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L'Avènement du Grand Monarque

L'Avènement du Grand Monarque

Révéler la Mission divine et royale de la France à travers les textes anciens.

Publié le par Rhonan de Bar
Publié dans : #MAISONS NOBLES DE LORRAINE

DEUXIEME EXTRAIT.

 

ÉLECTION DE LOUIS-RENÉ-ÉDOUARD

PRINCE DE ROHAN

COMME COADJUTEUR DE STRASBOURG

 

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En 1759, le 28 Septembre, le grand-chapitre de la cathédrale de Strasbourg s'assembla pour fixer le jour de l'élection d'un coadjuteur que le prince Louis-Constantin de Rohan avait demandé au pape. Cette élection se fit le 22 Novembre suivant, dans l'église cathédrale, suivant les formes usitées. La messe du Saint-Esprit fut chantée dans la chapelle de Saint-Laurent par le comte Maximilien-Frédéric de Koenigseck-Rotenfels. Les capitulaires, au nombre de sept présents, chargés en même temps de la procuration des absents, réunirent leurs voix en faveur du prince-neveu, Louis-René-Edouard, prince de Rohan-Guéménée, qui fut proclamé le même jour et conduit à l'autel de Saint-Laurent, où l'on chanta le Te Deum.

Cette élection ayant été confirmée par le pape Clément XIII, le 24 Mars 1760, le nouveau coadjuteur fut sacré, le 18 Mai suivant, évêque de Canople. (1)

La reine Marie Leczinska étant morte (24 Juin 1768), ses obsèques furent célébrées dans l'église cathédrale de Strasbourg, le 3 Août suivant. M. le cardinal de Rohan, ainsi que les différents corps ecclésiastiques et laïques, y assistèrent. La grand-messe fut chantée par le seigneur grand-doyen, M. le prince de Lorraine. (2)

 

 

(l) Grandidier. Essais sur la Cathédrale de Strasbourg, p. 190.

(2) Grandidier. Essais sur la Cathédrale de Strasbourg, p. 196.

 

 

MARIE-ANTOINETTE

FIANCÉE DU DAUPHIN (LOUIS XVI)

CHEZ LE CARDIN AL DE ROHAN

 

 

marie-antoinette-vigee-lebrun

Le 7 Mai 1770, l'archiduchesse Marie-Antoinette d'Autriche arriva à Strasbourg, se rendant à Paris, pour être dauphine de France. Elle fut logée au palais épiscopal et reçue avec les plus grands honneurs. On lui fit des fêtes magnifiques qui sont décrites tout au long dans notre ouvrage sur L'Alsace en fète sous la dOl1tÏnation des Louis de France.

Le 8, elle se rendit à la cathédrale pour y entendre la messe. M. le prince Louis de Rohan, coadjuteur de Strasbourg, en habits pontificaux, la reçut à la tête de son clergé et lui adressa un discours plein d'éloquence ct de sensibilité. Nous le reproduisons ici:

 

Par M. le coadjuteur à la porte de la cathédrale de Strasbourg :

 

« Madame,

« Les deux nations réunies dans ce temple s'empressent de rendre d'immortelles actions de grâces au Dieu des empires, qui, par des noeuds augustes et si désirés, va mettre le sceau à leur félicité commune, et cimenter une alliance dont le but a été de protéger la religion et de faire régner la paix.

« Vous voyez l'Alsace faire éclater sa Joie; la France vous attend pour couronner ses voeux, et dans les mouvements d'allégresse qui vont se manifester de toutes parts, reconnaissez, Madame, le même sentiment qui a fait verser des larmes à Vienne et qui laissent dans le coeur de ceux dont vous vous séparez les plus vifs et les plus tendres regrets : c'est ainsi que l'archiduchesse Antoinette est déjà connue, même où elle n'a pas encore été vue; ce n'est souvent que l'avantage de la naissance; pour vous, Madame, c'est le droit de vos vertus, c'est celui de vos grâces; c'est surtout la réputation de ces qualités naturelles et bienfaisantes que les soins d'une mère à jamais mémorable ont su perfectionner en vous. Vous allez être parmi nous la vivante image de cette impératrice chérie, depuis longtemps l'admiration de l'Europe, comme elle le sera de la postérité; c'est l'âme· de Marie-Thérèse qui va s'unir à

l'âme des Bourbons. D'une si belle union doivent naître

les jours de l'âge d'or, et nos neveux, sous l'heureux empire d'Antoinette et de Louis-Auguste, verront se perpétuer le bonheur dont nous jouissons sous le règne de Louis le Bien-Aimé. »

Son Altesse arriva au grand-choeur, au bas duquel se tenaient les Cent-Suisses, en passant au milieu de la haie formée par la troupe. Au pied de l'autel, qu'entouraient les gardes du corps, était placé un prie-dieu pour Mme la dauphine et des tabourets pour les dames de sa cour. Leclergé avait suivi Marie-Antoinette et était allé occuper les stalles du choeur. Le coadjuteur, avant de se mettre sous le dais pontifical, s'agenouilla au pied de l'autel, puis s'étant retourné vers la nef, il donna sa bénédiction.

Une messe en musique fut exécutée. Les derniers accords de la musique expiraient à peine sous la majestueuse voûte du dôme, que les personnes de la cour firent partir Mme la dauphine, sans attendre que M. le coadjuteur fût revenu à l'autel et eût de nouveau donné sa bénédiction. En voyant ce départ précipité, le clergé, qui devait accompagner Son Altesse jusqu'à la porte de l'église, et qui s'était déjà mis en mouvement, s'arrêta et laissa partir Mme la dauphine sans lui rendre les honneurs qui lui étaient dus. 1

Le cardinal de Rohan ajouta quelques mots touchants au superbe discours du coadjuteur, son parent. Voici les paroles prononcées:

 

Par M. le cardinal de Rohan

 

cc Née sur le trône des Césars, vous venez vous unir à celui des Charlemagne ct des Bourbons. L'Europe applaudit à ce lien, la religion se réjouit et l'Alsace ne peut contenir ses transports. Les miens, Madame, sont d'autant plus respectueux, qu'occupant un siège qu'ont illustré deux de vos ancêtres, j'ai l'honneur d'appartenir à l'empire et à la France. »

 

1 Müller L'archiduchesse Marie-Antoinette à Strasbourg, etc., p. 61

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Publié le par Rhonan de Bar
Publié dans : #MAISONS NOBLES DE LORRAINE

III

 

LOUIS-CONSTANTIN DE

ROHAN -GUÉMÉNÉE-MONTBAZON

I756- I 779

 

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ÉLECTION DE LOUIS-CONSTANTIN

PRINCE DE ROHAN

COMME ÉVÊQUE DE STRASBOURG

 

Ès que le grand-chapitre eut fait rendre, dans la cathédrale, les derniers devoirs à l'évêque François-Armand-Auguste cardinal de Rohan-Soubise, mort à Saverne le 28 Juin 1756, il tint (le 1 Août) une assemblée où le jour de l'élection d'un nouvel évêque fut fixé au 23 Septembre.

Cette cérémonie fut annoncée par la grosse cloche qui sonna par trois fois. La messe solennelle du Saint-Esprit fut chantée à 8 heures par M. l'évêque de Tournay. Vers 9 heures, le chapitre, composé de dix chanoines capitulaires présents et chargés de la procuration de deux absents, s'assembla dans le lieu de l'élection. Le choix unanime tomba' sur le grand-prévôt Louis-Constantin, prince de Rohan. Sa naissance, son âge, son expérience et ses vertus le rendaient digne de cette éminente place. La publication ayant été faite dans les trois langues par le grand-écolâtre, le nouvel élu, entre l'archevêque de Rheims, son frère, grand-doyen, et l'évêque de Tournay, précédé de tous les autres chanoines, fut conduit au pied du grand-autel, où l'archevêque de Rheims entonna le Te Deum qui fut chanté en musique. On sonna pendant une heure de temps toutes les cloches de la cathédrale, et on fit une décharge des canons de la place.

-Le prince Constantin fut ensuite conduit au siége épiscopal, où il s'assit. Y étant resté quelque peu de temps, il sortit du choeur le premier, suivi de tous les chanoines, qui le conduisirent au palais épiscopal, où le grand-doyen le félicita par un petit discours en présence du clergé et d'un grand concours de peuple. L'élection fut confirmée par le roi Louis XV le 27 Septembre suivant et par le pape Benoît XIV le 3 Janvier 1757. Il fut sacré le 6 Mars à Paris, dans la chapelle du séminaire de Saint-Sulpice, par le cardinal de La Rochefoucauld, archevêque de Bourges.

Le 24 suivant, M. l'abbé Duvernin, membre du grand-choeur, vicaire-général et official du diocèse, en aumusse et en étole, prit en son nom, dans la cathédrale, possession de l'évêché de Strasbourg. Elle lui fut donnée à l'issue des complies par le prince François-Camille de Lorraine, chanoine capitulaire, en présence du prince Joseph de Hohenlohe-Pfedelbach, aussi chanoine capitulaire, et de MM. Du grand-choeur, tous en habits de choeur placés autour de l'autel.

La cérémonie commença par l'ouverture de la grande porte, dont on lui présenta la clé; par l'entrée de la chaire, où il monta; par les fonts baptismaux dont il toucha l'eau; par 12 trône épiscopal, où il s'assit ct où on lui mit le bonnet carré sur la tête. Elle fut continuée par la prise de possession du palais épiscopal, où il fut mené et installé dans la salle des évêques.

De là, il fut ramené au grand-autel, où l'on finit par chanter le Te Deum. (1).

 

(1) Grandidier. Essais sur la Cathédrale de Strasbourg, p. 187.

 

A suivre... 

Le Roy de Sainte Croix. (Les Quatre Rohan).

