Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
L'Avènement du Grand Monarque

L'Avènement du Grand Monarque

Révéler la Mission divine et royale de la France à travers les textes anciens.

Publié le par Rhonan de Bar
Publié dans : #HISTORIQUE VILLE

DE QUELQUES FONTAINES DE PARIS. ANCIENNES ET NOUVELLES.

DESSINS AU TRAIT PAR M. MOISY. TEXTES ET DESCRIPTIONS HISTORIQUES PAR M. AMAURY DUVAL.

 

FONTAINE DE LA PLACE DU PALAIS-ROYAL,

CONNUE SOUS LE NOM DE CHATEAU-D'EAU.

PLANCHE IX.

LE CHATEAU-D’EAU n'est, à bien dire, qu'une dépendance du Palais-Royal. Il ne fut construit que pour lui servir de point de vue.

En 1629, le cardinal de Richelieu, qui venait d'acheter l'hôtel Mercoeur, celui de Rambouillet, et quelques maisons voisines, fit abattre tous ces bâtiments, et chargea Jacques Lemercier[1], premier architecte du Roi, de lui construire un hôtel sur cet emplacement.

Il n'y eut point d'abord de place devant le Palais-Royal. La largeur de la rue

Saint - Honoré, le séparait seule des maisons qui étaient en face; mais Anne d'Autriche, régente du royaume, étant venue habiter avec le jeune roi Louis

XIV, ce palais qu'on appelait alors le Palais Cardinal, parce qu'il avait appartenu au cardinal de Richelieu, fit former en avant une place carrée. On commença par abattre l'hôtel de Sillery, dont le cardinal avait hérité par testament[2] ; et c'est sur les ruines même de cet hôtel, que Philippe d'Orléans, qui avait reçu de Louis xiv le Palais-Royal, en augmentation d’apanage, fit élever le Château-d'eau, pour donner à la place un plus bel aspect. En 1719, Robert Decotte, premier architecte du Roi, fut chargé de la construction de ce monument, destiné à servir de réservoir aux eaux de la Seine et d'Arcueil, et à entretenir les bassins du Palais-Royal et des Tuileries. Peu de changements ont été faits à cet édifice, qui se composait alors, comme aujourd'hui, d'une façade ornée de bossages vermiculés, et terminée par deux pavillons quarrés décorés dans le même goût. Au milieu est un avant-corps formé de quatre colonnes d'ordre toscan, qui supportent un fronton, dans le tympan duquel étaient sculptées les armes de France. Deux statues de Coustou, le jeune, couronnent ce fronton. Elles représentent la figure de la Seine, et celle de la nymphe d'Arcueil. Au milieu de cet avant-corps, on a pratiqué une niche, au bas de laquelle s'échappait autrefois l'eau par un robinet, et où l'on a depuis substitué un mascaron, qui laisse tomber l'eau dans une cuvette placée en avant. Un trottoir, d'un mètre de haut environ, sert de soubassement, dans toute sa longueur, à la façade de ce monument. L'inscription qui y avait été gravée existe encore ; on l'a faussement attribuée à l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, On ignore de qui elle est.

QUANTOS EFFUNDIT IN USUS.

« Pour combien d'usages elle épanche ses eaux ».

D’après la description qu'on vient de lire, on voit que la fontaine n'est dans ce monument qu'un très-petit accessoire. Aussi l'on s'est peu embarrassé d'en rendre les abords faciles et commodes. Cette fontaine ne sert guères, quoi qu'en dise l'inscription, qu'à abreuver les chevaux des fiacres qui sont continuellement sur la place. Les eaux d'Arcueil, de la Samaritaine et de la pompe de Chaillot s'y réunissent.

FONTAINE DE L'ÉCOLE DE MÉDECINE.

PLANCHE X.

Le bâtiment de l'École de Médecine, élevé, en 1744, sur l'emplacement de l'ancien hôtel de Bourgogne, passe généralement pour le chef-d'oeuvre du siècle dernier ; c'est au moins celui qui offre le moins de traces du style faux et maniéré dont tous les édifices de ce temps portent l'empreinte. Quoiqu'on puisse en trouver l'ordonnance trop théâtrale, on ne saurait disconvenir que les masses en sont bien balancées entre elles, que les lignes en sont grandes, et que les ordres employés à sa décoration ne sont point surchargés d'ornements étrangers et superflus. Dans l'histoire des arts, ce monument, ainsi que l'église de Sainte-Geneviève, serviront par la suite à marquer le passage du goût affecté de l'ancienne école, au goût sévère de la nouvelle, et M. Gondoin partagera avec Soufflot, la gloire d'avoir contribué à cette révolution en architecture.

