vue de l'étendard républicain. Il fallait, réellement, n'avoir aucune connaissance de ces populations, pour avoir compté, un instant, sur ce résultat.

Pour la province, quelques grands centres exceptés, le mot République était synonyme : d'arbitraire, de désordre et de cahos. Les événements qui se sont accomplis ont, du reste, prouvé qu'elle ne s'était pas trompée dans son appréciation.

Ce qu'il nous faut déplorer amèrement, c'est que Messieurs les Membres du Gouvernement de la défense nationale, aient voulu sauver, à eux seuls, le pays et surtout la République ; car nous n'hésitons pas à dire qu'ils ont mis leur République au-dessus de la France.

A côté des hommes honnêtes et considérables, dont on a eu soin de dédaigner les services, il y avait un parti dangereux par ses exagérations, sa violence, ses menaces réitérées et dont les agissements avaient mis, depuis longues années, la province en suspicion contre Paris.

Le Gouvernement de la défense redoutait un conflit avec les meneurs de ce parti ; aussi, il n'y avait pas de complaisances que l'on eut pour eux. Les quartiers habités par les nombreux soldats du désordre, furent les premiers armés, on leur distribua les meilleures armas et on donna des situations à tous leurs chefs. Avec cette manière d'agir, le jour où il faudrait mettre un terme à leurs exigences toujours croissantes; on devait s'attendre à la revendication, par la force, de ce que jusqu'alors ils avaient obtenu de bonne grâce…

 

(1)    Journée des Arts-et-Métiers 13 juin 1849.

 

ANONYNE.

A SUIVRE… 

 

 

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