 

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Publié dans : #MAISONS NOBLES DE LORRAINE

545px-Blason Armand Gaston Maximilien de Rohan-Soubise (167

II

FRANCOIS-ARMAND-AUGUSTE

DE ROHAN-SOUBISE-VENTADOUR

 

1749-1756.

 

FRANÇOIS-ARMAND-AUGUSTE

DE ROHAN-SOUBISE-VENTADOUR

 

FRANCOIS-ARMAND-AUGUSTE DE ROHAN-SOUBISE-VENTADOUR succéda à son parent Armand-Gaston, en l'année 1749. On ne connaît guère de lui que son épitaphe ..., qui est brillante ...

 

OBSÈQUES DU CARDINAL DE ROHAN-SOUBISE

A SAVERNE

 

Cet évêque de Strasbourg, étant mort le 28 Juin 1756, à son château épiscopal de Saverne, fut inhumé avec les plus grands honneurs et la plus grande pompe dans la chapelle du Saint-Rosaire. Sur sa tombe on grava cette fastüeuse épitaphe:

 

HIC REQUIESCIT

 

Sern1issimus princeps

Armandus de Rohan-Soubise

sanctae romanae ecclesiae cardinalis

Argentoratensis episcopus et prnlceps

Alsatiae Lal1dgravius

Murbacencis el Luderencis abbas ;

princeps sancli imperii… etc.

splendidos natales aequavil titulis

Animo superavit :

Artes egregias quas ultrà coluerat puer

ornavit juvenis.

Rapido progressu Summa consecutus

Academiae Parisiensi ac praesertim Sorbonae.

Praeluxit ingenio, honore praejuit.

Veri et justi tenax

ingenti patruo

Similitudine virtutum commendatus

iisdem in vestigiis

in eâdem statione collacatus

ut episcopatûs

sic acerrimi ecclesiae tuendae studii

successor non degener.

Heu! tanto viro non impar

si non ipso aetatis flore succisus!

in medio cursu laborum

quos pro ecclesiâ susceperat,

Mortem obrepere sentiens

huc ad vos evolavit

o Alsatiae cives,

ut in sinu vestro extremum, spiritum deponeret.

Hunc praecordiis vestris inclusum

Fovet,) lugete, ac precibus apud Deum adjuvate.

 

Obiit die 28 Junii I756) oetatis suce al11ZO 39. (1)

 

(1) Grandidier. Essais sur la Cathédrale de Strasbourg, sup. p. 84.

 

Ce cardinal n'était âgé que de 39 ans lorsqu'il expira.

L'amour qu'il avait toujours porté à son diocèse, et le goût qu'il avait montré de préférence pour l'Alsace, J'avaient engagé à se faire transporter presque moribond de Paris à Saverne où il voulait mourir... A suivre.

 

Le Roy Sainte-Croix (Les Quatre Rohan).

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545px-Blason Armand Gaston Maximilien de Rohan-Soubise (167

 

SEPTIEME EXTRAIT

 

CARDINAUX-ÉVÊQUES DE STRASBOURG

OBSÈQUES DU CARDINAL DE ROHAN

 

En 1749, le 19 Juillet, S. A. S. et E. M. le cardinal Armand-Gaston de Rohan termina il Paris sa longue et brillante carrière en son appartement du Vieux-Louvre, âgé de 75 ans. Son corps fut transporté le 21 suivant au couvent des religieux de la Merci, où il fut enterré d'après son testament du 3 Mars 1748.

cc Ce prince sut réunir dans sa personne des qualités dont on aurait pu former plusieurs grands hommes. Il eut part il toutes les affaires ecclésiastiques de son temps; il présida plusieurs fois aux assemblées de l'Eglise gallicane; il assista il quatre conclaves; il fut chéri des papes et des rois; il aima les lettres et les protégea, et il se distingua dans toutes les circonstances par son zèle pour la religion et pour J'état.

« Je viens de faire, s'écria Louis XV en apprenant la mort du cardinal, une véritable perte dans « la personne du cardinal de Rohan: c'était un grand cc seigneur, un excellent évêque et un bon citoyen. »

« Il avait vécu avec beaucoup de splendeur et de magnificence; mais d'un caractère doux et d'un abord affable, il eut comme particulier toutes les qualités qui rendent les hommes aimables dans la société.

cc Au mois d'Août, M. l'archevêque de Rheims, grand doyen du chapitre noble de la cathédrale de Strasbourg, avait donné, dans la cathédrale même, possession du spirituel de l'évêché ci M. l'évêque d'Uranople, procureur du nouvel évêque, M. le cardinal de Soubise.

« Les services de M. le cardinal de Rohan furent célébrés dans son église cathédrale les 15, 16 et 17 Septembre.

Tout le clergé séculier et régulier y assista en corps et en habits de choeur. M. l'évêque d'Uranople, du consentement du grand-chapitre, célébra pontificalement les trois messes.

Huit abbés du diocèse, ayant à leur tête le prévôt infulé de Neuvillers, tous en mître et en chape; les prévôts et doyens des collégiales du diocèse en soutanes et en manteaux longs, se trouvèrent à cette cérémonie.

cc L'état-major, le magistrat, le corps de la noblesse, le conseil de la régence, la chambre des comptes, les baillis et les autres officiers de l'évêché y assistèrent. M. de Saint-André, commandant de la province, fut placé au milieu du choeur, avec fauteuil et prie-dieu? en sa qualité de représentant du roi. L'oraison funèbre fut prononcée le 15, par le R. P. Louis-Antoine Cuny, de la Compagnie de Jésus. » (1)

Son éloge fut lu à l'assemblée de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, le 14 Novembre 1749, par M. de Bougainville, et inséré dans le tome XXIII des Mémoires de la Compagnie.

Rigaud, le fameux portraitiste, avait fait une superbe peinture du cardinal Armand-Gaston de Rohan, que Caro grava. Une copie photographiée de ce magnifique portrait, exécutée par M. Hippolyte Hoffmann, a été donnée au musée de Saverne (N° 139 du catalogue de 1872)... A suivre

 

 

(l) Grandidier. Essais sur la Cathédrale de Strasbourg, p. 183.

 

 

Le Roy de Sainte Croix ( les Quatre Rohan).


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SIXIEME EXTRAIT

 

LOUIS XV

CHEZ LE CARDINAL DE ROHAN

A STRASBOURG

 

P8140101

 

Façade du Palais des Evêques de Rohan-Soubise à Strasbourg.

 

Le roi Louis XV arrivant de Metz, fit son entrée solennelle dans la ville de Strasbourg le 5 Octobre 1744, au son de toutes les cloches et au bruit de toute l'artillerie des remparts. On lui fit une réception splendide; la magnificence et l'éclat furent portés au plus haut degré durant son séjour qui fut de cinq jours entiers. Le Magistrat, présidé par M. de Klinglin, préteur royal, secondé par tous les corps et tous les habitants de la ville, avait imaginé ce qu'il y avait de plus grand, de plus somptueux pour exprimer sa joie, son zèle, son respect et son attachement au monarque, qui venait d'être surnommé le Bien-Aimé.

Il était 4 heures de l'après-midi, lorsque Louis XV arriva devant le portail de l'église cathédrale. Il descendit de carrosse et fut reçu par M. le cardinal de Rohan, qui était à la tête de tout le clergé séculier et régulier rangé le long de la nef. Le prélat était chapé, crossé et mîtré, ayant à sa droite M. le prince de Soubise, son coadjuteur, et à sa gauche M. l'évêque d'Uranople, son suffragant, l'un et l'autre en chape et en mître, mais sans crosse. Du grand chapitre, il n'y avait qu'un chanoine domiciliaire, M. le prince Camille de Rohan. MM. du grand-choeur étaient en chape et les chapelains en surplis.

Le cardinal-évêque présenta d'abord au roi de l'eau bénite. Le prince Camille posa aux pieds de Sa Majesté un carreau de velours sur un tapis, qu'on avait étendu par terre à l'entrée de la nef. Le roi s'y mit à genoux et baisa la croix. Sa Majesté s'étant relevée, S. A. E. lui fit un très beau discours, qui dura quatre à cinq minutes.

Le clergé se mit ensuite en marche deux à deux pour entrer dans le choeur, qui était orné de tapisseries et dont le grand autel était éclairé par un grand nombre de girandoles portées sur des torchères. La marche était fermée par M. le coadjuteur, auquel le cardinal, son oncle, laissa les fonctions sacerdotales - épiscopales, en se réservant celles de grand-aumônier de France. Le roi marchait ensuite entre M. le cardinal et M. le suffragant. L'un et l'autre avaient quitté la mître et la chape pour se mettre en rochet, camail et bonnet carré. Pendant la marche, le clergé chanta trois fois l'antienne pour le roi, qui fut conduit au pied du grand autel, à un prie-dieu couvert d'un tapis de soie et de velours. Les deux prélats se mirent à genoux ù ses deux côtés, et le roi fit donner un carreau de velours au cardinal de Rohan.

Il n'y eut ni musique ni Te Deum: car il n'y avait que huit jours qu'on avait fait les prières publiques et solennelles pour la convalescence de Louis le Bien-Aimé.

M. le coadjuteur, ayant à ses côtés les quatre plus anciens du grand-choeur revêtus de chapes, monta à l'autel, chanta l'oraison pour le roi et termina la cérémonie par la bénédiction épiscopale. Le roi descendit alors du chœur par l'escalier qui est du côté de l'horloge. Il alla à pied depuis la porte de l'église jusqu'au palais épiscopal qui

était achevé depuis trois ans, et où il logea pendant tout son séjour.

La tour fut illuminée tous les jours. Louis XV partit de Strasbourg le 10 Octobre, pour se rendre au siège de Fribourg. « Je ne puis quitter ce lieu-ci, écrivait ce monarque la veille de son départ à Mme la duchesse de Rohan-Ventadour, sans vous donner de mes nouvelles.

