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L'Avènement du Grand Monarque

L'Avènement du Grand Monarque

Révéler la Mission divine et royale de la France à travers les textes anciens.

Publié le par Rhonan de Bar
Publié dans : #MAISONS NOBLES DE LORRAINE

 

545px-Blason Armand Gaston Maximilien de Rohan-Soubise (167

 

TROISIEME EXTRAIT

 

LE CARDINAL DE ROHAN

AU MARIAGE DE LOUIS XV

 

....En 1725, le 15 du mois d'Août, se ht dans la cathédrale, le mariage de Louis XV, roi de France (représenté par Louis, duc d'Orléans, premier prince du sang), avec la princesse Marie, fille de Stanislas Leczinski, roi de Pologne, et de Catherine Opalinska, son épouse. Un ban de mariage avait été publié le 22 Juillet précédent tant en la paroisse de Versailles qu'en celle de Saint-Jean de Wissembourg. MM. les cardinaux de Noailles, archevêque de Paris, et de Schoenborn, évêque de Spire, avaient dispensé des deux autres publications. Les fiançailles furent célébrées le 14 Août dans l'hôtel du gouvernement par M. le cardinal de Rohan. Le lendemain, la cérémonie fut annoncée par tous les canons des remparts.

La nef et le choeur de la cathédrale furent ornées des tapisseries de la couronne. Lé clergé séculier et régulier s'y rendit sur les 10 heures du matin et se rangea en haie dans les deux côtés de la nef. Vers les II heures, le cardinal de Rohan reçut la princesse à la porte de l'église cathédrale et lui présenta de l'eau bénite; puis, précédé de son clergé, il s'avança vers le grand autel. La princesse venait après lui entre son père et sa mère, le roi et la reine de Pologne, et était suivie de M. le duc d'Orléans, représentant le roi de France, de M. le duc d'Antin, et de M. le comte de Beauvau, tous deux ambassadeurs extraordinaires du roi. Etant arrivés dans le choeur, la princesse, le roi ct la reine se mirent sur un grand prie-dieu, couvert d'un tapis de velours cramoisi, sous un dais suspendu au milieu du sanctuaire. Il y avait trois fauteuils sur ce prie-dieu. Celui du milieu était pour la princesse et les deux autres pour le roi ct la reine. M. le duc d'Orléans se plaça sur une estrade à deux degrés couverte d'un tapis. Elle était contre le pilier le plus proche du prie-dieu du côté de l'épître, vis-à-vis le trône de M. le cardinal qui était sous un dais du côté de l'Evangile sur une estrade aussi à deux marches. Il y avait sur celle de M. le duc d'Orléans un tabouret et un carreau pour lui et une petite banquette pour les deux ambassadeurs.

Dès que Leurs Majestés et la princesse curent fait leur prière sous le dais, M. le cardinal se tourna vers le prie-dieu pour commencer la cérémonie. La princesse, à qui le roi son père donnait la main, et M. le duc d'Orléans, y vinrent aussitôt. M. le duc se mit à la droite de la princesse et le roi à sa gauche. M. le cardinal commença par un discours également solide et éloquent qui dura près de six minutes. En voici le texte

« Madame,

«  Quand je vous vois dans cc saint temple et que vous approchez de nos autels pour y contracter l'auguste alliance qui va vous unir au plus grand des rois et au plus aimable des princes, j'adore les desseins de Dieu sur vous, et j'admire avec transport par quelle route la Providence vous conduit au trône sur lequel vous allez monter.