Longtemps l'École de Médecine se trouva comme enterrée dans une rue étroite, d'où, faute de reculée, on ne pouvait apercevoir l'effet de son ensemble. La place qu'on voit aujourd'hui est prise sur le terrain qu'occupait l'église des Cordeliers, et quelques maisons voisines, que l'on a démolies tout récemment. Bientôt elle sera décorée de bâtiments symétriques qui se lieront à la fontaine déjà élevée dans l'axe de la porte principale de l'École de Médecine.

Cette fontaine, comme on peut le voir dans notre planche X, se compose de quatre colonnes d'ordre dorique cannelé, formant trois entrecolonnements, et couronné d'un entablement, derrière lequel est placé un réservoir, d'où l'eau tombe en nappe dans une large piscine semi-circulaire.

Si l'on considère cette fontaine comme un édifice d'utilité publique, rien ne saurait être plus mal imaginé. L'eau qui jaillit continuellement, et qui, par la hauteur de sa chute, tombe en pluie, en rend l'approche très-incommode.

Comment ensuite y recueillir l'eau, à moins d'y puiser dans le récipient même, ce qui n'est ni propre ni facile. Aussi, pour remédier à tous ces inconvénients, a-t-on été forcé, après coup, de placer en avant deux petites bornes avec des robinets pour l'usage domestique.

Telle n'a point été l'intention de l'architecte : dans cette fontaine il n'a voulu faire qu'une décoration qui correspondît avec le péristyle de l'amphithéâtre de l'École de Médecine, et qui lui servît de point de vue. Mais en lui prêtant cette idée, comment le justifierons-nous d'avoir violé les règles de son art, et d'avoir élevé un monument dont l'aspect n'a rien de pittoresque.

Quelques gens de goût ont déjà remarqué que les colonnes de ce monument sont trop allongées, et qu'elles sont d'un diamètre trop égal dans leur hauteur.

Pourquoi l'architecte, a-t-on ajouté, n'a-t-il point donné à son entablement le caractère ni les proportions de l'ordre dorique.

Quant à l'effet pittoresque, nous ne craindrons point d'avancer que l'architecte n'a nullement atteint le but qu'il s'était proposé. S'il a prétendu obtenir des jeux d'ombres et de lumières piquants et variés, en faisant tomber une nappe d'eau entre ses colonnes, il ne fallait pas mettre pour fond un long mur, que l'humidité a promptement coloré d'une teinte noire-verdâtre, et sur lequel l'eau se détache toujours d'une couleur sale. Pour donner de la diaphanéité et du brillant à une chute d'eau, il ne faut pas de fond ; l'air doit circuler derrière, et l'on doit apercevoir au travers, ou le ciel ou des arbres.

L'inscription un peu prétentieuse, placée dans la frise, fait connaître seulement que les eaux de la Seine alimentent cette fontaine ; mais on se propose  d'y faire arriver une partie des eaux de l'Ourcq, qui se réuniront à celles que fournissent déjà les pompes Notre-Dame et de Chaillot, ainsi que l'aqueduc d'Arcueil.

NAPOLEONIS. AUGUSTI. PROVIDENTIA

DIVERGIUM SEQUANE

CIVIUM COMMODO. ASCLEPIADEI ORNAMENTO.

C'est-à-dire :

« Par les soins prévoyants de l'Empereur Napoléon, des eaux de la Seine « ont été amenées ici pour la commodité des citoyens et l'ornement du sanctuaire d'Esculape ».

FONTAINES DE LA RUE GARANCIÈRE, DE RICHELIEU,

ET DE LA RUE MONTMARTRE.

PLANCHE X I.

FONTAINE DE LA RUE GARANCIÈRE.

La fontaine de la rue Garancière, par son emplacement, et par la simplicité de sa décoration, mérite à peine le nom de monument. Adossée contre un mur, placée sur le même alignement que les maisons, elle ne sert en aucune façon à l'embellissement de cette rue. Pour l'apercevoir, il faut s'en approcher de très-près. Elle se compose d'une niche encadrée dans un chambranle, et surmontée d'une espèce de cartouche, qu'entoure une moulure lourde et contournée. Au bas est un mascaron de bronze, qui laisse couler, de temps en temps, un maigre filet d'eau.