Jamais je n'ai rien vu de si beau, de si magnifique, ni de si grand que ce que je vois depuis que je suis à Strasbourg.

Mais ce qui me fait plus de plaisir que tout, c'est l'affection que les peuples et les grands me témoignent: ils sont aussi bons Français que mes plus anciennes provinces: aussi, je les quitterai à regret » (1)

« Le cardinal de Rohan, en parlant de lui-même, laissait entendre quelquefois, avec une sorte de modestie, qu'il devait avoir quelque ressemblance avec Louis XIV, tant dans la figure que dans le caractère: en effet, Mme la princesse de Soubise, sa mère, était très-belle; l'on sait que Louis XIV en fut amoureux; et l'époque de ce penchant se rapproche de l'année r674, qui est celle de la naissance du cardinal de Rohan. » (2)

 

(1) Grandidier. Essais sur la Cathédrale de Strasbourg, p. 181.

(2) Anecdotes de Louis XIV et de Louis XV, t. II, p. 397.

 

 

LES QUATRE ROHAN

VOL DE L'ARGENTERIE

DU CARDINAL DE ROHAN

 

 

P8140116 Vaisselle des Evêques. Palais des Evêques de Rohan-Soubise à Strasbourg.

 

En 1747, Mme la dauphine arriva à Strasbourg le 28 Janvier. S. E. le cardinal de Rohan n'oublia rien pour faire à cette princesse une réception digne de son haut rang et de sa naissance.

« Or, il est connu que cc prélat avoit une argenterie des plus riches; toutes les ustensiles, même celles de la cuisine, étoient de ce métal. Dans la grande presse, une partie considérable fut volée la nuit et vendue à certain juif. Le jeune préteur (Klinglin), Faber et Faust l'intimidèrent, en lui foisant entendre que le recéleur allant de part avec le voleur, il serait pendu. Il leur donna une grosse somme, qu'ils partagèrent entre eux, le voleur fut célé, l'on n'a pas sçu jusqu'aujourd'huy cc que cette argenterie dérobée est devenue, et la voix publique en parle de trois différentes manières. Faber en a rejeté impertinemment le crime sur les Polonais et les Saxons, qui étoient à la suite de Mme la dauphine, disant qu'ils ne l'avoient prise que pour faire voir dans leurs païs le nouveau goût de Paris. Mais le juif Meyer a été le vray auteur et le directeur de ce vol; et de cette façon, il lui a été facile de paroître deux années de suite en habit de cavalier, chaimarré d'or et d'argent. Le public en eut mauvaise opinion, mais il sçut et sa compagnie dissiper tout soupçon, en le faisant passer pour l'écuïer du jeune préteur, ce qui étoit d'autant plus vraisemblable qu'il vivoit avec lui dans la plus grande familiarité aux yeux du public. » (1)

Le vol de l'argenterie du cardinal de Rohan est raconté d'une manière bien différente par une des parties indirectement intéressées.

C'est le « Mémoire de M. de Klinglin, préteur royal de la ville de Strasbourg » - à Grenoble, chez André Giroud et la veuve d'André Faure, 1753, qui nous en fournira les nouveaux détails.

 

(1) Factum de Beck contre Klinglin, p. 11

 

C'était donc au mois de Février 1747, lors du passage à Strasbourg de Mme la dauphine. Laissons parler M. de Klinglin fils:

« Exerçant les fonctions de préteur à la place de mon père qui étoit malade, j'eus l'honneur de recevoir cette princesse. Dans ce temps-là même, Son Éminence feu M. le cardinal de Rohan me donna avis qu'on avoit volé chez lui de la vaisselle d'argent. Ce prélat ajouta, qu'averti de ce vol, il avoit fait faire secrètement quelques démarches pour tâcher d'en découvrir les auteurs, que Raphaël Lévy étoit violemment soupçonné d'avoir commis ce vol, ou du moins d'en être le recéleur; que les indices qui sembloient justifier ces soupçons, étoient que Raphaël Lévy avoit porté de la vaisselle d'argent à vendre chez le nommé Imling, orphèvre à Strasbourg, et que cet orphèvre avoit refusé de l'acheter, parce qu'il y avoit remarqué des vestiges d'armoiries qui avoient été grattées.

En conséquence de ces indices, M. le cardinal de Rohan me pria de parler à ce juif, et de l'engager à rendre cette vaisselle; mais il me recommanda sur toutes choses de ne faire aucun éclat, et de ne prendre aucune des voyes judiciaires dont on use en pareil cas. Je fis donc venir le juif; j'employai auprès de lui et remontrances et menaces pour le déterminer à la restitution; mais tous mes discours furent inutiles; il se tint sur la négative, en sorte que je fus obligé de le renvoyer. Sur le compte que je rendis à M. le cardinal du mauvais succès de ma tentative, S. E. me pria de m'en tenir là, et me fit même donner parole de ne pas pousser cette affaire plus loin. Ça n'a donc été que par respect pour les ordres de ce prélat que je n'ay point fait dénoncer au Magistrat le vol en question.» (2)

Que le lecteur choisisse entre les deux versions.... A suivre

 

 (2) Mémoire de M. de Klinglin, p. 241

 

Le Roy Sainte Croix (Les Quatre Rohan).

 

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545px-Blason Armand Gaston Maximilien de Rohan-Soubise (167

 

CINQUIEME EXTRAIT

 

LES QUATRE ROHAN

LE CARDINAL DE ROHAN

(ANNÉE I7I6)

 

L'amour dès longtemps confia

Son charmant sacerdoce

A jeune et gracieux prélat

Plus galant que Mendoce

Et dans son temple transféra

Et sa mItre et sa crosse.

A son grand prêtre il prodigua

Ses faveurs les plus chères,

Et fit tant que son nom vola

Sur tout notre hémisphère:

Pape et rois, chacun envia

Le bonheur de lui plaire.

Le diable qui, Adam tenta,

Jaloux de tant de gloire,

Lui fit suivre les Loyola, (l)

Chacun en sait l'histoire;

L'enfant de Cythère en pleura

Dans les bras de sa mère.

Vengeons-nous, mon fils, dit Vénus,

Punissons cet ouvrage;

Pour Melun,(2) de tous le rebut

Inspire-lui la rage,

Et que sans grâce ni vertu

Elle fixe ce volage. (3)

 

1 Pour détacher Rohan du cardinal de Noailles, qui était son bienfaiteur et son ami, le P. Le Tellier le fit nom111er grand-aumônier de France.

2 Mlle de Melun, née en 1671. (M.) Marie de Melun était fille de Guillaume de Melun, prince d’Epinoy, et de Jeanne de Rohan-Chabot.

3 Chansonnier historique du XVIIIe Siècle. Édition QUANTIN. Première partie. II, p. 85.

 

CARDINAUX-EVEQUES DE STRASBOURG

LE CARDINAL ET LA CORNE.

 

Le 17 Mai 1586) l'évêque de Strasbourg, Jean de Manderscheid, avait institué une confrérie de buveurs, sous le titre de Confrérie de la Corne. Les confrères devaient la vider d'un trait, cette corne, et elle était de taille gigantesque. Les étrangers de distinction étaient admis à y tremper leurs lèvres et ce n'était pas un mince honneur.

Cette colossale corne était religieusement conservée au vieux château de Hoh-Barr, sur la montagne qui domine le château de Saverne, résidence de l'évêque de Strasbourg.

Nous avons donné l'historique de la Confrérie de la Corne dans notre ouvrage sur l'Alsace en Fête) où nous renvoyons le lecteur désireux d'en connaître les détails.

La guerre de trente ans avait porté un coup mortel à la Confrérie de la Corne. Le château de Hoh-Barr fut détruit et la confrérie dispersée. Toutefois, la corne fut sauvée de la destruction; elle descendit dans les caves du château de Saverne, mais déshonorée, oubliée et abandonnée.

Un jour, le cardinal de Rohan recevait, dans sa première résidence, S. Exc. la maréchale de Noailles: c'était en 1729. Naturellement le fastueux prélat voulut faire les honneurs de son superbe château à l'illustre visiteuse.

Rien ne fut oublié: il fallut passer par tous les coins et recoins. Arrivé à la cave, la corne apparut comme un monument des âges passés. La grande dame la contempla comme un objet contemporain de la race des Titans, et malgré l'invitation du prélat) se garda bien d'essayer d'en ressusciter l'usage. Elle se contenta d'écrire sur le registre de la confrérie défunte, ces simples mots : « Arrivée à Saverne par un hazard personnel, j'ai vu la corne et n'y ai point bu, ce 18 Juillet 1729. »

Cependant, un des assistants, un autre joyeux prélat, jugea qu'il était malséant de laisser ainsi dans le déshonneur un objet aussi vénérable. Ce galant évêque fait rincer la corne et la fait remplir de généreux liquide. Il la vide d'un trait et la fait vider au reste de la compagnie. Puis, pour éterniser cette résurrection glorieuse, il en transcrit le procès-verbal sur le respectable vélin, par les lignes suivantes: « Nous évêque-duc de Langres, pair de France, (c certifions que l'acte ci-dessus n'est que trop vrai, mais « qu'on y a bu beaucoup pour féliciter Mme la maréchale. »

Le prélat qui signait ce qui précède, cet évêque-duc de Langres, pair de France, n'était autre qu'un petit-fils de Mme de Montespan, de galante mémoire, Pierre de Pardailhan d'Antin lui-même.

Les mânes de Jean de Manderscheid ont dû joliment sourire le l 8 Juillet 1729 !