Vous êtes, Madame, d'une maison illustre par son ancienneté par ses alliances et par les emplois éclatants que les grands hommes qu'elle a donnés à la Pologne ont successivement remplis avec tant de gloire. Vous êtes fille d'un père qui, dans les différens événemens d'une vie agitée par la bonne et par la mauvaise fortune, a toujours réuni en lui l'honnête homme, le héros et le chrétien. Vous avez pour mère et pour ayeule des princesses qui, semblables à Judith et à cette femme forte dont l'Ecriture fait le portrait, se sont attiré la vénération et le respect de tout le monde par la fidélité avec laquelle elles ont toujours marché dans la crainte du Seigneur. On voit en votre personne, Madame, tout ce qu'une naissance heureuse et une éducation admirable soutenue par des exemples également forts et touchans ont pu fournir de plus accompli; en vous règnent cette bonté, cette douceur et ces grâces, qui font aimer ce que l'on est obligé de respecter; cette droiture de coeur à laquelle rien ne résiste; cette supériorité d'esprit et de connaissance qui se fait sentir malgré vous, pour ainsi dire, et malgré la modestie et la noble simplicité qui vous sont naturelles; enfin, et c'est ce qui met le comble à tant de mérites, ce goust pour la piété et cet attachement aux vrais principes de religion qui animent vos actions et qui font la règle de votre conduite. Ornée de toutes ces vertus, à qu'elle couronne n'auriez-vous pas eu le droit d'aspirer, sans l'usage qui assujettit en quelque sorte les roys à ne prendre qu'autour du trône les princesses qu'ils veulent faire régner avec eux. Celuy qui donne les empires, met le sceptre de Pologne entre les mains du prince de qui vous tene2 la vie, et par là, en décorant le père, il conduit insensiblement la fille aux hautes destinées qu'il luy prépare; mais, ô mon Dieu! que vos desseins sont impénétrables! et que les voies dont vous vous servez pour faire réussir les conseils de votre sagesse, sont au-dessus de la prudence humaine! A peine ce prince est-il sur le trône, où le choix des grands et l'amour du peuple l'avaient placé, qu'il se voit forcé de le quitter, il est abandonné, trahi, persécuté; un coup fatal luy enlève un héros, son ami et le principal fondement de ses espérances; il cède aux circonstances sans que son courage en soit ébranlé; il cherche un asyle dans la patrie commune des roys infortunés; il vient en France; vous l'y suivez, Madame. Tout ce qui vous y voit, sensible à vos malheurs, admire votre vertu; l'odeur s'en répand jusqu'au trône d'un jeune monarque qui, par l'éclat de sa couronne, par l'étendue de sa puissance et plus encore par les charmes de sa personne, pouvoit choisir entre toutes les princesses du monde; guidé par de sages conseils, il fixe son choix sur vous, et c'est ici que le doigt de Dieu se manifeste; il se sert du malheur même qui sépare le roy, votre père, de ses sujets et qui vous enlève à la Pologne pour nous donner en vous une reine qui sera la gloire d'un père et d'une mère, dont elle fait la consolation et les délices; une reine qui rendra heureuse la nation la plus digne de l'être, au moins par son respect et par sa fidélité pour ses souverains; une reine

qui, inviolablement attachée à ses devoirs, pleine de tendresse et de respect pour son époux ct pour son roy, ct sagement occupée de ce qui peut lui procurer le solide bonheur, rappellera les tems de l'impératrice Flaccile, dont l'histoire nous apprend que n'ayant jamais perdu de vue les préceptes de la loy divine, elle en entretenoit assiduement le grand Théodose, et que ses paroles, comme une pluie féconde, arrosoyent avec succès les semences de vertu que Dieu avait mises dans le coeur de son époux.

Venez donc, Madame, venez à l'autel; que les engagemens que vous allez prendre, saints par eux-mêmes (puisque, selon l'apôtre, ils sont le symbole de l'union de Jésus-Christ avec son Eglise), soient encore sanctifiés par vos dispositions; pénétrée de ce que vous devez à Dieu, faites lui hommage de ce que vous êtes et de ce que vous allez être; reconnoissez qu'en couronnant vos mérites, il couronne ses dons. Et vous) chrétiens qui m'écoutez, en voyant les récompenses qui sont données, dès ce monde, à la vraie vertu, apprenez à la respecter et à l'aimer! »

Après ce discours, le duc d'Orléans ct la princesse se donnèrent la main, et le cardinal les maria suivant les formes prescrites par le rituel de Strasbourg. Le cardinal célébra ensuite pontificalement la grand'messe, qui était celle de la fête de l'Assomption de la sainte Vierge. Elle fut chantée en musique et on y dit des collectes particulières pour demander la bénédiction de Dieu sur ce nouveau mariage. Le cardinal, en allant de l'autel à son trône, salua d'abord l'autel, puis la nouvelle reine, le roi et la reine de Pologne, qui rendirent le salut. A la préface, le diacre les encensa tous trois. Après le Pater, la reine de France et M. le duc d'Orléans s'avancèrent vers l'autel, et s'étant mis à genoux sur les marches, on étendit sur leurs têtes un poële d'étoffe d'argent qui était tenu par le comte Pierre d'Antin, évêque-duc de Langres, ct par le comte Charles-Ernest-Joseph de Truchsess, tous deux chanoines capitulaires. Le cardinal ayant dit sur eux les oraisons portées par le rituel, la reine et le duc retournèrent à leurs places. A la communion, le diacre porta la patène à baiser à la reine de France, au roi et à la reine de Pologne.