Cette fontaine fut construite, en 1715, aux frais et par ordre de la veuve d'un prince de Condé, ainsi que nous l'apprend l'inscription qu'on lisait autre fois sur un marbre noir placé dans le cartouche. Nous la rapporterons ici avec sa traduction :

AQUAM A PREFECTO ET EDILIBUS ACCEPTAM HIC, SUIS IMPENSIS, CIVIBUS FLUERE

VOLUIT SERENISSIMA PRINCEPS ANNA-PALATINA EX BAVARIIS, RELICTA SERENISSIMI

PRINCIPIS HENRICI-JULII BORBONII PRINCIPIS CONDAEI. ANNO DOMINI M.DCCXV.

« La princesse sérénissime Anne-Palatine de Bavière, veuve du prince sérénissime Henri-Jules de Bourbon, prince de Condé, a voulu qu'à ses frais l'eau donnée par le prévôt des marchands, et les échevins de la ville, coulât  ici pour la commodité des citoyens. L'an du seigneur 1715 ».

Le prince de Condé, dont il est ici question, était fils du grand Condé, et renommé lui-même, autant par un esprit cultivé, que par le courage dont il donna des preuves au passage du Rhin, et à la bataille de Senef.

Il paraît que la rue Garancière a pris son nom de l'hôtel Garancière qui y était bâti. Elle a, dit-on, porté successivement le nom de Garancée et de Garance ; mais cette différence dans les noms des rues a dû souvent provenir de l'ignorance de ceux qui les écrivaient.

Cette fontaine s'alimente du trop-plein des bassins du Luxembourg. Aussi ne coule-t-elle que très-rarement. Elle n'est même pas comprise dans la distribution des fontaines de Paris.

FONTAINE DE RICHELIEU.

Cette fontaine a pris son nom du nom même de la rue où elle est située, comme celle-ci avait pris le sien du nom du cardinal de Richelieu. On sait que ce prélat avait fait construire un palais dont une des façades donnait sur cette rue, et qui a d'abord été appelé Palais-Cardinal, et ensuite Palais-Royal.

Placée à la bifurcation de la rue de Richelieu et de la rue Traversière, cette fontaine se trouve adossée à l'angle que forment les maisons des deux rues. Elle offre dans son ensemble un massif carré, ayant, un peu en avant corps, un chambranle avec consoles qui soutiennent un fronton, comme sont les croisées des grands édifices; le tout est surmonté d'un petit attique qui répète les profils et les renfoncements du dessous. Le tympan du fronton est décoré d'une coquille, et dans le milieu du chambranle sont deux tables un peu en saillie. Au bas de la première est un mascaron de bronze, qui jette de l'eau, et dans la seconde on lisait cette inscription de Santeuil :

QUI QUONDAM MAGNUM TENUIT MODERAMEN AQUARUM ,

RICHELIUS, FONTI PLAUDERET IPSE NOVO.

C'est-à-dire :

« Richelieu, qui eut autrefois le gouvernement de la navigation, verrait lui

« même avec plaisir couler l'eau de cette nouvelle fontaine ».

Dans cette inscription, le chanoine de Saint-Victor, avait cherché à faire allusion à la surintendance de la navigation, charge que le cardinal joignit à tant d'autres. Déjà pour rappeler cette qualité, l'architecte du Palais-Royal, Lemercier, avait orné de proues de vaisseau la façade qui donne sur la seconde cour de ce palais.

La fontaine de Richelieu, comme la plupart des anciennes fontaines, est dépourvue d'une cuvette pour recevoir les eaux qui coulent du mascaron. Ces eaux, tombant sur une pierre, et rejaillissant de tous côtés, rendent l'entrée des deux rues toujours sale et incommode pour les piétons.

Cette fontaine est du nombre de celles qui avaient été ordonnées par arrêt du 22 avril 1671. Ce sont les eaux réunies de la pompe à feu de Chaillot et de la Samaritaine, qui servent à l'alimenter.

FONTAINE DE LA RUE MONTMARTRE.