 

CARDINAUX-EVEQUES DE STRASBOURG

ÉLECTION D'UN COADJUTEUR 

 

En I742, le 2I du mois de Mai, François-Armand Auguste de Rohan-Soubise, chanoine capitulaire de Strasbourg, connu alors sous le nom d'abbé de Ventadour, fut élu coadjuteur. Le cardinal de Rohan, son oncle, avait obtenu pour lui du pape Benoît XIV, le 11 Septembre I740, un bref d'éligibilité, qui portait dispense pour posséder l'évêché de Strasbourg. Il n'en fit usage que deux ans après.

Le grand':'chapitre s'étant assemblé, le 28 Mars I742, fixa le jour de l'élection au 2I Mai suivant. La messe solennelle du Saint-Esprit ayant été chantée au grand-autel à 8 heures du matin, par François-Ernest, comte de Salm, évêque de Tournay, les chanoines capitulaires, au nombre de neuf présents et chargés de la procuration de trois absents, se rendirent dans le lieu ordinaire de leur assemblée, où le choix unanime tomba sur M. l'abbé de Ventadour. Le grand écolâtre ayant publié l'élection en latin, vers le clergé, en français et en allemand vers le peuple, le nouveau coadjuteur fut conduit à l'autel, précédé de tous les chanoines, ayant à sa droite M. l'archevêque de Rheims, grand doyen, et M. l'évêque de Tournay à sa gauche. Le Te Deum fut chanté en musique: on sonna pendant une heure les cloches de la cathédrale et on fit une décharge des canons de la ville. Le coadjuteur fut ensuite placé sur le siège épiscopal, où, après être resté quelque peu de temps, il sortit le premier du choeur suivi de tout le chapitre.

Son élection ayant été confirmée par bulles du pape Benoît XIV du 30 Juillet 1742, il fut sacré le 9 Novembre suivant par le cardinal de Rohan, son onde, sous le titre d'évêque de Ptolémaïde. (1)

 

(l) Grandidier. Essais Sur la Cathédrale de Strasbourg, p. 179.

 

…A suivre

 

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QUATRIEME EXTRAIT

 

LE CARDINAL DE ROHAN

DANS LA

MAGNIFICENCE DU CHATEAU DE SAVERNE

 

 

Pendant son séjour en Alsace, le marquis de Valfons visita l'évêque au château de Saverne. C'était en 1741. Il nous racontera lui-même, dans ses Souvenirs, ce qu'il vit chez le prélat.

« Je soupai chez M. le cardinal de Rohan qui avoit un état de souverain et où toute la province se rassembloit; j'allai plusieurs fois à Saverne; le château, le parc, tout y est grand; M. le cardinal l'ornoit de sa présence. La beauté de son visage toujours souriant inspiroit de la confiance; il avoit la vraye physionomie de l'homme destiné à représenter; l'ensemble de ses traits lui donnoit toujours cet air qui fait adorer; un regard qui ne lui coùtoit rien étoit une politesse. On jllgera de l'immensité du château et de la quantité de gens qui l'habitoient.: l'abbé de Ravennes, qui étoit à la tête de tout et dont l'amitié et les soins avoient payé les dettes et arrangé les affaires très-délabrées du cardinal, me disoit que depuis le garçon de cuisine jusqu'au maître de la maison, tout compris, on comptait 700 lits.

« Il y avoit toujours 20 à 30 femmes des plus aimables de la province. Très-souvent ce nombre étoit augmenté par celles de la Cour et de Paris. La plus grande liberté y régnoit; un maître d'hôtel parcouroit le matin les appartements, prenant note de ceux qui vouloient être servis chez eux, soit seuls, soit ensemble. On avoit le plus excellent dîner à l'heure demandée; ceux qui descendoient dans la salle à manger en trouvoient un non moins bon. Des chevaux, il y en avoit 180, et des calèches à volonté. Le soir, il falloit être à 9 heures à l'appartement, et tout le monde soupoit ensemble, ce qui avoit toujours l'air d'une fète ....

« Avec un pareil maître de maison, tout est bonheur; aussi le temple ne désemplissoit pas, et il n'étoit femme ou fille de bonne maison qui ne rèvât Saverne. Je remarquai que tout y étoit de bon conseil, jusqu'au dessus des portes, où il yavoit pour légende un mot latin, suadere) qui veut dire persuader. Chacun y travailloit, et souvent le succès suivoit le désir. J'y ai vu les plus belles chasses: 600 paysans rangés avec des gardes de distance en distance formoient une chaîne d'une lieue, parcourant un terrain très immense devant eux, en poussant des cris, battant les bois et les buissons avec des gaules.

« On étoit à les attendre au bas des coteaux où ils conduisoient toute sorte de gibier; on n'avoit qu'à choisir pour tirer. On faisoit trois battues comme cela jusqu'à l’heure après midi, où la compagnie, femmes et hommes, se rassembloient sous une belle tente au bord d'un ruisseau, dans quelque endroit délicieùx; on y servoit un dîner exquis, assaisonné de beaucoup de gaîté; et comme il falloit que tout le monde fùt heureux, il y avoit des ronds et des tables creusés dans le gazon pour tous les paysans. On dis les tribuoit par tête une livre de viande, deux livres de pain et une demi-bouteille de vin. La halte finie, le chaud un peu passé, chacun alloit reprendre de nouveaux postes, et la battue recommençoit. ~On choisissoit son terrain pour se mettre à l'affût, et de crainte que les femmes n'eussent peur étant seules, on leur laissoit toujours l'homme qu'elles haïssoient le moins pour les rassurer. Il était extrêmement recommandé de ne quitter son poste qu'à un certain signal, afin d'éviter les accidents de coups de fusil; tout étoit prévu, car, avec cet ordre, il devenoit impossible d'être surpris. Il m'a paru que les femmes, à qui j'avois entendu le plus fronder le goùt de la chasse) aimoient beaucoup celle-là. La journée finie, on payoit bien chaque paysan, qui ne demandoit qu'à recommencer, ainsi que les dames.

« Tout respiroit la liberté comme la magnificence: un jour maigre, le cardinal me demanda si j'étois descendu aux cuisines; c'étoit une chose curieuse. Il m'y mena un quart d'heure avant qu'on ne servît: quel fut mon étonnement de voir un étalage de la batterie la plus nombreuse tout en argent!

« L'abbé de Ravennes, vieux conseiller d'État, avait toujours de l'humeur, surtout le matin; en parcourant les corridors et les appartements, il trouvoit le tout plein de poudre, crioit pour les meubles et se plaignoit à M. le cardinal de l'indiscrétion publique.

« - Qui le sait mieux que moi, Monsieur l'abbé? Je ne suis occupé le soir qu'à regagner criailleries du matin m'ont brouillé.

« - Mais les meubles?

« -Eh bien, on les frottera, on les remplacera; liberté et facilité, Monsieur l'abbé; sans quoi nous ferions de ceci un désert.

« J'étois assez souvent à table près de lui; sa causticité me plaisoit, et puis il avoit des anecdotes curieuses, dont je tirois parti.

« Un soir que le hasard avoit mis il sa gauche une très jolie femme, un jeune homme placé près d'elle, de l'autre côté, allongeant le pied sous la table, jouissoit de tout son bonheur en sentant un pied répondre au sien avec vivacité; mais quel fut son étonnement d'entendre l'abbé de Ravennes lui dire tout haut et impatienté:

« - Vous voyez bien, Monsieur, que je ne suis pas femme à ça.

« C'étoit sur le pied de l'abbé que ce monsieur témoignoit ses désirs, je n'ai jamais vu de meilleure scène.

« L'électeur de Cologne, grand par sa naissance comme par son état et ses revenus, ne pouvoit revenir de l'étonnement que lui causoit la magnificence du cardinal. Il est vrai qu'il vivoit en souverain. Manuzie (?), une autre de ses habitations, n'est point aussi grandiose; c'est un genre plus sauvage, moins embelli, mais très-agréable, surtout par ses belles chasses. Il fallut quitter ces résidences enchantées pour retourner à Strasbourg. »

Armand-Gaston de Rohan appela il Saverne Robert le Lorrain, le célèbre artiste, pour lui confier la décoration du nouveau palais. (1)

Saint-Simon trace ainsi le portrait de ce cardinal de Rohan: « Il était d'un accès charmant, obligeant, d'une politesse générale et parfaite, mais avec mesure et distinction; d'une conversation aisée, douce, agréable. Il était assez grand, un peu trop gros, le visage d 11 fils de l'amour, et, outre la beauté singulière, son visage avait toutes les grâces possibles. »

Mais pour un prélat, il aimait passionnément le plaisir.

« Il est galant, écrit le marquis d'Argenson dans ses Mémoires; mais il trouve assez d'occasions de satisfaire son goût pour le plaisir avec les grandes princesses, les belles dames et les chanoinesses à grandes preuves, pour ne pas encallailler sa galanterie et n'être pas du moins accusé de crapule. »

 

(l) D. FISCHER. Notice historique sur le Château de Saverne. 1867. In-8° Colmar.

 

Dans la querelle des jésuites et des jansénistes, les plus grands prélats s'étaient passionnés pour l'un et pour l'autre parti. Une assemblée de ceux qui acceptaient la constitution, tenue au mois de Mars 1717, nomma huit commissaires chargés d'éclairer le régent sur les affaires de la bulle; ce furent les cardinaux de Rohan et de Bissy; les archevêques de Bordeaux, de Bourges ct d'Aix; les évêques de Bezons, d'Uzès et de Viviers.

Une chanson de l'époque intitulée La Trêve des Partis les traite ainsi:

 

Bourges, Rohan, Bissy, Bordeaux,

Vos projets peu louables

Sont arrêtés; et vos travaux

Ont paru détestables;

Rome avait pour vous des attraits,

Plus puissants que la France;

Et comme vous, le vieux d'Uzès

Est réduit au silence.