Après la messe, le cardinal entonna le Te Deum à la fin duquel il dit la collecte en actions de grâces. Il porta ensuite le corporal à baiser à la reine, et lui présenta l'acte de célébration de mariage à signer sur deux registres, l'un de la paroisse de Saint-Laurent à la cathédrale, et l'autre de celle de Saint-Louis. Il fut ensuite signé par le roi et la reine de Pologne, par M. le duc d'Orléans, par MM. Le duc d'Antin ct le comte de Beauvau, comme témoins de la part du roi de France, par MM. le prince de Pons et le comte du Bourg, comme témoins de la part de la reine.

Le curé de la cathédrale, où s'était fait le mariage, ct celui de Saint-Louis, en la paroisse duquel demeurait la reine, signèrent ensuite, ct après eux le cardinal de Rohan. De là, S. E. reprit la chape et la mître, et, précédé de tout le clergé, il retourna à la grande porte de l'église, où il fit un second discours, dont la teneur suit:

« Madame,

« Permettez-moi, à la fin de l'auguste cérémonie qui comble nos espérances ct nos voeux, de demander à Votre Majesté sa protection royale pour l'église de Strasbourg.

Cette église n'a point oublié et n'oubliera jamais les bienfaits signalés qu'elle a reçus de nos premiers roys; mais que ne doit-elle pas à notre dernier monarque? Livrée par le malheur des tems aux fureurs du schisme et de l'hérésie, elle auroit peut-être péri comme bien d'autres, si ce grand prince, en rentrant dans les droits de ses ancêtres, n'avoit pris sa défense et ne l'avoit soutenue de tout son pouvoir. Elle luy doit l'avantage de se voir rétablie dans la possession de ce saint temple dont elle avoit été bannie.

Tout nous rappelle icy sa pieuse et royale magnificence : les temples ornés, les pasteurs libéralement entretenus, les missions fondées, les nouveaux convertis protégés et secourus, sont autant de monumens du zèle et de la piété d'un roy dont la mémoire ne finira jamais. Il n'a pas eu la consolation d'achever l'ouvrage qu'il avait entrepris, c'est-à-dire la réunion de toutes les brebis de cet illustre troupeau dans un même bercail: elle étoit réservée au digne héritier de son zèle et de sa couronne; ce sera vous, Madame, qui représenterez à votre auguste époux ce qu'exigent de luy le souvenir de son bisayeul, sa propre gloire et nos besoins qui sont ceux de la religion; Vous ne demanderez point que l'on ait recours à ces voyes qui aigrissent sans persuader, elles ne seroient point du goust de Votre Majesté, et à Dieu ne plaise que nous voulussions les luy suggérer; ils sont vos sujets, Madame, ces enfans qui nous méconnoissent: et l'église de Strasbourg, pleine de confiance dans la miséricorde de Dieu, se regarde toujours comme leur mère. Nous vous conjurons donc, par les entrailles de Jésus-Christ, d'employer, pour procurer leur réunion, tout cc qu'une charité active mais compatissante pourra vous inspirer. Dieu bénira les soins de Votre Majesté et nos désirs, et il se servira des exemples de votre piété et de votre foy, pour confondre enfin l'erreur ct pour faire triompher la vérité.

« Régnez longtems sur nous, Madamc, pour le bonheur du roy et pour la félicité de ce grand royaume; que Dieu exauce les prières que l'Église vient de luy offrir pour Votre Majesté, et daignez nous mettre au rang de vos sujets les plus zélés et les plus fidèles. »... A suivre.

 

Le Roy de Sainte Croix. (Les Quatre Rohan).

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