Soit que jusqu'ici l'on n'ait point regardé les fontaines de cette capitale comme des monuments assez importants pour en faire une mention particulière, soit que la multiplicité des objets, dont les historiens de Paris avaient à rendre compte ne leur ait point permis d'entrer dans de longs détails à cet égard, toujours est-il que les nombreuses descriptions ou histoires de cette ville n'offrent que des renseignements très-vagues et très-incertains sur l'origine et la construction de chaque fontaine. Plus que toute autre, celle de la rue

Montmartre paraît avoir été oubliée. On ne trouve dans aucun ouvrage imprimé, la trace de sa fondation. Dans ses recherches historiques et critiques, Jaillot n'en parle point ; Piganiol et ses copistes ne font que la nommer en passant.

Thierri seulement, qui la désigne sous le nom de fontaine de Montmorency, dit que peu d'années auparavant elle avait été rétablie; et il écrivait en 1787.

Mais en fouillant dans les archives de la préfecture, nous avons trouvé différents titres et transactions qui font connaître que le terrain sur lequel l'on a bâti cette fontaine, a été cédé aux échevins de la ville par M. de Luxembourg Montmorency, moyennant une concession de trente lignes d'eau pour la consommation de son hôtel. On fut obligé aussi d'acheter, près du même emplacement, une échoppe appartenant à une dame veuve Lebrest La date de ces titres est de 1713 ; mais la fontaine ne fut réellemcnt construite qu'en 1717.

S'il est permis de placer ici quelque hypothèse, nous avancerons, sans toutefois rien affirmer, que la fontaine de la rue Montmartre a été faite à la place de la fontaine qu'on avait projetée au Petit-Carreau, et qui, très-probablement, ne fut jamais exécutée[3] . Nous avons déjà eu occasion de faire remarquer que toutes celles qui avaient été ordonnées par l'arrêt du 22 avril 1671, ne furent point construites sur-le-champ, ni dans les emplacements même qui d'abord avaient été choisis. Ce qui donnerait quelque vraisemblance à cette conjecture c'est que dans le plan perspectif de Paris, gravé par Lucas, en 1734, d'après les dessins de Bretez, et par ordre de M. Turgot, prévôt des marchands, se trouve l'élévation de la fontaine Montmartre, et que celle du Petit-Carreau ne s'y trouve pas.

Adossée à une des maisons de la rue Montmartre, cette fontaine n'a que très peu de saillie. Elle ne consiste que dans un assez petit avant-corps dont les pieds-droits sont ornés de congélations, et qui est surmonté d'un fronton triangulaire. Le milieu se divise en trois tables lisses d'inégales proportions, et au bas desquelles est le robinet d'où coule l'eau réunie de la pompe Notre

Dame et de celle de Chaillot.

 

[1] Jacques Lemercier est un des architectes qui ont exécuté à Paris le plus de travaux. Il éleva la Sorbonne, l'Oratoire, le Palais Cardinal, l'église Saint-Roch, etc... On lui doit aussi, et ce n'est pas là son chef-d'oeuvre, le couronnement du pavillon du milieu de l'ancien Louvre. C'est lui qui imagina ces grandes cariatides placées au troisième étage, et qui gâtent beaucoup la décoration de cette façade. Un reproche plus grave à faire à sa mémoire, c'est sa conduite envers le Poussin : avec Vouet et Fouquières, il contribua à empêcher ce grand artiste de peindre la galerie du Louvre. [2] On raconte une anecdote assez singulière, et propre à donner une idée du caractère et de la puissance du cardinal. Brulart de Sillery, fils du président de ce nom, quelque temps avant de léguer son hôtel au prélat, jouait avec lui, et perdait beaucoup. Un coup douteux survint, et on en appela à la galerie pour le décider. D'une voix unanime, Brulart fut condamné par les courtisans, et comme il eut peine à contenir son indignation, le cardinal qui s'en aperçut, alla le soir auprès de lui lorsqu'il sortait, et, le prenant familièrement par la tête, lui dit : « Voilà « une belle tête sur un beau corps; il serait dommage de l'en détacher ». [3] Il ne faut pas regarder comme une preuve du contraire, l'inscription que Santeuil a faite pour y être gravée. Nous rapporterons ici cette inscription, qui ne trouverait pas sa place autre part :

Auri sacra sitis non larga expletur opum VI :

Hinc disce aeterno fonte levare sitim.

« L'infâme soif de l'or ne peut se rassasier, même à force de richesses. Apprenez de-là à vous désaltérer aux sources éternelles. »   Cette inscription est à-la-fois critique et mystique. Elle faisait allusion à la cupidité des hommes de finance dont ce quartier était rempli ; et l'on y reconnaît l'influence de l'habit que portait l'auteur.

 

Articles récents

Hébergé par Overblog