 

Une chanson de 172 1, intitulée Dubois cardinal contient ces vers à l'adresse du cardinal de Rohan, qui, se trouvant à Rome pour le Conclave, partageait avec l'abbé de Tencin le soin des intérêts de Dubois

 

Or, écoutez la nouvelle

Qui vient d'arriver ici:

Rohan, ce commis fidèle,

A Rome a bien réussi:

Mandé par Dubois, son maître,

Pour acheter un chapeau,

Nous allons le voir paroître

Et couvrir son grand cerveau. (1)

 

Le cardinal Armand-Gaston-Maximilien de Rohan (1674-1749), l'un des principaux chefs du parti Moliniste, devint, grâce à Dubois, qu'il avait sacré archevêque de Cambrai, chef du Conseil de conscience et membre du Conseil de régence. (2)

 

1 Chansonnier historique du XVIIIe Siècle. Édition QUANTIN. Première partie. T. IV, p. 48.

2 Chansonnier historique du XVIIIe Siècle. Édition QUANTIN. Première partie. T. I, p. 118.

 

Lors de l'établissement de la Compagnie d'Occident, en 17 l 7, pour la colonisation de la Louisiane, on fit une chanson sur ce sujet, l'on fait jouer un rôle à chacun des personnages alors le plus en vue. On n'a garde d'oublier le cardinal de Rohan, auquel est consacré ce couplet:

 

Le beau cardinal de Rohan,

Chargé de soins plus importants,

Peuplera le Mississipi.

 

…A suivre

 

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SEPTIEME EXTRAIT

SECTION PREMIERE.

 

La Gaule antique eut aussi ses clientèles. On en peut compter trois espèces. Ici, l’homme faible remettait sa terre à l’homme puissant, sous la condition réciproque et recevoir de lui la protection et appui, et de lui payer des redevances particulières, appelées tributs. D’un côté, mes grands seigneurs avaient l’habitude de marcher avec un cortège d’hommes armées, qui ne les abandonnaient ni pendant la paix ni pendant la guerre. On voit, en troisième lieu, des confédérations particulières, qui étaient de véritables dévouemens. La condition des dévoués était de partager en tout le sort de l’ami qu’il s’était fait. Ils jouissaient avec lui de tous les avantages de la vie quand il était heureux ; souffraient avec lui dans l’infortune toutes les privations et toutes les peines ; enfin, après avoir vécu ensemble, leur condition était de mourir ensemble.

César nous assure qu’il était sans exemple qu’un ami ainsi voué eût survécu à son ami.

Il n’est fait mention que d’une seule espèce de clientèle chez les Germains. Elle a un caractère remarquable. « Parmi les grands, dit Tacite, c’est à qui aura un plus grand nombre de compagnons. C’est une décoration pendant la paix, un appui à la guerre. Défendre son prince, le préserver, lui attribuer ses hauts faits, c’est le devoir de tout compagnon. Le prince combat pour la victoire, le compagnon pour le prince. Ce cheval belliqueux, ou ces armes sanglantes et victorieuses, voilà les récompenses ; d’abondans et de grossiers festins forment la solde. La guerre et le pillage pourvoient à la munificence. »

Il n’est pas difficile d’apercevoir dans ces usages leurs caractères divers. A Rome, la clientèle était toute civile ; elle ne changeait pas toujours la qualité du citoyen. Parmi les différentes clientèles des Gaules, celle qui s’était particulièrement conservée, je veux parler de la remise des terres, était tout à fait servile ; elle livrait, en quelque sorte,  le faible à la merci de l’homme puissant. Chez les Germains, au contraire, dont les mœurs vigoureuses étaient demeurées intactes, les clientèles de l’usage habituel avaient un caractère noble et militaire.

Le caractère de ces trois clientèles une fois connu, il est à remarquer que, comme les Francs, en s’établissant, n’abolirent ni ce qui avait pu s’introduire de la clientèle civile des Romains, ni ce qui avait pu se conserver de la clientèle servile des gaules ; la clientèle militaire qu’ils tenaient de leurs ancêtres, et dont ils introduisirent l’usage, dut changer en beaucoup de point l’ordre social. On peut suivre les traces et les progrès de ce changement.

Chez les Germains on ne pouvait donner ses terres comme chez les Gaulois, les terres ne formaient point de propriétés. Dans les Gaules, où les terres se trouvèrent pour les Francs des propriétés, les terres suivirent les conditions de leurs maîtres. Les hommes recherchaient la protection des hommes, les domaines rechèchèrent la protection des domaines. Les hommes étaient enrégimentés et armés, les domaines s’armèrent et s’enrégimentèrent. Les hommes et les domaines se virent ainsi associés aux mêmes devoirs et aux mêmes services. L’ancienne clientèle gauloise, où on donnait servilement sa terre, s’anoblit en s’unissant à la clientèle germaine, où on donnait son courage. La clientèle civile des Romains reçut, à son tour, un lustre qu’elle n’avait pas.

Cependant les nouveaux actes qui semblaient se rapporter, en quelque sorte, aux actes anciens, pouvaient occasionner ainsi des méprises. On déclara solennellement que les actes de se genre ne portaient aucun préjudice de l’ingénuité. Il fut stipulé qu’un homme libre pouvait désormais prendre un patron sans s’avilir, remettre ses biens sans s’asservir. Ces dispositions sont consignées dans les formules de Marculfe et dans les Capitulaires.

Un changement dans les dénominations s’ajouta à ces précautions. Le mot modeste senior, dont nous avons fait depuis seigneur, fut substitué à celui de patron. Le mot noble vassus ; dont nous avons fait depuis vassal, fut substitué au mot abaissé de client. On adopta dans le même sens miles, dont nous avons fait depuis chevalier, et qui ne signifia, pendant long-temps, qu’un militaire. Les nouveaux actes eux-mêmes, qui auparavant s’étaient rendus généralement par le mot tradere, commencèrent à s’exprimer par le mot adouci de commendare.

Des signes précis furent crées pour consacrer et distinguer ces divers engagemens. Un homme veaint, soit d’une escorte guerrière, si ce n’est un grand de l’Etat, soit avec les premiers de sa nation, si c’était un prince, mettre solennellement sa main dans la main de l’homme puissant auquel il se vouait. C’était, dans ce cas, sa foi et son courage qu’il lui remettait. Tassilon, duc de Bavière, vint ainsi, avec les principaux personnages de son pays, mettre sa main dans la main du roi Pépin. C’est ainsi, sous la première race, que les grands officiers de l’Etat venaient mettre la main dans la main du roi, en lui prêtant serment pour leur office. Cette espèce de recommandation ; la plus illustre de toutes, est rappelée constamment dans les chartres, comme l’origine franque, more francorum, more francico.

Dans d’autres circonstances, on voyait un homme se présenter avec un morceau de gazon, une fleur, ou une branche d’arbre. C’était, dans ce cas, ses affaires, son alleu, tous ses biens, qu’on mettait sous la protection de l’homme auquel on se recommandait. Cette seconde espèce de recommandation était noble, car elle avait communément pour condition le vasselage, ou le service militaire.

Enfin il y avait une troisième espèce de recommandés ; c’étaient ceux qui, après s’être coupé les cheveux les cheveux du devant de la tête, se présentaient dans la cour d’un homme puissant, pour les lui offrir. Ce signe, qui exprimait la remise entière de la personne, entraînait ce qu’on appelait alors bondage, c'est-à-dire, la perte de l’ingénuité : cette espèce de recommandation était vile.

Tel est l’ordre nouveau de mouvemens qui, se produisant de trois espèces de clientèles romaines, germaines et gauloises, se modifia de ses trois sources diverses ; prit, en se modifiant, une forme régulière ; gagna bientôt, en s’ordonnant et en se régularisant, toutes les conditions, toutes les situations, tous les actes. Cet ordre nouveau de mouvemens, déjà d’une pratique habituelle sous les rois Mérovingien, ainsi qu’on le voit dans les Formules de Marculfe,  devient un usage sous les premiers rois de la seconde race, ainsi qu’on le voit dans les Capitulaires. Il s’agrandit ensuite progressivement, et manifeste ainsi agrandi, ce qu’on a connu depuis sous le nom de gouvernement féodal. Ce gouvernement, qui finit par montrer au monde une apparence du peuple nouveau, ainsi que de coutumes et d’institutions nouvelles, s’est produit, comme on voit, tout simplement d’un rapprochement de deux peuples, dont l’un ayant des terres, l’autres des armes, l’un les mœurs sévères des Germains, l’autre les mœurs affaiblies de Rome, l’un accoutumé à une vie errante et à former des liens plus militaires que civils, l’autre accoutumé à une vie sédentaire, se sont mêlés peu-à-peu, et ont pris réciproquement quelque chose de l’autre.

C’est ainsi qu’a été amené le troisième âge que j’ai annoncé. Toutes les variétés de notre système domestique, civil et politique, se déroulent de cette variété d’âges. Je vais les récapituler.

Au premier âge, on compte pour hommes libres, d’un côté, des Francs ; d’un autre côté, des hommes ingénus, Gaulois, Bourguignons ou Goths. Au second âge ; on ne compte plus pour hommes libres que des Francs. Au troisième âge, tous les alleux deviennent fiefs, tous les hommes francs vassaux.

Au premier âge, le service intérieur des maisons se fait, dans une partie de la nation par des esclaves domestiques, c’est-à-dire, par tout ce que la population a de plus vil. Au troisième âge, le service intérieur de la maison se fait par tout ce que la population a de plus noble.

Au premier âge, les hommes francs ont, dans l’ordre judiciaire relativement aux autres hommes ingénus, différens privilèges ou distinctions. Au second âge, ces distinctions disparaissent. Au troisième, les pairs de fiefs succèdent naturellement aux anciens jurés. On a le jugement des pairs.

Au premier âge, on a dans l’ordre politique pour représentation nationale, des grands et quelques leudes. Au second âge, on a une réunion générale de tous les hommes ingénus. Au troisième âge, les grands, sous le nom de barons, ont encore une sorte de première impulsion dans les grandes délibérations d’état : au fond, la partie principale de la puissance législative et politique est morcelée dans chaque domaine.

Enfin au premier âge, on a une multitude de nations diverses avec des lois, des mœurs et des usages divers. Au second âge, la diversité des nations commence à s’effacer. Au troisième âge, on n’a plus qu’une seule nation française, et un seul gouvernement qui est le gouvernement féodal.

Ces nuances, qui embrassent toutes les parties de notre régime domestique, civil et politique, vont se retrouver dans celui qui concerne la royauté….


  Fin de la section première. 


Comte de Montlosier (De la Monarchie Tome 1).

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TROISIEME EXTRAIT

 

LE CARDINAL DE ROHAN

AU MARIAGE DE LOUIS XV

 

....En 1725, le 15 du mois d'Août, se ht dans la cathédrale, le mariage de Louis XV, roi de France (représenté par Louis, duc d'Orléans, premier prince du sang), avec la princesse Marie, fille de Stanislas Leczinski, roi de Pologne, et de Catherine Opalinska, son épouse. Un ban de mariage avait été publié le 22 Juillet précédent tant en la paroisse de Versailles qu'en celle de Saint-Jean de Wissembourg. MM. les cardinaux de Noailles, archevêque de Paris, et de Schoenborn, évêque de Spire, avaient dispensé des deux autres publications. Les fiançailles furent célébrées le 14 Août dans l'hôtel du gouvernement par M. le cardinal de Rohan. Le lendemain, la cérémonie fut annoncée par tous les canons des remparts.

La nef et le choeur de la cathédrale furent ornées des tapisseries de la couronne. Lé clergé séculier et régulier s'y rendit sur les 10 heures du matin et se rangea en haie dans les deux côtés de la nef. Vers les II heures, le cardinal de Rohan reçut la princesse à la porte de l'église cathédrale et lui présenta de l'eau bénite; puis, précédé de son clergé, il s'avança vers le grand autel. La princesse venait après lui entre son père et sa mère, le roi et la reine de Pologne, et était suivie de M. le duc d'Orléans, représentant le roi de France, de M. le duc d'Antin, et de M. le comte de Beauvau, tous deux ambassadeurs extraordinaires du roi. Etant arrivés dans le choeur, la princesse, le roi ct la reine se mirent sur un grand prie-dieu, couvert d'un tapis de velours cramoisi, sous un dais suspendu au milieu du sanctuaire. Il y avait trois fauteuils sur ce prie-dieu. Celui du milieu était pour la princesse et les deux autres pour le roi ct la reine. M. le duc d'Orléans se plaça sur une estrade à deux degrés couverte d'un tapis. Elle était contre le pilier le plus proche du prie-dieu du côté de l'épître, vis-à-vis le trône de M. le cardinal qui était sous un dais du côté de l'Evangile sur une estrade aussi à deux marches. Il y avait sur celle de M. le duc d'Orléans un tabouret et un carreau pour lui et une petite banquette pour les deux ambassadeurs.

Dès que Leurs Majestés et la princesse curent fait leur prière sous le dais, M. le cardinal se tourna vers le prie-dieu pour commencer la cérémonie. La princesse, à qui le roi son père donnait la main, et M. le duc d'Orléans, y vinrent aussitôt. M. le duc se mit à la droite de la princesse et le roi à sa gauche. M. le cardinal commença par un discours également solide et éloquent qui dura près de six minutes. En voici le texte

« Madame,

«  Quand je vous vois dans cc saint temple et que vous approchez de nos autels pour y contracter l'auguste alliance qui va vous unir au plus grand des rois et au plus aimable des princes, j'adore les desseins de Dieu sur vous, et j'admire avec transport par quelle route la Providence vous conduit au trône sur lequel vous allez monter.

Vous êtes, Madame, d'une maison illustre par son ancienneté par ses alliances et par les emplois éclatants que les grands hommes qu'elle a donnés à la Pologne ont successivement remplis avec tant de gloire. Vous êtes fille d'un père qui, dans les différens événemens d'une vie agitée par la bonne et par la mauvaise fortune, a toujours réuni en lui l'honnête homme, le héros et le chrétien. Vous avez pour mère et pour ayeule des princesses qui, semblables à Judith et à cette femme forte dont l'Ecriture fait le portrait, se sont attiré la vénération et le respect de tout le monde par la fidélité avec laquelle elles ont toujours marché dans la crainte du Seigneur. On voit en votre personne, Madame, tout ce qu'une naissance heureuse et une éducation admirable soutenue par des exemples également forts et touchans ont pu fournir de plus accompli; en vous règnent cette bonté, cette douceur et ces grâces, qui font aimer ce que l'on est obligé de respecter; cette droiture de coeur à laquelle rien ne résiste; cette supériorité d'esprit et de connaissance qui se fait sentir malgré vous, pour ainsi dire, et malgré la modestie et la noble simplicité qui vous sont naturelles; enfin, et c'est ce qui met le comble à tant de mérites, ce goust pour la piété et cet attachement aux vrais principes de religion qui animent vos actions et qui font la règle de votre conduite. Ornée de toutes ces vertus, à qu'elle couronne n'auriez-vous pas eu le droit d'aspirer, sans l'usage qui assujettit en quelque sorte les roys à ne prendre qu'autour du trône les princesses qu'ils veulent faire régner avec eux. Celuy qui donne les empires, met le sceptre de Pologne entre les mains du prince de qui vous tene2 la vie, et par là, en décorant le père, il conduit insensiblement la fille aux hautes destinées qu'il luy prépare; mais, ô mon Dieu! que vos desseins sont impénétrables! et que les voies dont vous vous servez pour faire réussir les conseils de votre sagesse, sont au-dessus de la prudence humaine! A peine ce prince est-il sur le trône, où le choix des grands et l'amour du peuple l'avaient placé, qu'il se voit forcé de le quitter, il est abandonné, trahi, persécuté; un coup fatal luy enlève un héros, son ami et le principal fondement de ses espérances; il cède aux circonstances sans que son courage en soit ébranlé; il cherche un asyle dans la patrie commune des roys infortunés; il vient en France; vous l'y suivez, Madame. Tout ce qui vous y voit, sensible à vos malheurs, admire votre vertu; l'odeur s'en répand jusqu'au trône d'un jeune monarque qui, par l'éclat de sa couronne, par l'étendue de sa puissance et plus encore par les charmes de sa personne, pouvoit choisir entre toutes les princesses du monde; guidé par de sages conseils, il fixe son choix sur vous, et c'est ici que le doigt de Dieu se manifeste; il se sert du malheur même qui sépare le roy, votre père, de ses sujets et qui vous enlève à la Pologne pour nous donner en vous une reine qui sera la gloire d'un père et d'une mère, dont elle fait la consolation et les délices; une reine qui rendra heureuse la nation la plus digne de l'être, au moins par son respect et par sa fidélité pour ses souverains; une reine

qui, inviolablement attachée à ses devoirs, pleine de tendresse et de respect pour son époux ct pour son roy, ct sagement occupée de ce qui peut lui procurer le solide bonheur, rappellera les tems de l'impératrice Flaccile, dont l'histoire nous apprend que n'ayant jamais perdu de vue les préceptes de la loy divine, elle en entretenoit assiduement le grand Théodose, et que ses paroles, comme une pluie féconde, arrosoyent avec succès les semences de vertu que Dieu avait mises dans le coeur de son époux.

Venez donc, Madame, venez à l'autel; que les engagemens que vous allez prendre, saints par eux-mêmes (puisque, selon l'apôtre, ils sont le symbole de l'union de Jésus-Christ avec son Eglise), soient encore sanctifiés par vos dispositions; pénétrée de ce que vous devez à Dieu, faites lui hommage de ce que vous êtes et de ce que vous allez être; reconnoissez qu'en couronnant vos mérites, il couronne ses dons. Et vous) chrétiens qui m'écoutez, en voyant les récompenses qui sont données, dès ce monde, à la vraie vertu, apprenez à la respecter et à l'aimer! »

Après ce discours, le duc d'Orléans ct la princesse se donnèrent la main, et le cardinal les maria suivant les formes prescrites par le rituel de Strasbourg. Le cardinal célébra ensuite pontificalement la grand'messe, qui était celle de la fête de l'Assomption de la sainte Vierge. Elle fut chantée en musique et on y dit des collectes particulières pour demander la bénédiction de Dieu sur ce nouveau mariage. Le cardinal, en allant de l'autel à son trône, salua d'abord l'autel, puis la nouvelle reine, le roi et la reine de Pologne, qui rendirent le salut. A la préface, le diacre les encensa tous trois. Après le Pater, la reine de France et M. le duc d'Orléans s'avancèrent vers l'autel, et s'étant mis à genoux sur les marches, on étendit sur leurs têtes un poële d'étoffe d'argent qui était tenu par le comte Pierre d'Antin, évêque-duc de Langres, ct par le comte Charles-Ernest-Joseph de Truchsess, tous deux chanoines capitulaires. Le cardinal ayant dit sur eux les oraisons portées par le rituel, la reine et le duc retournèrent à leurs places. A la communion, le diacre porta la patène à baiser à la reine de France, au roi et à la reine de Pologne.

Après la messe, le cardinal entonna le Te Deum à la fin duquel il dit la collecte en actions de grâces. Il porta ensuite le corporal à baiser à la reine, et lui présenta l'acte de célébration de mariage à signer sur deux registres, l'un de la paroisse de Saint-Laurent à la cathédrale, et l'autre de celle de Saint-Louis. Il fut ensuite signé par le roi et la reine de Pologne, par M. le duc d'Orléans, par MM. Le duc d'Antin ct le comte de Beauvau, comme témoins de la part du roi de France, par MM. le prince de Pons et le comte du Bourg, comme témoins de la part de la reine.

Le curé de la cathédrale, où s'était fait le mariage, ct celui de Saint-Louis, en la paroisse duquel demeurait la reine, signèrent ensuite, ct après eux le cardinal de Rohan. De là, S. E. reprit la chape et la mître, et, précédé de tout le clergé, il retourna à la grande porte de l'église, où il fit un second discours, dont la teneur suit:

« Madame,

« Permettez-moi, à la fin de l'auguste cérémonie qui comble nos espérances ct nos voeux, de demander à Votre Majesté sa protection royale pour l'église de Strasbourg.

Cette église n'a point oublié et n'oubliera jamais les bienfaits signalés qu'elle a reçus de nos premiers roys; mais que ne doit-elle pas à notre dernier monarque? Livrée par le malheur des tems aux fureurs du schisme et de l'hérésie, elle auroit peut-être péri comme bien d'autres, si ce grand prince, en rentrant dans les droits de ses ancêtres, n'avoit pris sa défense et ne l'avoit soutenue de tout son pouvoir. Elle luy doit l'avantage de se voir rétablie dans la possession de ce saint temple dont elle avoit été bannie.

Tout nous rappelle icy sa pieuse et royale magnificence : les temples ornés, les pasteurs libéralement entretenus, les missions fondées, les nouveaux convertis protégés et secourus, sont autant de monumens du zèle et de la piété d'un roy dont la mémoire ne finira jamais. Il n'a pas eu la consolation d'achever l'ouvrage qu'il avait entrepris, c'est-à-dire la réunion de toutes les brebis de cet illustre troupeau dans un même bercail: elle étoit réservée au digne héritier de son zèle et de sa couronne; ce sera vous, Madame, qui représenterez à votre auguste époux ce qu'exigent de luy le souvenir de son bisayeul, sa propre gloire et nos besoins qui sont ceux de la religion; Vous ne demanderez point que l'on ait recours à ces voyes qui aigrissent sans persuader, elles ne seroient point du goust de Votre Majesté, et à Dieu ne plaise que nous voulussions les luy suggérer; ils sont vos sujets, Madame, ces enfans qui nous méconnoissent: et l'église de Strasbourg, pleine de confiance dans la miséricorde de Dieu, se regarde toujours comme leur mère. Nous vous conjurons donc, par les entrailles de Jésus-Christ, d'employer, pour procurer leur réunion, tout cc qu'une charité active mais compatissante pourra vous inspirer. Dieu bénira les soins de Votre Majesté et nos désirs, et il se servira des exemples de votre piété et de votre foy, pour confondre enfin l'erreur ct pour faire triompher la vérité.

« Régnez longtems sur nous, Madamc, pour le bonheur du roy et pour la félicité de ce grand royaume; que Dieu exauce les prières que l'Église vient de luy offrir pour Votre Majesté, et daignez nous mettre au rang de vos sujets les plus zélés et les plus fidèles. »... A suivre.

 

Le Roy de Sainte Croix. (Les Quatre Rohan).

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Publié le par Rhonan de Bar
Publié dans : #MAISONS NOBLES DE LORRAINE

CARDINAUX-ÉVÊQUES DE STRASBOURG

 

545px-Blason Armand Gaston Maximilien de Rohan-Soubise (167

LE ROI DE POLOGNE STANISLAS LECZINSKI

ET SA FILLE MARIE

CHEZ LE CARDINAL DE ROHAN

 

C'est au couvent de Groefenthal, près de Sarrebruck, que le roi de Pologne détrôné fit la connaissance du cardinal de Rohan. Un nouveau malheur frappait le pauvre monarque: son protecteur, Charles XII, venait de mourir, et la réduction considérable que cet événement faisait subir à ses revenus, jointe au maintien du séquestre de ses biens patrimoniaux, allait lui imposer de grandes privations, quand le cardinal de Rohan lui fit obtenir une pension du gouvernement français. Cette libéralité décida le prince découronné à se fixer en France. Il choisit le château de Wissembourg que la famille de Weber mit à sa disposition.

Des relations intimes s'établirent donc entre Stanislas Leczinski et le cardinal-évèque de Strasbourg et le roi polonais allait souvent au château épiscopal de Saverne.

 

 Mlle DE CLERMONT EN ALSACE

CHEZ LE CARDINAL DE ROHAN

 

Il existe un «Journal historique du voyage de S. A. S. Mlle de Clermont (princesse du sang) depuis Paris jusqu'à Strasbourg) du mariage du roi) et du voyage de la reine depuis Strasbourg jusqu' a Fontainebleau) par le chevalier Daudet, de Nismes, ingénieur-géographe de Leurs Majestés. 1725.

A la date du 11 Août I725, on y lit ce qui suit :

« S. A. S. arriva enfin à Saverne sur les 8 heures, où elle fut saluée, en entrant dans la ville, par toute l'artillerie du château et par la mousqueterie de la bourgeoisie qui en bordoit les rues. « S. E. M. le cardinal de Rohan reçut la princesse dans son palais, au bas du vestibule, accompagné de M. le duc d'Olonne, de M. du Harlay, intendant d'Alsace, de M. le comte de la Feuillade, et de grand nombre d'autres seigneurs, tant François qu'Allemands. Dans le temps que S. A. S. recevoit les compliments de S. E., la princesse de Montauban, Mesdames de Tallard, de Montbazon et de Prie, vinrent témoigner leur joie à la princesse sur son heureuse arrivée et la conduisirent dans son appartement, où elle passa quelque temps à en admirer la beauté et à s'entretenir avec S. E. et les dames que nous venons de citer. M. le duc d'Antin arriva peu de temps après, de Strasbourg, qui vint saluer la princesse.

«Le souper fut servi a 9 heures, avec toute la magnificence possible, dans la grande salle du château qui a 30 pas communs de long sur 22 de large, où règne tout autour, en forme de corniche, une balustrade ou galerie, où purent se mettre plus de 1 200 personnes pour voir souper la princesse ; cette salle, de même que l'appartement destiné pour la reine, est un des plus beaux, des plus riches et des plus magnifiques de l'Europe. Les seigneurs et dames qui eurent l'honneur de souper avec la princesse furent S. E. M. le cardinal, M. le duc d'Antin, M. le duc d'Olonne, M. du Harlay, intendant d'Alsace, Mme la princesse de Montauban, les duchesses d'Epernon, de Tallard et de Montbazon', Mmes de Nesle " de Prie de Ribérac et Mlle de Villeneuve.

« A côté de la salle, où soupoit la princesse, on servoit aussi une autre table, où étoient grand nombre de seigneurs tant François qu'Allemands. Après le souper, on passa quelque temps au jeu jusqu'au coucher de la princesse.

« Un détachement du régiment de Tournoisis gardoit l'intérieur du palais, et la bourgeoisie faisoit garde toute la nuit auprès des équipages.

« Du 12 Aoust 1725. Séjour a Saverne. - Pendant le lever de la princesse, qui fut a II heures, plusieurs dames et seigneurs de la cour se rendirent au Palais pour la saluer. Le roi Stanislas, qui étoit arrivé de Strasbourg incognito, sur les 10 heures, ayant témoigné a Mme la marquise de Prie, dame du palais de la reine, l'empressement qu'il avoit de voir S. A. S., cette dame en avertit la princesse, qui reçut S. M. à la porte de sa chambre. On ne peut exprimer ici la joie qu'ils ressentirent de cette première entrevue, et les tendres compliments qu'ils se firent mutuellement: leur conversation dura un quart d'heure, après laquelle S. M. se retira pour laisser habiller S. A. S., qui conduisit S. M. jusqu'au bout de son appartement. Peu de temps après, S. E. M. le cardinal de Rohan et M. le duc de Noailles, qui étoit arrivé de Strasbourg, vinrent saluer S. A. S. Après le lever de la princesse, on avertit S. A. S. que le régiment des Carabiniers et celui des Houssarts étaient dans le jardin du palais, prêts à passer en revue devant S. M. et S. A. S. Le roi vint au-devant de la princesse, et ils furent se placer sur les balcons de l'appartement de la reine, accompagnés de S. E., de M. le duc de Noailles et de tous les autres seigneurs et dames de la cour. Le régiment des Carabiniers étoit rangé en bataille devant le même appartement: ils défilèrent quatre à quatre, et saluèrent en passant S. M. et S. A. S. On fit ensuite avancer le régiment des Houssarts, ayant à sa tête M. de Bérischy, qui en est colonel, qui s'étant mis un moment en bataille, le sabre à la main, avec timbales et trompettes, ils défilèrent quatre à quatre, et saluèrent en passant le roi et S. A. S., qui trouvèrent ces troupes fort belles et en très-bon état.

Cette revue fit plaisir à la princesse, de même que la vue du jardin qu'elle découvroit par là dans toute son étendue et dont le canal, qui a près d'une demi-lieue de longueur, en fait un des plus beaux ornements.

 « La revue étant faite, S. A. S. admira pendant quelque temps la beauté et la magnificence de l'appartement de la reine, et entendit ensuite la messe dans la chapelle du palais, après laquelle le roi et S. A. S. se mirent à table.

Les seigneurs et dames qui eurent l'honneur de manger à leur table, furent S. E. le cardinal de Rohan, M. le duc de Noailles, M. l'Intendant, MM. les comtes de Lautrec, de la Feuillade et de Bérischy, la princesse de Montauban, les duchesses de Tallard et de Montbazon, Mmes de Nesle, de Rupermonde, de Ribérac, de Bergeret et Mlle de Villeneuve.

« A côté de la table du roi et de S. A. S. l'on en servoit une autre, où étoient M. le duc d'Olonne, Mme la duchesse d'Epernon, Mme de Prie, et plusieurs autres seigneurs tant François qu'Allemands; et dans une antichambre à côté l'on servit aussi la table des principaux officiers du roi et de S. A. R.

«Peu de temps après le dîner, S. M. prit congé de S. A. R. et partit pour Strasbourg, escortée par un détachement de trente maîtres de Carabiniers. M. le duc de Noailles et M. l'Intendant partirent aussi pour Strasbourg.

« Sur les 4 heures, Mme la maréchale de Boufflers arriva de Sarrebourg, avec les équipages du roi, accompagnée des duchesses de Boufflers, de Béthune et de Mme d'Egmont. M. le cardinal s'étant aperçu de l'arrivée de Mme la maréchale, vint la recevoir dans son vestibule et la conduisit dans son appartement. Les dames étant arrivées, furent saluer la princesse, et l'on joua alors jusqu'à, l'heure de la promenade.

« A 6 heures, S. E. vint inviter S. A. S. à la promenade avec les dames de la cour; l'on fit tout le tour du canal, qu'on trouva très-beau, de même que tout le jardin.

« L'on conduisit la princesse au bois de la Mousson, où est la Faisanderie, et l'on donna à la princesse le divertissement de la chasse au cerf et au lièvre, dont elle fut très-contente; au retour de la promenade on joua jusqu'au souper, et pendant le souper arriva M. le marquis de Nangis, dont la présence fit plaisir à S. E. et à toute la compagnie; le souper fut servi à 9 heures.

« Deux autres tables furent aussi servies en même temps pour tous les autres seigneurs françois et allemands et pour les principaux officiers de S. A. S. Après le souper, on joua jusqu'au coucher de la princesse. Le détachement du régiment de Tournoisis fit garde toute la nuit dans le palais et la bourgeoisie auprès des équipages, comme

ci-devant.

« Du 13 Aoust I725. Second séjour à Saverne. – La princesse se leva à 7 heures et partit à 8 heures pour aller à Strasbourg incognito, dans les carrosses de S. E.

· . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

«La table de la princesse à Saverne fut servie comme à l'ordinaire; S. E. M. le cardinal et Mme la maréchale de Boufflers en firent les honneurs.

· . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

« S. A. S. arriva à Strasbourg sur les 5 heures et demie dans les carrosses de S. E., conduite par le sieur Duval, son écuyer. Et après son arrivée vint une troupe de danseurs et de danseuses allemands avec leurs hautbois et violons, qui, après avoir présenté à S. A. S. différents gâteaux faits à la mode du pays, dont elle goûta, de même que toute sa cour, la divertirent ensuite par leurs différentes danses qu'ils répétèrent plusieurs fois dans la grande salle du palais. Quelques seigneurs ou particuliers, voulant profiter de cette fête, dansèrent aussi les mêmes danses, en présence de S. A. S., qui fit récompenser largement les danseurs allemands. L'on s'occupa ensuite du jeu jusqu'au souper, où S. A. S. n'assista pas. Mme la maréchale de Boufflers fit les honneurs de la table. S. E. fut servie en particulier avec M. le comte de Lautrec, Mesdames de Béthune et de Rupermonde. La table des autres seigneurs et des officiers de S. A. S. fut servie de même que les autres jours.

« Du 14 Aoust 1825. Départ de Saverne. - S. A. S., après son lever qui fut à II heures, entendit la messe dans la chapelle du château, après laquelle on servit le dîner.

A 1 heure, S. A. S. partit pour Strasbourg et fut saluée, en sortant, par toute l'artillerie du palais. A la sortie du jardin, qu'elle traversa, une brigade de la maréchaussée d'Alsace, destinée pour la garde de sa personne, l'escorta jusqu'à Strasbourg.

« Du 17 Aoust 1725. Départ de Strasbourg.

« ……. Le roi Stanislas, M. le duc d'Orléans, le duc d'Antin et M. de Beauvau, partirent avant la reine (de Wiltzheim, à 4 lieues de Strasbourg, lieu indiqué pour la dînée) pour la recevoir à Saverne. Elle partit sur les 4 heures de Wiltzheim et arriva à 7 heures à Saverne, ville non fortifiée, sur la Soor, rivière, diocèse de Strasbourg, et éloignée de cette ville de 7 lieues, et fit son entrée par les allées du jardin du palais, qui étoient bordées par un détachement de 150 hommes du régiment de Pons et autant de celui de Batan-Suisse. Le prince de Pons salua la reine avec l'esponton, et S. M. fut reçue à la porte du palais par M. le duc d'Orléans, M. le cardinal de Rohan, le prince et la princesse de Montauban, la duchesse de Montbazon, le duc d'Olonne, le Grand-Prieur, le marquis de Beauvau, MM. du Harlay, intendant d'Alsace, et de Creil, intendant des Trois-Evêchés.

« M. le cardinal de Rohan et M. de Dreux présentèrent à S. M. les officiers de la ville, avec les clefs des portes dans un bassin d'argent. S. M. les ayant reçues dans ses mains, les remit en même temps au duc de Noailles, qui les rendit à ces mêmes officiers.

« Pendant cette réception, tous les canons de la ville ou du palais firent plusieurs décharges. S. E. conduisit la reine dans son appartement, où S. M. trouva le roi Stanislas, le maréchal du Bourg et le duc d'Antin. S. M. y passa le temps à la conversation et, à ses exercices de piété jusqu'à son souper, qui fut servi à 8 heures et demie à son petit couvert. S. E. y fit la fonction de grand-aumônier,

et Mme de Mailly servit la reine à table. Le roi Stanislas ne soupa point. ..... La table de S. A. S. Mlle de Clermont fut servie avec autant de profusion que de magnificence, aux dépens de S. E. Les dames du palais et M. le duc de Noailles eurent l'honneur de souper avec S. A. S.

Outre le repas de S. A. S., S. E. donna encore un grand souper à M. le duc d'Orléans dans son petit château, où assistèrent tous les seigneurs et quelques dames de la cour; ce souper peut s'appeler, sans exagération, un festin royal par son abondance, sa bonté et sa magnificence. M. le duc d'Orléans parut en être très-content et loua beaucoup le zèle, la générosité et la bonne grâce, avec lesquels S. E.

faisait les honneurs de sa maison. Il y eut des illuminations dans toutes les rues de Saverne, et des feux de joie qui durèrent toute la nuit. Le détachement du régiment de Pons fit garde aux environs du palais et la bourgeoisie auprès des équipages.

« Du 18 Aoust 1725. - Départ de Saverne. - Le roi Stanislas, après son lever, alla rendre visite à la reine, sa fille; personne, ce jour-là, n'entra au lever de S. M. que les personnes qu'elle fit appeler. MM. le maréchal du Bourg, le duc d'Antin, le marquis de Beauvau et le marquis de Nangis se trouvèrent à la toilette de Mlle de Clermont. Le roi Stanislas l'honora aussi de sa présence pendant quelque temps, après quoi le roi retourna chez la reine avec M. le duc d'Orléans, où ils restèrent jusqu'à ce que la reine voulût entendre la messe dans la chapelle du palais, après laquelle S. M. dîna avec le roi son père. Mme la marquise de Nesle, avec son air gracieux et son agréable conversation, fut présente à ce repas et fit tout ce qu'elle put pour détourner les larmes et les soupirs de S. M. qui ne pouvoit jeter les yeux sur le roi son père, qu'elle ne renouvelât les douleurs de la séparation. L'auteur ne put être longtems témoin de la tristesse de la reine et fut voir ce qui se pas soit dans le reste du palais. Il trouva dans le grand salon S. A. S. Mlle de Clermont qui dînait avec les dames du palais, aussi magnifiquement servie que le jour précédent; il monta ensuite dans le petit château, où il fut témoin du second festin que S. E. donnoit à M. le duc d'Orléans et à tous les seigneurs de la cour ...... S. A. S. M. le duc d'Orléans et S. E. M. le cardinal ayant appris par un faux bruit que S. M. se préparoit à partir, quittèrent promptement leur festin, et étant desccndus dans le grand salon, trouvèrent encore S. A. S. Mlle de Clermont qui étoit au fruit. M. le duc d'Orléans et S. E., charmés de cette agréable rencontre, se dédommagèrent de la peine qu'ils avoient eue de quitter leur table et firent collation, en passant, à la table de la princesse, qui en marqua sa joie. Après le dîner de la reine, le roi Stanislas, après un moment de conversation avec la reine, sa fille, parut sur la fin du repas de S. A. R. Mlle de Clermont qui, apercevant S. M., se leva de table. Le roi Stanislas l'embrassa, de même que toutes les dames du palais, et partit ensuite, feignant d'aller à Sarrebourg.

« Mgr. le duc d'Orléans le suivit, de même que M. le duc d'Antin et plusieurs autres seigneurs, et la reine partit enfin de Saverne pour aller coucher à Sarrebourg. Le prince de Pons salua la reine ft son départ, à la tête de son détachement; les Carabiniers qui étoient dans la place du palais, précédèrent la marche et la bourgeoisie se trouva ce jour-là sous les armes dans les rues. Toute l'artillerie fit feu a la sortie de la ville, ct la maréchaussée d'Alsace qui étoit en dehors, précéda les Carabiniers. Sur la hauteur de la montagne de Saverne, l'on trouva le roi Stanislas à cheval, accompagné de Mgr. le duc d'Orléans, de M. de Clermont et des deux intendants d'Alsace et de Metz; les marquis de Nangis, de Dreux, et le comte de Tesse, étant descendus de carrosse, prirent congé du roi, et la reine apercevant le roi, son père, lui tendit plusieurs fois la main à la portière de son carrosse, où il se tint pendant quelque temps. »

 

Le Roy de Sainte Croix (Les Quatre Rohan).

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